De la dialectique à la politique
Pas de doute, l’arme d’Emmanuel Macron est son sens de la dialectique. Et il l’a encore prouvé la veille de l’ouverture du Salon de l’agriculture devant de jeunes agriculteurs invités à l’Élysée. Alors que la colère monte dans les campagnes, le chef de l’État a abordé tous les sujets qui fâchent en expliquant avec habileté ses décisions et les nouvelles orientations rendues nécessaires par les erreurs commises dans le passé. À travers un discours franc et direct, le président de la République a aussi tenu à mettre les producteurs face à leurs contradictions. L’accord Mercosur-UE ? « Il faut qu’on soit cohérent, on ne peut pas tous les jours venir me dire “ouvrez des marchés, aidez-nous à exporter” mais quand ça nous arrange ». Le glyphosate ? « On sait que ça n’est bon pour personne et à commencer par les exploitants agricoles ». Le dossier de l’ICHN ? « Depuis 2013, on sait très bien que notre carte ne marche pas ! 115 cartes ont été changées. Au final, il y a 1 380 communes qui sortiront et il y a 4 900 communes qui entrent et plus de moyens alloués à l’ICHN ». Sans les nommer directement, Emmanuel Macron n’a aussi pas hésité à viser ceux qui « travaillent dans les actes à maintenir le statu quo », statu quo qui, selon lui, tue lentement l’agriculture. « Le problème de la filière bovine, c’est de ne pas avoir su se structurer, c’est le manque de confiance entre les éleveurs qui a abouti à laisser un acteur dominant sur le marché qui tient tout le système et qui fait tous les votes des fédérations », a-t-il lâché. Il n’y a pas que les oreilles de Jean-Paul Bigard qui ont dû siffler. Michel-Édouard Leclerc était aussi ciblé dans cette diatribe du président : « ceux qui disent qu’on peut toujours proposer moins cher, que les choses n’ont pas en fait de vraie valeur, qu’on peut vendre à quasi rien des produits qui ont pris des mois à sortir de terre, […] ils mentent aux gens ». Mais si Emmanuel Macron se montre incisif et brillant dans ses discours, il sera bientôt jugé sur ses actes, avec la mise en œuvre de la loi Alimentation, de son plan d’investissement de 5 milliards d’euros et des orientations qu’il souhaite défendre dans la future Pac. Après la parole, l’urgence est à l’action.