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L’inflation remet en cause la montée en gamme

Alors que nous entrons dans une période d’inflation structurelle, la question de la compétitivité des entreprises se pose clairement face à une descente en gamme des achats alimentaires.

© VR

Après dix années de déflation, les prix alimentaires augmentent dans les rayons et vont continuer de progresser. À la mi-avril, l’inflation était en forte augmentation pour atteindre +2,89 % à 1 an et +1,13 % à 1 mois tous circuits confondus, indique Iri. Les pâtes alimentaires (+15,31 %), les viandes surgelées (+11,34 %), les farines (+10,93 %) et les huiles (+9,98 %) voient leurs prix s’envoler. Un pourcentage minime de catégories (2 %) reste en déflation malgré tout. Le jambon cuit et épaule avec sa baisse de 1,32 % reste une exception. Les hausses signées pendant la période des négociations commerciales se font désormais sentir dans les linéaires. Et cela va se poursuivre.

Au moins quatre vagues d’inflation successives

Iri table déjà sur une inflation à +5 % au début de l’été, quand l’effet de la révision des contrats commencera à être perceptible. Une révision d’ailleurs bien trop lente aux yeux des industriels qui auraient déjà souhaité obtenir au 1er mars des hausses tarifaires supérieures. À cette période, l’inflation sur les coûts de l’énergie, du transport, sur certaines matières premières était déjà perceptible. Et la guerre en Ukraine est venue ajouter un peu plus de dérèglement sur les marchés agricoles et ceux des autres intrants. Selon Philippe Goetzmann, consultant en grande consommation, « on va vivre quatre vagues d’inflation : la première est liée au dérèglement des marchés en raison de la crise sanitaire, la deuxième vient de la fin des négociations commerciales et la sanctuarisation de la matière première agricole. Nous y sommes. Les deux suivantes seront, d’une part, liées à la guerre en Ukraine, dont on ne voit pas encore les effets en rayon et, d’autre part, liée à une inflation généralisée, avec une hausse des salaires, du Smic au 1er mai, du point d’indice de fonctionnaires. C’est un phénomène inflationniste général auquel il faut se préparer ». La Banque mondiale estime que cette situation va durer jusqu’en 2024, dans son rapport sur les perspectives des marchés des produits de base publié le 26 avril.

« Ce sont les aliments de base qui sont inflationnistes, les arbitrages vont plutôt se faire vers les autres catégories moins essentielles »,
Emily Mayer, directrice Business Insight à Iri

L’effet sur la consommation

Les arbitrages des consommateurs commencent déjà à se faire sentir. « L’inflation aboutit à la descente en gamme, avec une attention plus marquée au prix et au gaspillage alimentaire, estime Philippe Goetzmann, mais l’arbitrage pourrait aussi se faire en faveur de l’alimentaire au détriment d’autres consommations, comme la restauration ou la livraison à domicile. » Le dernier épisode brutal d’inflation date de 2008. « À l’époque, les volumes ont baissé de 2 % alors que le marché n’y était pas habitué, les marques de distributeurs étaient en croissance et le hard-discount, comme on l’appelait, a explosé, se souvient Emily Mayer, directrice business Insight à Iri. Aujourd’hui, la situation est différente. Ce sont les aliments de base qui sont inflationnistes, les arbitrages vont plutôt se faire vers les autres catégories moins essentielles comme les plats préparés ou la confiserie. Les premiers prix sont dynamiques. On anticipe une descente en gamme très forte. »

Des hausses insuffisantes pour les industriels

Si pour les consommateurs les prix s’envolent, pour les industriels, cela ne va pas assez vite face à des coûts de production qui explosent. Ailleurs en Europe, l’inflation alimentaire court plus vite. Elle a atteint plus de 7 % en Allemagne, un record depuis plus de trente ans, +6,7 % en mars par rapport au même mois 2021 en Italie, selon l’Institut national de la statistique (Istat). « En Allemagne, cela monte aussi vite que cela baisse. Leur système est complètement différent de celui de la France qui est l’un des plus complexes et l’un des plus insatisfaisants au monde », selon Philippe Goetzmann.

Pour les industriels français, « il y a urgence » à répercuter les coûts, martèle l’ensemble des fédérations agroalimentaires. Dans un baromètre réalisé en avril auprès de ses adhérents, l’Adepale constate l’inquiétude grandissante des dirigeants. « 80 % de nos adhérents subissent des difficultés d’approvisionnement sur les matières premières agricoles comme les intrants industriels, nous expliquait Christian Divin, directeur général de l’Adepale à la fin avril, selon notre baromètre interne réalisé en avril, un tiers de nos adhérents se disent inquiets ou très inquiets, ils étaient seulement 2 % en novembre 2020. C’est une vraie problématique pour nos PME et TPE ». La signature de la charte d’engagements aurait dû permettre de faire bouger les lignes plus vite, mais force est de constater que la révision des contrats est très poussive.

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