Poules de réforme : comment les abattoirs s’adaptent à la baisse de l’offre ?
Les abattages de poules pondeuses de réformes reculent depuis 2021. Entre grippe aviaire, allongement des durées de pontes et concurrence étrangère accrue, les quelques abattoirs encore actifs sont fragilisés par une offre insuffisante. Pour conserver leur rentabilité, ces derniers choisissent de plus en plus d’intégrer à leurs plannings l’abattage de poulets.
Les abattages de poules pondeuses de réformes reculent depuis 2021. Entre grippe aviaire, allongement des durées de pontes et concurrence étrangère accrue, les quelques abattoirs encore actifs sont fragilisés par une offre insuffisante. Pour conserver leur rentabilité, ces derniers choisissent de plus en plus d’intégrer à leurs plannings l’abattage de poulets.
L’offre de poules de réformes est en nette diminution depuis 2021, Auparavant, la France abattait entre 27 et 30 millions de poules par an, contre 22,5 millions en 2022, 21,3 millions en 2023 et 25,7 millions en 2024. « Cette baisse est une conséquence de la crise de l’influenza aviaire » indique Laurex Ajavon, directeur de l’abattoir Volailles du Poher. Selon lui, cette épizootie, qui s’est étendue sur plusieurs années, a également provoqué la fermeture progressive de plusieurs abattoirs de poules de réforme dans l’Hexagone, réduisant à quatre le nombre d’établissements encore en activité. Ce qui a fortement contribué à la baisse des flux d’abattage.

Les producteurs d’œufs gardent plus longtemps les poules
Par ailleurs, la France manque d’œufs, alors que la demande s’amplifie chaque année.
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Pour répondre à leurs clients, de nombreux éleveurs conservent leurs lots de poules plus longtemps. « Tant que c’est rentable, les éleveurs gardent le plus longtemps possible les poules. Désormais les taux de pontes restent intéressants jusqu’à 4 semaines, au-delà de la période indiquée de ponte, grâce à la génétique » indique un professionnel de la filière qui ajoute « Nous pouvons dorénavant garder les poules deux ans, contre 72 semaines avant 2021. »
L’attractivité des prix des œufs, en France et en Europe, reste le principal facteur du rallongement des pontes. En août 2025, le prix à la production des œufs de consommation était supérieur de 81,6 % au prix de 2024 et de 95,0 % au prix moyen 2020-2024, selon Agreste.
Des plannings d’abattage désorganisés
L’allongement des cycles de production bouleverse la logistique des abattoirs. Les périodes de vide sanitaire sont décalées, compliquant la planification. Certains lots sont retirés à la dernière minute, ce qui entraine des manquements dans les plannings.
Des pics d’activité moins marqués
Traditionnellement, les réformes connaissaient des pics d’abattage en été, notamment sur la période de juillet à août, période de plus faible consommation d’œufs. Désormais, le phénomène se lisse sur l’année. Les vides sanitaires se décalent, notamment à cause des fortes chaleurs estivales, mais la tendance reste à la dilution saisonnière.
Une concurrence étrangère accrue
Les abattoirs étrangers, notamment en Belgique et aux Pays-Bas, captent une part croissante et importante des poules françaises, au détriment des sites français. « Ces abattoirs étrangers proposent des prix d’abattage bien plus attractifs. Leurs réglementations commerciales ne distinguent pas, à la vente, la poule du poulet, comme c’est le cas en France », explique un opérateur du secteur.
« Ces abattoirs étrangers proposent des prix d’abattage bien plus attractifs. Leurs réglementations commerciales ne distinguent pas, à la vente, la poule du poulet, comme c’est le cas en France »
L’écart de prix entre la France et ces deux pays est significatif, au point de rendre l’exportation rentable malgré les coûts de transport. Ainsi, près d’un tiers des poules de réforme françaises seraient désormais abattues hors du territoire national. Il est difficile toutefois d’en mesurer précisément le volume. « Les statistiques douanières regroupent sous le même code « Gallus vivant » les poulets de chair, les poules de reproduction et les poules de réforme, ce qui rend impossible toute distinction entre ces catégories » indique Mohammed Bouzidi, chargé d’étude à l’Itavi. Aux dires des opérateurs, ce sont surtout les poules de reproduction qui sont recherchées par nos voisins.
Une demande supérieure à l’offre en Europe
« Nous manquons de matière pour exporter », souligne le directeur de l’abattoir Volailles du Poher. Le marché africain reste particulièrement demandeur. « S’ils pouvaient en avoir davantage, ils en prendraient plus » poursuit-il. Mais la concurrence s’intensifie, notamment avec la Pologne et la Turquie qui se positionnent fortement sur ce segment, grâce à des coûts de production bien inférieurs. « Ces pays bénéficient d’une main-d’œuvre bon marché et des économies d’échelle liées à des volumes d’abattage plus élevés. En comparaison, le coût de la main-d’œuvre en France est environ deux fois plus élevé, ce qui limite la compétitivité sur le marché international » explique ce dernier.
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Les abattoirs misent sur le poulet pour maintenir leur rentabilité
Face à la flambée des coûts, notamment énergétiques, les abattoirs diversifient leur activité. « Nos factures d’électricité sont passées de 20 000 à 150 000 euros par mois depuis le début de la guerre en Ukraine », témoigne Laurex Ajavon. « Ces hausses sont difficiles à absorber sans volumes suffisants pour les compenser. »
«Les jours sans poules, nous compléterons avec des abattages de poulets de chair »
Pour préserver l’équilibre économique de son abattoir, il a préféré réorganiser ses plannings d’abattage. :« Nous comptons mieux planifier les volumes d’abattage sur trois mois à l’avance au moins. Les jours sans poules, nous compléterons avec des abattages de poulets de chair ». Une stratégie possible grâce au cycle court du poulet de 30 jours, ce qui permet d’ajuster rapidement l’activité et d’optimiser l’utilisation des installations. L’abattoir Volailles de Poher espère retrouver sa production d’avant-crise, qui se situait autour de 6 300 tonnes abattues par an, contre 4 600 tonnes en 2023.
De plus en plus d’entreprises de la filière adoptent ce modèle mixte, combinant poules de réforme et poulets de chair, pour amortir leurs coûts fixes et stabiliser leurs marges.
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