Taxes antidumping sur le porc : « cette décision de Pékin, c’est une attaque de toute l’Europe »
Le commerce du porc européen est déstabilisé depuis l’officialisation des premières mesures liées à l’enquête antidumping menée par la Chine. La filière redoute désormais un impact direct sur le cours du porc et sur la compétitivité des entreprises.
Le commerce du porc européen est déstabilisé depuis l’officialisation des premières mesures liées à l’enquête antidumping menée par la Chine. La filière redoute désormais un impact direct sur le cours du porc et sur la compétitivité des entreprises.

L’annonce vendredi 5 septembre 2025 du ministère du commerce chinois, MOFCOM, de l’imposition de droits antidumping dans le cadre de l’enquête sur les expéditions de produits porcins européens a suscité de vives inquiétudes dans la filière.
« Cette décision fragilise la compétitivité de la filière porcine européenne »
Pour Culture Viande « Cette décision fragilise la compétitivité de la filière porcine européenne et crée une incertitude majeure pour les entreprises d’abattage, de découpe et de transformation. Elle menace directement l’équilibre économique de la filière ».
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La filière porc européenne mise sous tension par Pékin
Interrogée par Les Marchés, Anne Richard, directrice d'Inaporc, explique: « Cette enquête antidumping a démarré depuis 2024, et durant la procédure, trois entreprises basées aux Pays-Bas, au Danemark et en Espagne ont été retenues dans le cadre d’un échantillonnage. Ces dernières ont été inspectées cet été par les autorités chinoises ».
Aux dernières nouvelles, ce 5 septembre, ces trois entreprises se sont vues attribuées des taux spécifiques : l’espagnol Litera Meat sera désormais taxé à 15,6 %, le danois Danish Crown à 31,3 %, et le néerlandais Vion Boxtel à 32,7 %.
« Pour toutes les autres entreprises européennes, une taxation de 20 % sera imposée à partir du 10 septembre »
« Pour toutes les autres entreprises européennes, inscrites dans la procédure, dont celles basées en France, une taxation de 20 % sera imposée à partir du 10 septembre et ce jusqu’à la décision finale en décembre 2025. » Les entreprises européennes qui n’ont pas coopéré durant l’enquête seront soumises à un taux de 62,4 %.
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La Chine, le premier marché du porc français
En 2024, la France a exporté 115 000 tonnes de produits porcins, essentiellement composés d’abats, vers la Chine, pour environ 240 millions d’euros. Sur les six premiers mois de 2025, les exportations ont atteint 63 630 tonnes, selon la Commission européenne.
« il n’y a pas de pratique de dumping vers la Chine»
Alors que la filière française espérait ne pas se voir taxer au même titre que le cognac, qui faisait aussi l’objet d’une enquête antidumping, ce verdict choque la profession française. Anne Richard indique qu’« il n’y a pas de pratique de dumping vers la Chine car les exportations françaises ne concurrencent pas la production locale, mais elles la complètent », étant donné que la demande d’abats reste soutenue dans le pays.
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Du côté du ministère de l’Agriculture, les réactions se veulent rassurantes. « C'est un dossier que la France suit de très près avec l'UE. Pour nous, il n'y a pas de dumping. Nous poursuivons les discussions avec les autorités chinoises. Il est important de rappeler que ces mesures sont provisoires ».
« Il est important de rappeler que ces mesures sont provisoires »
Quelles issues françaises et européennes face à Pékin ?
« Nous sommes mobilisés pour vérifier que toutes les entreprises sont enregistrées correctement auprès des autorités douanières chinoises, et travaillons pour que cette situation soit la moins impactante possible pour la filière porcine» nous précise Anne Richard. Cette dernière insiste : « l’interprofession s’est mobilisée pour réunir un ensemble d’éléments pour pouvoir faire une contestation auprès du MOFCOM, pour voir tout ce qui peut être amélioré. »
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De même elle indique que :« des négociations seront lancées au niveau européen très prochainement, car cette décision de Pékin, c’est une attaque de toute l’Europe, Il va y avoir des actions à l’échelle européenne ». Bruxelles pourrait tenter d’obtenir, comme pour le cognac récemment, une négociation permettant aux entreprises de traiter directement avec Pékin.
« l’interprofession s’est mobilisée pour pouvoir faire une contestation auprès du MOFCOM »
Un effet boomerang redouté
En cas de reflux des volumes vers l’Europe, les professionnels craignent une pression baissière sur les prix. « Les abattoirs comme les acheteurs vont être embêtés. Si la Chine se ferme, cela risque d’entraîner un effet boomerang sur le marché européen ».
« Les abattoirs comme les acheteurs vont être embêtés »
Une redirection d’une partie des flux européens reste une possibilité non négligeable, étant donné la forte perte de compétitivité qu’engendrerait une permanence des nouveaux taux instaurés par Pékin.
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