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Transport des porcs : une nouvelle loi qui pourrait coûter 107 millions d’euros à la filière

Une possible évolution de la législation du transport ne garantira pas forcément le bien-être des porcs. C’est ce que relève l’Ifip après évaluation. Il en ressort que la filière française devra débourser d’importants coûts, ce qui la fragilisera encore plus sur le marché mondial.

transport terrestre animaux
L'Ifip dresse les principales conclusions de son évalution. Une nouvelle législation sur le transport des animaux n'est pas forcément une bonne chose en termes de bien-être animal. En revanche, la filière porcine devrait allouer des frais suppémentaires. Même chose pour les consommateurs.
© Réussir SA

L’institut du porc (Ifip) a présenté son évaluation économique sociale et environnementale de la proposition de modification de l’actuelle législation transport CE 1/2005 du 7 décembre 2023 en faveur du bien-être animal, aujourd'huià Paris. Pour Patrick Chevillon, ingénieur chef de projet à l’Ifip, qui présente les résultats de l'évaluation, au moins cinq points majeurs pourraient être néfastes pour la filière porcine française.

Lire aussi : Où sont les abattoirs menacés de fermeture en France, et pourquoi ?

1.            Un contrôle vétérinaire jugé « irréaliste »

D’après Patrick Chevillon, la nouvelle législation conduirait à « un contrôle vétérinaire irréaliste pour garantir le bien-être des porcs ». Il avance un « coût important » de la visite vétérinaire, des « frais kilométriques » ou encore « une faible motivation et un manque de vétérinaire de campagne ». L’évaluation estime en moyenne en France à 215 € une visite de nuit pour un camion plein de 180 porcs. Aujourd’hui, le système repose sur « des guides de bonnes pratiques de transportabilité à un coût limité ».

2.            Limiter à 9h vers la durée de transport vers l’abattoir

La nouvelle législation penche vers « un maximum de 9 heures de transport vers l’abattoir en France », explique Patrick Chevillon. « 4 % des porcs charcutiers sont à plus de 9 heures de transport ». Près de quatre abattoirs du Sud de la France seraient en péril à terme d’après l’évaluation de l’Ifip. Actuellement, 28 % des truies de réforme sont transportées à plus de 9 heures de transport.

Lire aussi : Transport des animaux : quelles durées maximales proposées par Bruxelles

3.            Transporter les animaux sur les plages de la journée les plus fraîches

A 25 ° C, la nouvelle législation prévoit 9 heures de transport pour les animaux d’élevage. A 30 ° C maximum, elle préconise un transport possible entre 22 heures le soir et 10 heures le matin. L’Ifip démontre que les transports d’animaux à températures limitées n’est pas toujours possible « alors que les maximums de 25 et 30 degrés sont souvent atteints ». Par ailleurs, il faudrait « plus de camions mobilisés sur une période courte de transport ». L’Institut du porc évoque un achat de 41 camions, le recrutement de 82 nouveaux chauffeurs, bien qu’il s’agisse d’un métier sous tension, et des horaires de nuit à financer. Parmi les risques modélisés, « des reports de porcs en ferme d’une semaine voire plus en période caniculaire » qui conduirait « à un déclassement des porcs sur le poids TPM et des pertes de porcs en élevage en fin d’engraissement ». L’Ifip mentionne aussi « un risque de rupture d’approvisionnement des salaisons et distributeurs de viande de porc en période chaude ».

4.            Une densité plus limitée de chargement autorisée

En porc charcutier, la surface nécessaire pourrait augmenter de 33 % ce qui nécessiterait « un investissement dans 129 camions de plus et le double de transporteur ». L’Ifip présente un bilan carbone « dégradé au kilo de porc ». « Il y aura 6 millions de km de plus à parcourir pour le secteur porcin en lien avec l’augmentation de surface », indique Patrick Chevillon.

Lire aussi : « Si on veut du porc français, il faut créer des élevages en France » 

5.            Le cas particulier des reproducteurs n’est pas pris en compte

L’Ifip émet des réserves concernant le transport des reproducteurs. Chaque année, 340 000 cochettes de renouvellement sont livrées en France. Et « 25 % d’entre elles sont transportées plus de 24 heures pour le renouvellement des élevages Français ». D’autre part, « 38 000 cochettes de haute valeur génétique sont exportées dans le monde et une part en camion sur des transports de plus de 24 heures ». L’Ifip soutient aussi « qu’il faut une législation européenne adaptée au transport des reproducteurs porcins avec le non-déchargement des animaux à des points d'arrêt qui sont très risqués au niveau sanitaire, la peste porcine africaine entre autres ».

 

D’importants coûts supplémentaires pour l’ensemble de la filière porcine

L'Institut du porc chiffre à 107 millions d'euros par an la facture de cette nouvelle législation, soit 4,50 € par porc charcutier. Il pourrait être plus important chez les principaux producteurs (Espagne, Allemagne) de porc, à 7,2 €. De quoi « fragiliser l'élevage européen par ces surcoûts à l’échelle mondiale ». Le consommateur aussi en paiera le coût. 30 centimes supplémentaires par kilo en viande frais, 50 centimes/kg en produits transformés. « Le gain en termes de bien-être animal de cette proposition reste à démontrer par manque d'études scientifiques récentes sur ce sujet », conclut l’Ifip. 

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