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Coproduits
La Normandie fait le point sur ses pratiques RSE

Une étude portée par l’Area Normandie et Réséda a fait le point sur les gisements et la valorisation des coproduits en Normandie. Sa restitution a donné lieu à des échanges entre entreprises.

L’heure n’est plus au gâchis. C’est la conclusion qui s’est dégagée du colloque sur la valorisation des coproduits en Normandie, le 11 février 2020. Optimiser la valorisation des coproduits permet d’économiser des ressources, mais aussi de développer la performance des entreprises. L’Area Normandie et Réséda ont mutualisé leurs compétences pour réaliser une étude, financée par la Région Normandie et l’Ademe, visant à identifier les pratiques et gisements de coproduits dans la Région. Une enquête, menée par Ivamer auprès de quarante-huit entreprises, a permis de dresser un tableau selon les secteurs.

Une grande diversité des coproduits

Dans certains secteurs, comme la viande, la gestion des coproduits est très rationalisée, la réglementation stricte fournit un cadre et les pertes sont limitées. En produits de la mer, il y a plusieurs types de coproduits. Les coquilles commencent à exciter les convoitises, les projets sont nombreux : pavés drainants pour le bâtiment, bioplastiques, fabrications de brosses à dents ou de bobines pour imprimantes 3D. Un porteur de projet confie néanmoins que « ces coquilles étaient des déchets pour les opérateurs, ils devaient payer pour s’en débarrasser. Maintenant, certains nous les proposent à des prix supérieurs à de la matière première brute, ce n’est alors plus intéressant pour notre projet ». Les coproduits de poissons, liés aux opérations de filetage, sont au contraire bien valorisés, en soupe, en PAI, pour l’aquaculture ou dans des innovations locales comme des huiles et hydrolisats. Le marché est très demandeur.

La méthanisation décolle…

La méthanisation monte en puissance, tant pour les graisses issues de l’industrie des viandes que pour les déchets issus de la fabrication des plats préparés, pour lesquels c’est dorénavant la solution majoritaire. Dan ce domaine, la méthanisation est intéressante, car il s’agit parfois de mélanges, et elle permet de valoriser l’ensemble.

Dans la filière cidricole, les petits opérateurs utilisent aussi beaucoup cette pratique. L’émergence de nouvelles solutions comme Organix, proposée par Suez, qui met en relation l’industriel et des méthaniseurs par une plateforme d’enchères inversées, pourrait accélérer ce développement.

…mais l’alimentation animale reste leader

Pour Benoît Rouillé, chef de projet à l’Institut de l’élevage, « il faut penser à l’alimentation animale en première intention. Elle permet d’utiliser des protéines non consommables en alimentation humaine pour les convertir en protéines utilisables, c’est positif pour l’environnement et dans l’esprit des consommateurs. De plus, c’est crucial pour aller vers l’autonomie protéique de la France ! »

En Normandie, la valorisation par les animaux s’effectue de façon majoritaire directement dans les élevages de ruminants et de porcs. Il s’agit surtout de pulpes de betterave (88 %), mais cette part va diminuer avec la fermeture de la sucrerie de Cagny, une des trois de la Région. Le lactosérum est valorisé dans les élevages porcins. L’industrie de l’alimentation animale valorise, elle, les tourteaux de colza, les issues de céréales et les coproduits du secteur laitier.

Un enjeu intégré à Agrial et Isigny

Pour Anne Larroquette, directrice développement durable de la coopérative Agrial, « l’enjeu est de créer de la valeur sur toute la production de la coopérative, y compris les déchets ». La coopérative a adopté de nouvelles pratiques en ce sens, en cartographiant les gisements dans les différentes unités de productions. 52 % des coproduits sont vendus en industrie, ce sont surtout les écarts de tri dans les légumes, liés aux exigences de la GMS, qui trouvent preneurs pour la surgélation, les ingrédients ou les purées. Chaque année, ce sont 20 000 tonnes d’écarts de carottes qui sont ainsi valorisées. 24 % des coproduits ne sont pas vendus, mais recyclés en alimentation animale ou en compost, auprès des adhérents notamment.

« Nous avons un programme de recherche pour trouver d’autres voies, on va vers un cracking du légume ! » s’enthousiasme Anne Larroquette. Par exemple, une purée enrichie en protéines de lait destinées à la nutrition hospitalière a été lancée pour valoriser les coproduits du lait via la filiale Créaline.

Trois personnes à temps plein sur la gestion des coproduits à Isigny

« À Isigny, ce sont trois personnes (sur 1100, ndlr) qui travaillent à temps plein sur les coproduits », explique Gérald Andriot, directeur des opérations de la coopérative Isigny Sainte-Mère. La coopérative produit des coproduits liquides (environ 2 000 t de coproduits secs par an) pour la plupart valorisés en poudre de consommation animale. Il est difficile de mieux valoriser certains coproduits.

Ainsi, les protéines sériques issues de la fabrication du camembert sont trop acides pour être utilisées en poudre de lait infantile. Au contraire, celles des fromages à pâte pressée sont idéales, mais le fromage de ce type que fabrique Isigny c’est la mimolette… les poudres obtenues seraient donc orange ! Elle dispose aussi de coproduits solides (800 t d’extraits secs par an). Les fromages déclassés trouvent facilement preneurs, via des acheteurs à Rungis spécialisés dans le second choix ou la fonte de fromages (crème de camembert).

D’autres cherchent encore des solutions pérennes

L’usine Stefano Toselli (groupe Ter Beke), qui produit des plats cuisinés frais et surgelés à base de pâtes, doit gérer 1 400 tonnes par an de coproduits, dont 55 % de pâtes. Alexandre Le Cabellec, le directeur RSE explique : « nous valorisions 95 % de ces déchets par la méthanisation. C’est facile et c’est éthique. Mais il y a 100 km de transport jusqu’à notre exutoire. Comme le contrat arrive à échéance, nous cherchons d’autres solutions ou un autre méthaniseur ». Le premier projet va être de diminuer de 10 % les pertes sur les pâtes en responsabilisant des acteurs de lignes. Les pâtes pourraient être aussi séparées des autres déchets pour une valorisation en alimentation animale, mais se pose la question du stockage en l’absence d'un local dédié.

Hervé Cantelou, directeur du site Barry Callebaut de Louviers confesse aussi la difficulté de valoriser ses coproduits : « nous avions trouvé une filière pour valoriser les masses de cacao, aux Pays-Bas, mais elle s’est arrêtée brutalement. La pérennité des solutions est un point clé, car trouver des solutions en urgence, c’est difficile ».

Un éventail d’aides disponibles

« Le coût total d’un déchet, c’est quatorze fois celui de la facture de disposition des déchets, quand on compte la gestion interne », explique Sébastien Huet de l’Ademe qui alerte les entreprises sur l’importance de prendre des mesures. L’Ademe propose une prestation pour les TPE/PME qui ne paient que si les économies dépassent un seuil convenu entre les deux parties. La Région, via l’Agence de développement pour la Normandie, dispose de plusieurs fonds consacrés à l’innovation. PME, TPE et ETI sont éligibles.

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