« En trois ans, on a perdu 617 000 agneaux ! » : comment la filière ovine veut enrayer la baisse de production
Les abattages d’agneaux reculent depuis 4 ans, mais la filière croit au potentiel et pousse à travailler au cœur de chaque ferme aux solutions permettant de relancer à la production. Une urgence, car la demande en agneaux français est bien là, nous explique Patrick Soury, président d’Interbev Ovins.
Les abattages d’agneaux reculent depuis 4 ans, mais la filière croit au potentiel et pousse à travailler au cœur de chaque ferme aux solutions permettant de relancer à la production. Une urgence, car la demande en agneaux français est bien là, nous explique Patrick Soury, président d’Interbev Ovins.

Les Marchés : Comment se porte la production ovine française ?
Patrick Soury : Sur 2025, nous tablons sur une baisse de 9 % de la production d’agneaux, en lien avec la FCO de l’été dernier. Ce sera alors la quatrième année de baisse des abattages, (-5,4 % en 2024, -8 % en 2023 et -4 % en 2022). En trois ans, on a perdu 617 000 agneaux ! C’est d’autant plus dommage que sur les dix années précédentes on avait réussi à stabiliser la production ovine.
Sur les dix années précédentes on avait réussi à stabiliser la production ovine.
L. M. : Comment faire pour enrayer la baisse de production ovine ?
P. S. : Le cheptel ne s’est pas effondré avec la FCO. Il y a encore un potentiel de production. À l’occasion du salon Tech-Ovin, nous voulons redonner une impulsion collective pour « produire plus et mieux ». Nous pensons qu’il est possible de revenir à des niveaux d’avant 2022, de retrouver, à terme, 1 million d’agneaux supplémentaires.
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L. M. : Sur quoi mise la filière ovine pour produire plus d'agneaux ?
P. S. : Sur l’accompagnement technique. Nous voulons optimiser le potentiel de chacun, par le potentiel du sol, de l’humain, à l’échelle de l’exploitation. Il est fini le temps du modèle unique.
Il est fini le temps du modèle unique.
Nous ciblons les techniciens, qui sont des atouts pour les éleveurs, avec un savoir-faire à valoriser. Avoir recourt à un technicien, ce n’est pas une charge, mais un investissement. Par exemple, avec la méthode Robustagno, une application, on peut vraiment avancer sur la mortalité et conduire 20 agneaux de plus par campagne dans un élevage, ce n’est pas anodin ! Les techniciens peuvent identifier les leviers de croissance propres à chaque élevage, et s’adapter aux objectifs des éleveurs.
Les techniciens peuvent identifier les leviers de croissance propres à chaque élevage
L. M. : La filière ovine réussit-elle à renouveler ses générations d’éleveurs ?
P. S. : La dynamique d’installation des jeunes, ou de porteurs de projets qui se reconvertissent, propre à notre filière, perdure. Nous sommes toujours à une installation pour un départ, néanmoins avec des cheptels un peu plus modestes. Ce qui peut s’entendre pour se faire la main, mais là encore il ne faut pas oublier le potentiel de croissance, et accompagner ces nouveaux installés pour faire progresser leur production. Là encore, avec des recettes adaptées, des boîtes à outils.
Nous sommes toujours à une installation pour un départ
L. M. : Comment résistent les abattoirs à la chute des disponibilités d’agneaux ?
P. S. : En trois ans, nous avons perdu 9 sites d'abattages d'ovins, selon les déclarations Ovinfos. Ce sont des abattoirs pluri-espèces qui ont fermé leur chaîne agneau.
En trois ans, nous avons perdu 9 sites d'abattages d'ovins
Il n’y a plus que trois abattoirs spécialisés sur l’agneau en France, qui ont rationnalisé leurs abattages. Par exemple, l’abattoir Charal de la Châtaigneraie, en Vendée, n’abat plus les agneaux, qui sont désormais orientés vers l’abattoir du Vigeant racheté par Bigard l’an dernier.
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L. M. : Et comment évolue la consommation d’agneau en France ?
P. S. : La demande pour les agneaux français demeure bien présente, comme l’indique l’envolée des prix pour Pâques. Certains points de vente avaient arrêté l’agneau, mais y reviennent, car l’agneau fait déplacer les clients.
L’agneau fait déplacer les clients
L. M. : Quel est votre premier bilan du programme « nos clients changent, changeons l’agneau » ?
P. S. : Il y a des points de vente qui, en changeant les façons de vendre, arrivent à développer les volumes ! A faire de la croissance dans ce contexte de prix élevés et de manque d’offre ! C’est très positif. C’est pour cela que notre programme « nos clients changent, changeons l’agneau » continue son déploiement.
Il y a des points de vente qui, en changeant les façons de vendre, arrivent à développer les volumes !
Il a débuté dans les régions productrices de l’Occitanie, PACA, Nouvelle-Aquitaine, et Auvergne Rhône-Alpes puis arrive, notamment grâce à l’appui des Britanniques, dans les régions Grand-Est et Hauts-de-France. C’est une méthode qui marche, c’est donc d’autant plus important de développer les volumes en amont.