Comment la LME affecte les filières
Un rapport au ministère de l’Économie de décembre 2016 mesure l’effet de la LME sur les prix. Il fait apparaître le pouvoir de discrimination à l’égard des distributeurs comme responsable de la baisse des prix des marques nationales. Et recommande la vigilance face aux regroupements de centrales d’achats.
En décembre dernier, une évaluation des effets de la LME (loi de Modernisation de l’économie) et des stratégies d’alliances à l’achat des distributeurs a été finalisée. Le rapport répondait à une lettre de mission adressée début 2016 par Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, à trois économistes de l’Inra et du Crest (CNRS et École polytechnique) ayant déjà travaillé sur les relations entre distributeurs et fournisseurs. Le ministre demandait à mesurer les effets économiques de la LME promulguée en 2008. Il demandait en outre à expertiser les alliances entre distributeurs et le développement des marques de distributeurs (MDD). La LME autorise le fournisseur à appliquer des conditions différenciées à ses clients et à n’informer de ses conditions de vente que les clients destinataires. Ce retour à la « discrimination » entre les acheteurs est au cœur de l’analyse rendue. Les chercheurs démontrent un mécanisme « engendrant une baisse marquée des prix de gros unitaires des produits vendus par un fournisseur à plusieurs distributeurs, typiquement les produits de marque nationale ».
Les marques nationales visiblement affectées
Plusieurs graphiques du rapport montrent que les produits de marque nationale de différentes familles de produits ont évolué à la baisse de prix après l’entrée en vigueur de la LME. Leurs données sont celles de Kantar Worldpanel de janvier 2006 à janvier 2011, dont n’ont été retenus que la petite minorité des produits continuellement en rayons au long de cette période. Dans le cas de la crémerie (graphique ci-dessous) les premiers prix sont les seuls à avoir augmenté depuis 2006.
La responsabilité de la LME mesurée
Cependant plusieurs facteurs interviennent dans les évolutions de prix. La difficulté était de déterminer, à travers les évolutions de prix, celles causées par la « négociabilité des tarifs » introduite par la LME. La différence de comportement des marques nationales et de distributeurs a aidé à faire le tri. C’est ainsi que les économistes ont mis en évidence l’effet global de la LME sur les prix des produits alimentaires : une baisse de 2,33 % des marques nationales par rapport aux prix des MDD. Ils ont aussi mesuré l’effet de la LME par familles de produits. Ainsi, sont mises en évidence des baisses sensibles des marques nationales qui sont imputables à la LME. C’est le cas dans le riz (-12 %), les chips (-9 %), ainsi que les légumes secs (-5 %), confitures, chocolats, compotes, conserves (-4,5 %), viandes de porc fraîches (-5 %) et dans d’autres familles de produits.
La partie du rapport sur l’évolution structurelle de la distribution est la plus engagée du rapport. Elle recommande d’exclure les PME du périmètre de négociation des centrales d’achat, de redéfinir la dépendance économique afin de faciliter l’application de sanctions en cas d’abus. Enfin, il est indiqué que les groupements favorisent les échanges d’information entre membres, limitant ainsi le pouvoir discriminant des fournisseurs introduit par la LME.