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Bien-être animal : pourquoi la présentation de la révision européenne n’a pas rassuré les filières animales ?

A l'occasion de l'assemblée générale d'Inaporc, la DG Santé a présenté les avancées des travaux de la future réglementation européenne bien-être animal devant toutes les interprofessions de l’élevage qui ont fait savoir leur inquiétude et mécontentement.

A l’occasion de la réunion de toutes les interprofessions des filières animales françaises lors de l’assemblée générale d’Inaporc le 7 juin 2023, Lucie Carrouée, cheffe d’unité adjointe de l’unité bien-être animal G3 de la direction générale de la santé et de la sécurité sanitaire (DG Santé), a présenté l’avancée des travaux de la révision en cours de la réglementation européenne autour bien-être animal. Entre moqueries, exaspérations et rires jaunes, les réactions de l’audience de l’assemblée générale ont traduit une grande inquiétude quant à cette future législation.

L’Efsa a aujourd’hui publié 11 opinions scientifiques du point de vue du bien-être animal. Si les aspects socio-économiques de ces suggestions n’ont pas été évalués, les interprofessions se sont montées très dubitatives quant à une éventuelle application de ces opinions scientifiques. « L’Efsa recommande des densités de poulets de chair à 11 kg au m² alors qu’on est à 40 kg par m² aujourd’hui, et que les importations ne cessent d’augmenter alors que la production dans les pays tiers est beaucoup moins contraignante. Cette recommandation, en plus d’être impossible, est contradictoire avec l’absence de clauses miroir », a réagi Jean-Michel Schaeffer, président de l’Anvol.

« Dans les études d’impact que nous menons, nous vérifions que la nouvelle loi n’impacte pas l’autosuffisance des productions européennes », tentait de rassurer Lucie Carrouée sous la bronca de l’assemblée.  « L’Ifip a évalué les coûts des suggestions de l’Efsa, et ça se chiffre à plusieurs milliards d’euros à l’échelle de la filière », ajoute Thierry Meyer, président d’Inaporc. Les interprofessions redoutent que la nouvelle réglementation demande des investissements trop élevés et une transition trop rapide.

« La filière foie gras est passée de cages individuelles à collectives en 2015 pour la partie engraissement, ce qui a nécessité un investissement de 100 millions d’euros à l’échelle de la filière », rappelle Eric Dumas, président du Cifog. « Cela fait 8 ans et on nous demande déjà de changer en retirant la cage, alors que les investissements de l’époque sont tout juste remboursés de moitié. Ces démarches s’inscrivent dans un temps long, on ne peut pas nous demander de changer 8 ans plus tard… », détaille-t-il.

« Les suggestions de l’Efsa ne sont qu’un point de départ », nuance Lucie Carrouée. « Le soutien de la pac sera essentiel pour assurer cette transition ». Mais encore une fois, ces propos ont fait réagir. « La Pac ne paie déjà pas ce qu’elle devrait financer et son budget n’est pas en hausse à ce que je sache », s’est étonnée Christiane Lambert, présidente du Copa. « Au niveau du bien-être animal, les États membres sous-utilisent la Pac aujourd’hui et pourront ainsi en utiliser le plein potentiel », a répondu Lucie Carrouée.

Où en est-on ?

La DG santé est en train d’évaluer les risques des suggestions de l’Efsa et de leurs impacts socio-économiques. « Nous aimerions finaliser cette étude d’impact pour l’été 2023, pour que les premières propositions législatives puissent voir le jour au courant de l’automne 2023 », espère Lucie Carrouée. Les propositions législatives s’articuleront autour de 4 axes :

  1. Le règlement sur la protection des animaux au niveau de l’élevage
  2. Le règlement sur la protection des animaux au moment de la mise à mort
  3. Le règlement sur la protection des animaux durant le transport, avec révision des densités, des conditions de températures et durées de transport.
  4. Le règlement sur l’étiquetage du bien-être animal. « Il s’agit d’une base légale pour permettre le développement d’un étiquetage à l’avenir. Mais il y a encore beaucoup de discussions entre États membres pour harmoniser les approches des initiatives qui foisonnent dans de nombreux pays », explique Lucie Carrouée.

« Les normes de bien-être, d’environnement, se multiplient beaucoup trop rapidement. Cela dégrade notre souveraineté et nos investissements. L’aquaculture française ne couvre que 2 % de la consommation de produits de la mer en France. Avec notre flotte, on monte péniblement à 15 %, ce qui reste très faible. En France, ça fait 30 ans qu’il n’y a pas eu de création de parc aquacole en pisciculture traditionnelle et ça ne se fera pas tellement la réglementation est contraignante », témoigne Maialen Berterreche, vice-présidente du comité interprofessionnel des produits d’aquaculture (Cipa).

Les interprofessions ont pu compter sur le soutien de Marc Fesneau, présent à l’assemblée générale. « Les filières ont besoin de temps pour amortir les nouvelles normes. C’est ce que le Président de la République Emmanuel Macron a suggéré lorsqu’il parlait de pause dans la réglementation, avant que les défenseurs de l’environnement ne lui tombent dessus », a indiqué le ministre de l'Agriculture pour conclure la séance.

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