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Interfilières
Ferme France veut créer une norme commune de la performance sociétale

Maximilien Rouer, directeur du développement et porte-parole de l'association Ferme France, explique ce qui se cache derrière le nom de cette démarche collective. Objectif : améliorer la performance sociétale des acteurs de la chaîne alimentaire afin de valoriser les productions françaises. Explications.

Les Marchés Hebdo : Pouvez-vous nous présenter la démarche Ferme France ?

Maximilien Rouer : Ferme France est une initiative originale dont l’objectif est de lutter contre la déflation. Notre ambition est de définir une langue commune de la performance sociétale pour que le consommateur puisse comparer les produits. Si on s’appuie sur les sondages, ces derniers mettent en lumière le ras-le-bol des consommateurs sur la multiplication des labels, des claims (promesses publicitaires, ndlr). Il y a toujours plus de mots. Ferme France est une démarche collective interfilières ouverte pour faire des performances sociétales le levier de différenciation et de valorisation de la ferme France, en France et à l’étranger.

LMH : Qui est à l’initiative de la création de cette association ?

M. R. : François Attali (ex-Sodiaal, ex-Terrena, ndlr) est le président de l’association. Les groupes fondateurs sont Terrena, Sodebo et Fleury Michon. Le groupe Advitam vient de nous rejoindre en tant que membre fondateur. Nous devrions avoir deux autres groupes d’ici au lancement officiel au Salon international de l’agriculture fin février. En parallèle, nous avons des membres adhérents, tels que Système U qui s’est déjà engagé financièrement pour l’année 2018. Nous demandons une adhésion de 233 000 euros aux fondateurs et de 50 000 euros pour nos adhérents « simples ». La démarche sera officiellement lancée à l’occasion du Salon de l’agriculture, où nous allons occuper un stand de 200 m2, afin de trouver de nouveaux partenaires.

LMH : Concrètement, à quoi va ressembler cet indicateur de performance sociétale ?

M. R. : Il va s’agir de créer et de promouvoir un étiquetage d’évaluation de la qualité sociétale globale des produits issus de la production agricole, basé sur des critères objectivables reconnus par tous, permettant aux acteurs des filières d’améliorer progressivement et continuellement leurs performances sociétale et économique et se différencier. Il va falloir créer une étiquette de performance sociétale mettant en avant un chiffre de 1 à 6. Cet indice sera calculé grâce à un algorithme qui prendra en compte différents critères comme la traçabilité, la nutrition, les pesticides, l’environnement, la biodiversité et le bien-être animal. Nous cherchons à installer, à définir une norme de performance sociétale à la manière des normes NF appliquées à la performance énergétique. Cela n’existe pas. Cette étiquette « sociétale » est à inventer.

Nous cherchons à installer une norme de performance sociétale

LMH : Vous ajoutez donc une norme aux normes ?

M. R. : On ne change rien sur le fond. Tout est construit pour intégrer l’existant. On définit une langue commune, qui va permettre de positionner, de comparer les produits les uns aux autres. Au sein de la Fnab, il y a par exemple des débats pour savoir s’il faut pousser plus loin la réglementation. Notre norme de performance sociétale permettra de savoir si un produit bio est mieux disant qu’un autre sur un ou plusieurs critères, par exemple. Ferme France sera un facilitateur afin que les entreprises puissent aussi mieux se segmenter. Et grâce au digital, le consommateur pourra avoir accès aux différents critères qui ont amené à calculer sa note inscrite sur le produit.

LMH : Le terme « ferme France » apparaîtra-t-il sur l’étiquette ?

M. R. : Non. Nous sommes en train de déposer une marque auprès de l’Inpi, mais pour le moment, nous n’avons pas l’autorisation de divulguer le nom. Il devrait être dévoilé à l’occasion du Salon de l’agriculture. L’idée est de trouver un peu comme les miles de la SNCF, un nom d’unité qui permettra de comptabiliser la performance sociétale. Il fallait trouver un terme accessible et significatif.

LMH : Comment allez-vous récupérer les données pour créer les référentiels ?

M. R. : L’idée est de fédérer les collectifs des parties prenantes pour construire ces référentiels. On sera dans la coconstruction. Il s’agit de défendre les marchés, et non pas seulement les filières. C’est bien une démarche interfilières. Nous voulons diffuser les meilleures pratiques. Cela va passer par la construction d’un outil commun, pour intégrer les solutions existantes. Nous avons par exemple le soutien de l’Ademe pour l’étiquetage environnemental, de l’Inra, Bleu-Blanc-Cœur, GS1 ou encore d’Ouest Territoires d’élevage. Ferme France est un intégrateur, un catalyseur d’initiatives.

LMH : Des entreprises, des filières sont-elles déjà intéressées par cette démarche ?

M. R. : Nous espérons, dès 2019, commencer par trois filières avec un étiquetage basé pour le moment sur trois critères. Nous sommes davantage avancés sur le bien-être animal, la traçabilité et la nutrition, grâce au Nutri-Score. C’est un projet à 10 ans. À cet horizon, nous espérons que 100 % des produits auront une étiquette de performance sociétale.

LMH : Les référentiels, sur lesquels vous vous basez aujourd’hui, vont forcément évoluer. Comment allez-vous gérer cela ?

M. R. : Nous allons définir des plans de progrès sociétaux, en coconstruction avec les acteurs et les filières. Ces plans prendront en compte toutes les étapes qui constituent la chaîne de valeur. Ils seront établis sur une échelle à 6 points permettant à chaque acteur de prioriser ses engagements, se différencier et d’organiser l’amélioration progressive de sa performance sociétale.

LMH : Outre les montants d’adhésion, comment souhaitez-vous financer tous ces projets ?

M. R. : C’est la dernière roue du carrosse. Nous avons l’ambition de compter dans le paysage avec des ordres de grandeur qui inspirent le monde économique. Les exploitations seraient les premières bénéficiaires, car ce sont elles qui sont le plus en difficultés. Depuis 20 ans, sont apparus des géants de l’agroalimentaire (Ukraine, Brésil, Chine, etc.) qui, en développant les volumes, ont tiré les prix vers le bas. Nous sommes allés vers une « commoditisation » des prix agricoles, c’est-à-dire vers des prix toujours plus bas. Mais cela ne colle pas sur des produits français. Nous voulons accompagner la montée en gamme poursuivie dans les plans de filière. Il nous faut les capacités financières pour cela.

« Ferme France sera l’un des outils de la montée en gamme des plans de filière »

LMH : Avez-vous le soutien des pouvoirs publics ?

M. R. : Depuis un an, nous avons bon nombre d’acteurs de l’agroalimentaire, les interprofessions, les grands groupes, les ONG, les syndicats, les distributeurs, les instituts techniques, les vétérinaires, etc. J’ai eu au moins 300 entretiens en une année. Et nous avons aussi été sollicités par l’Élysée et Matignon, notamment dans le cadre des états généraux de l’alimentation. Ferme France sera l’un des outils de la montée en gamme dans les cinq ans à venir des plans de filière. Nous allons permettre d’objectiver cette montée en gamme, grâce à un outil collectif interfilières intégrant toutes les parties prenantes.

Valoriser les productions et savoir-faire français

À performance sociétale équivalente, les produits d’origine France seront mieux notés. Si l’association n’a pas pour objet la valorisation en soi de l’origine française des produits, il y aura néanmoins un critère sociétal « parcours français » à 6 niveaux. L’échelle reste à définir en cohérence avec les signes de qualité et labels existants et valorisant déjà l’origine France. Ce « parcours français » permettra d’identifier et de valoriser le taux de production française de chaque produit étiqueté et de valoriser l’augmentation de ce taux. Ce critère sera comme les autres inclus dans le score global de l’étiquetage émis par Ferme France. Il permettra également une valorisation internationale de produits sous l’égide d’entreprises françaises. L’un des objectifs de Ferme France est aussi de promouvoir le modèle de production agroalimentaire français dans le monde.

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