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Accord Mercosur : « c'est pire que ce que l'on pensait », s'alarme Mathilde Dupré de l’Institut Veblen

Le texte de l’accord signé par Ursula von der Leyen avec les pays du Mercosur est publié sur le site de la Commission européenne, une analyse approfondie de l’institut Veblen qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, laisse craindre le pire pour l’agriculture française.

bateau porte-conteneur dans le port du Havre
L'accord trouvé entre l'UE et le Mercosur ne permet pas de respecter les normes environnementales et européennes aux denrées agricoles importées
© Virginie Pinson

Aucune « garantie suffisante », des dispositions « extrêmement préjudiciables », une communication de la Commission « trompeuse » et un « déficit démocratique », l’institut Veblen qui promet des politiques publiques qui font avancer la transition écologique, ne cache pas sa consternation après analyse du contenu de l’accord négocié entre l’UE et le Mercosur. « C’est pire qu’on pensait » résume sa directrice Mathilde Dupré sur les réseaux.

Lire aussi : Viande bovine, volaille, sucre, maïs, ces produits qui vont souffrir de l'accord UE-Mercosur

Pas de garanties sur les normes sanitaires et environnementales

Déclenchées au XXème siècle, les négociations entre l’UE et le Mercosur avaient abouti en 2019 a un accord de principe qui a depuis fait l’objet de nouveaux pourparlers pour y intégrer une clause en lien avec l’Accord de Paris. Mais l’Institut Veblen juge cette clause insuffisante car elle ne couvre que les cas dans lesquels une partie sort de ce cadre.

Lire aussi : Accord UE Mercosur : « les mobilisations agricoles peuvent changer la donne »

De plus « sa formulation est même moins forte que celle contenu dans les accords passés avec le Royaume Uni et avec la Nouvelle Zélande ». Or si un pays sort du cadre de l’Accord de Paris, comme de l’Argentine qui a déjà établi son manque de bonne volonté, il est « politiquement peu probable » que l’ensemble de l’accord UE-Mercosur soit suspendu et une suspension partielle avec seulement le pays en question serait «  techniquement difficile à mettre en œuvre ».

Lire aussi : Le fonds de compensation du Mercosur : une provocation pour les agriculteurs européens

Du flou sur la déforestation

Les experts de Veblen jugent que l’accord est « flou et peu contraignant » sur l’arrêt de la déforestation après 2030, et pourrait même affaiblir la mise en œuvre du règlement européen contre la déforestation déjà reporté d’un an. En terme de prise en compte des droits sociaux, de la biodiversité et de la déforestation, aucune mesure contraignante n’est envisagée. 

Lire aussi : Mesures miroirs : 5 questions sur ce que l'UE peut faire sur la viande et les végétaux

Une disposition qui met à mal la mise en place de mesures miroirs

Il n’y a aucune mesure miroir dans l’accord tel que conclut par Ursula von der Leyen. Pire, pour l’Institut Veblen « certaines nouvelles dispositions - comme le mécanisme de rééquilibrage des concessions - pourraient s’avérer extrêmement préjudiciables et rendre à l’avenir très difficile l’adoption et la mise en œuvre effective de mesures miroirs au sein de l’UE, tout comme dans les pays du Mercosur ». 

« Certaines nouvelles dispositions - comme le mécanisme de rééquilibrage des concessions - pourraient s’avérer extrêmement préjudiciables »

C’est-à-dire que si l’UE applique effectivement ses mesures interdisant d’importer la viande d’animaux traités aux antibiotiques comme facteurs de croissance, celles sur la déforestation importée, et l’interdiction d’importer des produits contenants les traces de clothianidine et le thiamethoxam (deux néonicotinoïdes), « les pays du Mercosur pourraient exiger des concessions commerciales additionnelles en compensation », même si l’OMC juge ces mesures compatibles avec le droit du commerce international. Adopter de nouvelles mesures pourrait aussi devenir bien plus complexe. 

« les pays du Mercosur pourraient exiger des concessions commerciales additionnelles en compensation »

Manque de transparence de la Commission dans les négociation avec le Mercosur

Alors que les négociations se déroulent depuis 25 ans dans un contexte assez opaque, l’Institut Veblen pointe des différences entre la communication de la Commission sur son site et le contenu même de l’accord. Elle se félicite ainsi «  Les règles européennes s’appliquent à tous les produits commercialisés dans l’UE, qu’ils soient produits localement ou importés. Notre système de contrôle robuste permet de s’assurer que les règles européennes sont respectées ». Or un audit de la Commission elle-même a justement montré en octobre que l’Union européenne importe bel et bien du bœuf aux hormones du Brésil. Et quand l’UE trouve effectivement des manquements à la règle, il n’y a pas de sanctions et les mesures correctives sont souvent tardives. 

Lire aussi : Mercosur : un appel à « annoncer sans délai l’application du droit de veto de la France »

Un passage en force envisagé pour la ratification 

L’accord UE-Mercosur comprend un volet politique et un volet commercial. En tant qu’accord mixte, il doit être voté au Parlement et ratifié par chacun des États membres. La Commission affirme que la procédure de ratification n’est pas arrêtée. Mais l’Institut Veblen s’appuie sur un document publié par l’Uruguay qui mentionne déjà un accord commercial intérimaire pour alerter sur une probable décision de la Commission de séparer les deux volets de l’accord et contourner ainsi d’éventuels vétos sur la partie commerciale. Aux États d’accepter ou non ce découpage. 

Lire aussi : « La France importe déjà du Mercosur pour 1,92 milliard d’euros de produits agricoles et agroalimentaires »

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