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Palmarès
[Agroalimentaire] Les personnalités qui ont fait l’année 2019

La réaction des Marchés Hebdo a retenu vingt et une personnalités ayant marqué 2019 par leurs actions, leur stratégie ou leur combat dans le secteur agroalimentaire. L’une d’entre elles mérite, selon nous, le titre de personnalité de l’année : Loïc Hénaff, président-directeur général de Jean Hénaff.

Pour la quatrième fois, la rédaction des Marchés Hebdo débute l’année avec sa sélection des personnalités qui ont, selon elle, marqué l’année 2019 dans le secteur agroalimentaire. Après avoir fait défiler les dossiers et articles de l’année, chaque journaliste a identifié les opérateurs, professionnels, élus et influenceurs qui se sont distingués. Et après discussion en ont sélectionné vingt et une. En tête de palmarès, par sa capacité à réagir face aux attaques de L214 et à réorienter la stratégie de cette pépite bretonne pour se « désensibiliser au prix du porc », Loïc Hénaff, président du directoire de Jean Hénaff, a remporté nos suffrages. Si les coups portés par l’ONG ont été durs à encaisser, le dirigeant a su montrer qu’une PME pouvait se mobiliser et agir concrètement à l’échelle de son territoire. Un exemple à suivre pour beaucoup d’industriels du secteur. Dans sa Région Rhône-Alpes Auvergne, Jean-Philippe Lefrançois, directeur général d’Alpina Savoie, a lui aussi marqué les esprits par ses relations pérennes avec l’agriculture locale. Côté grande distribution, l’engagement d’Intermarché sur plusieurs plans, porté par Thierry Cotillard, vaut la peine d’être souligné.

Des stratégies ambitieuses

D’autres personnalités du secteur se sont à nos yeux illustrées par leur caractère offensif et conquérant sur le marché français mais aussi international. Et ont démontré que malgré une perte de vitesse de l’agroalimentaire français, il y a encore une place pour des stratégies ambitieuses. Confer les investissements massifs de Louis Le Duff pour Bridor en France et en Amérique du Nord, l’acquisition des activités malt de Cargill par Axéréal, présidé par Jean-François Loiseau, l’ascension de Biscuit International en Europe sous l’impulsion de son président-directeur général, Giampaolo Schiratti, l’appétit du trio d’Atom Food pour l’aventure entrepreneuriale ou encore la capacité de rebond des Maîtres laitiers du Cotentin, dirigés par Jean-François Fortin, après leurs mésaventures chinoises.

Start-up et attentes sociétales

Encore plus que les années passées, 2019 a marqué un renforcement de l’expression des attentes sociétales en matière de transparence, d’alimentation durable, de nutrition santé mais aussi du bien-être des animaux. Et à ce titre, certaines voix sont ressorties du lot, selon nous. Jocelyne Porcher, directrice de recherche à l’Inra, s’est illustrée par son ouvrage passionnant Cause animale, cause du capital. Controversé dans l’industrie agroalimentaire, Serge Hercberg, nutritionniste et épidémiologiste, n'en mérite pas moins une mention spéciale pour avoir réussi à imposer son Nutri-Score en France et dans plusieurs pays d’Europe.

La bulle de la foodtech n’a pas éclaté. Au contraire, l’an dernier, plusieurs start-up ont connu un succès notable en répondant aux problématiques sociétales. C’est le cas de Poulehouse, cofondé par Fabien Sauleman ; Too good to go, lancé par Lucie Basch, du constructeur de blockchains Connecting Food, créé par Maxine Volper et Stefano Volpi ou encore d’Ynsect et sa levée de 110 millions d’euros.

La personnalité de l’année

Loïc Hénaff, adepte du progrès continu

En présentant son programme Be good 2030, le président du directoire de Jean Hénaff a montré cette année qu’il avait su réagir aux attaques cruelles de L214 en inscrivant la PME dans une démarche de progrès continu.

Une « avalanche de prix »tombe sur la société Jean Hénaff depuis quelques mois, s’amuse Loïc Hénaff, président du directoire de la PME familiale, lauréate du prix de l’usine alimentaire durable 2019 attribué par Process Alimentaire, ou encore victoire de l’entreprise ambassadrice de Bretagne attribuée par Le Télégramme. Plus confidentiel, l’entreprise bretonne a aussi reçu un trophée Crisalide numérique pour le système de contrôle d’étourdissement proposé par Neotec-Vision et testé dans l’entreprise. « Nous sommes bêtatesteurs du projet qui utilise l’intelligence artificielle. L’idée : capter par vidéo les mouvements de l’œil après étourdissement et ainsi garantir à 100 % le bon geste », se félicite Loïc Hénaff. Si le patron a aujourd’hui le sourire et apprécie ces récompenses, il avoue avoir traversé une période très difficile et considère que 2019 a représenté « un rebond »pour l’entreprise.

 

« Il y a deux ans et demi les attaques de L214 ont été très cruelles, très dures à vivre », confie-t-il. L’ONG avait alors diffusé une vidéo tournée dans un élevage de porcs fournissant la marque. Alors que le fabricant du célèbre pâté breton travaille déjà sur un nouveau projet stratégique, cet évènement traumatisant pour le patron et les salariés du groupe « nous a obligés à prendre des décisions plus rapides », souligne Loïc Hénaff. Comme celle de réduire le nombre d’éleveurs fournisseurs à quatorze éleveurs en leur imposant une démarche de progrès à travers son programme Be good 2030. Une initiative saluée par L214, elle-même !

 

Désensibilisation au prix du porc

 

L’année 2019 n’a pas été de tout repos pour Jean Hénaff qui a dû faire face à l’envolée du prix du porc et ses conséquences de plusieurs millions d’euros pour l’entreprise. « On a réussi à augmenter nos tarifs grâce au travail intelligent réalisé avec Inaporc, la Fict et les clients dont Intermarché », souligne le dirigeant. Pour autant, cet épisode conforte l’industriel breton dans sa stratégie de diversification, avec le rachat en 2017 de Globe Export puis de Kervern en 2018, ayant pour but une « désensibilisation au prix du porc ». La PME apprend à intégrer ces deux entreprises : « c’est tout nouveau pour nous d’être un petit groupe de PME », confie Loïc Hénaff.

 

En parallèle, Jean Hénaff s’inscrit dans une démarche continue de progrès, à travers un partenariat avec Bretagne Vivante (création d’un atlas de la biodiversité sur son site industriel de 65 000 m2), et des engagements dans l’Iso 26000 ou encore la labellisation Lucie, que Loïc Hénaff compte promouvoir au sein du réseau Produit en Bretagne qu’il préside.

 

Mention spéciale

 

Serge Hercberg, père du célèbre Nutri-Score

Serge Hercberg, nutritionniste et épidémiologiste, s’est largement illustré avec ses équipes de recherche en faveur du « mieux manger ». Investi depuis les années 1980 dans la nutrition et président du programme national nutrition santé jusqu’en 2017, ses travaux commencés en 2011 ont permis la création du Nutri-Score, un outil simple permettant de comparer la qualité nutritionnelle des produits alimentaires. « Le Nutri-Score a accouché dans la douleur. Il a fallu quatre ans de lutte et de discussions entre la proposition, en 2014, et l’adoption de la mesure par le gouvernement », commente Serge Hercberg. Après avoir séduit les consommateurs et plus de 230 entreprises en France, dont Danone et Nestlé cette année, le Nutri-Score débarque dans la restauration collective. Elior, leader sur le marché français, a annoncé mi-décembre prévoir sa généralisation dans un grand nombre de ses restaurants. Le Nutri-Score poursuit son chemin et s’étend en Europe avec une adoption par les Pays-Bas le 28 novembre 2019 qui rejoignent la France, la Belgique, l’Allemagne, la Suisse et l’Espagne. Si Serge Hercberg a cette année décidé de laisser sa place au sein de son équipe de recherche, il n’en reste pas moins investi dans son combat et milite pour le rendre obligatoire. En ce sens, une pétition a été lancée le 30 avril par sept associations de consommateurs pour rendre obligatoire le Nutri-Score à l’échelle européenne. Le Nutri-Score séduit aussi à l’étranger où des pays comme le Maroc, le Canada ou l’Argentine sont très intéressés.

 

Thierry Cotillard, distributeur engagé

À la tête d’Intermarché depuis quatre ans, Thierry Cotillard a poursuivi cette année l’engagement du groupe pour « mieux manger, mieux produire et mieux agir ». Le distributeur a entrepris une profonde modification de son offre et s’attelle à la révision de 900 recettes pour améliorer la qualité nutritionnelle de ses produits. Premier acteur de la grande distribution à commercialiser des pains issus de farines HVE, le groupe ambitionne de commercialiser 100 % de sa production en HVE à l’horizon 2025. Intermarché a aussi étendu plusieurs gammes qui se veulent engagées : « les agriculteurs vous disent merci ! », l’Essentiel et des produits « Zéro résidu de pesticides ». L’enseigne s’est aussi mobilisé auprès des acteurs agroalimentaires en promettant de ne demander aucune baisse aux PME lors des négociations commerciales de 2020 et en se montrant solidaires des filières. Intermarché a ainsi soutenu les prix de la viande de porc dans un marché fragilisé et a conclu un accord avec Bel pour des prix rémunérateurs pour les agriculteurs et pour des primes pour les acteurs engagés dans la transition écologique.

 

Constructeurs de blockchains alimentaires

Maxine Roper et Stefano Volpi ont fondé à parts égales Connecting Food à la fin 2016. « Le marché de la blockchain était balbutiant », relate Stefano Volpi, chargé du développement technologique et des finances. 2019 marque un autre point de départ. Avec Maxine Roper, chargée du développement commercial et des ressources humaines, ils ont senti « un vrai intérêt des producteurs, des marques et des distributeurs »avec « une forte accélération au second semestre ». Ingredia, Terres du Sud, le distributeur Coop Italia s’en sont remis à Connecting Food, qui a lancé plusieurs autres projets et prévoit quelques annonces au salon de l’agriculture 2020. Hors de France, Connecting Food est aux affaires en Italie, en Allemagne, en Espagne, aux États-Unis. « Nous sommes un des acteurs reconnus au niveau mondial pour sa grande compétence en alimentaire associée à sa compétence technologique », affirme Stefano Volpi. Maxine Roper fait croître l’effectif, qui sera à la mi-janvier de 24 personnes de toutes tranches d’âges. Alors que la parité homme-femme est quasiment atteinte, ils aimeraient féminiser davantage la partie technologique.

 

Marjolaine Cevoz-Goyat, tête pensante du quarantenaire Celnat

Présidente et directrice générale de Celnat depuis 2016 et le rachat de la société par le groupe espagnol Ebro Foods, Marjolaine Cevoz-Goyat insuffle une dynamique au spécialiste français de la meunerie, minoterie, et de la fabrication de produits végétaux bios, qui a soufflé ses quarante bougies en 2019. Celnat a étendu ses ventes au-delà des circuits bios avec des arrivées en GMS et en restauration. La société s’exporte aussi de plus en plus, surtout en Espagne grâce au réseau d’Ebro Foods, où les produits de la marque sont distribués par Vegetalia. En 2019, Celnat a changé de main, passant d’Ebro Foods au groupe suédois Midsona AB, l’un des leaders d’Europe du Nord de l’alimentation biologique, et qui permettra à la société de poursuivre son développement en lui ouvrant les portes du marché nord-européen. Cette occasion s’ajoute à celles du Moyen-Orient et de l’Asie, des zones friandes du marché de l’avoine suivies de près par la société et sa présidente. Celnat a bouclé son année 2019 avec un chiffre d’affaires qui s’élève à 25 millions d’euros, contre 23 millions d’euros l’an passé.

 

 

 

 

 

Avec Fabien Sauleman, Poulehouse prend son envol

L'année 2019 a vu l’ascension de la start-up Poulehouse, créée en 2017 par Fabien Sauleman, Élodie Pellegrain et Sébastien Neusch et qui commercialise des œufs issus de poules de réforme. L’année avait commencé sur les chapeaux de roues pour elle, avec une levée de fonds de 1 million d’euros auprès de Jaina Capital et d’Orefi. La start-up s’est ensuite associée en avril avec la société allemande Seleggt, développeur d’une technique de prédiction du sexe de l’embryon dans l’œuf. En avril, elle a signé un partenariat avec le distributeur Carrefour pour décliner sa production issue de cette technologie en conventionnel, pourtant jusque-là exclusivement bio. Poulehouse a de nouveau levé en novembre 3,5 millions d’euros auprès d’acteurs bancaires et de Miimosa, lui permettant de signer un nouvel accord avec One-Cocorette et de financer une campagne de publicité diffusée sur les chaînes du groupe TF1. Et de conclure 2019 en se diversifiant, avec la commercialisation d’un fondant au chocolat à la marque Franprix élaboré à partir d’œufs de la start-up. Poulehouse a bouclé l'année avec un chiffre d’affaires de 3 millions d’euros, et ambitionne de passer à 15-20 millions pour 2020.

 

Hervé Morin, made in Normandie

« Cet été, en faisant mes courses dans un super, j’étais ravi de voir un rayon balisé pour les produits normands, mais j’y ai trouvé des produits bretons ! J’ai immédiatement appelé le directeur du magasin ! », racontait récemment le président de la Région Normandie devant un parterre d’acheteurs de Carrefour. Hervé Morin, ancien ministre de la Défense, est président du conseil régional de la Normandie depuis 2016. Ardent défenseur de la Région, il souhaite que les Normands « soient aussi fiers que les Bretons » et mise notamment sur la promotion du terroir et du savoir-faire des entreprises locales. Il soutient avec vigueur le projet de la nouvelle AOP Camembert qui garantit un nombre de vaches normandes minimal dans le cheptel et au moins six mois de pâturage : « la Normandie redeviendra digne des cartes postales, avec des vaches normandes sous les pommiers ». Infatigable, le Normand convaincu dialogue avec les entreprises locales et a annoncé la couleur de son prochain chantier : rattraper le retard pris par la Normandie sur le bio, notamment si l’on compare… avec la Bretagne !

 

Lucie Basch, ambassadrice de la lutte contre le gaspillage alimentaire

Fondatrice de l’application Too good to go qui valorise en BtoC les invendus alimentaires, Lucie Basch s’impose dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Lancée en 2016, l’application est déjà présente dans quatorze pays européens et compte 26 millions de repas sauvés à son actif, avec la barre des 10 millions franchie cette année en France ! À seulement 27 ans, la jeune femme s’est illustrée dans les discussions à l’Assemblée nationale sur le gaspillage alimentaire et par un travail d’éducation et de sensibilisation à travers les médias. Après avoir été nommée « Femme d’influence » et « Femme digitale » du prix Margaret en 2018, Lucie Basch a intégré le palmarès LSA des cinquante femmes qui comptent dans la vente au détail et le commerce électronique, puis le bureau de France Digitale en 2019. Cette même année fut marquée par la publication de son guide de conseils « anti-gaspi » et par la production d’un premier livre blanc sur les dates de péremptions à destination des entreprises et des pouvoirs publics. Lucie Basch prévoit un développement international, hors Europe, et une orientation vers l’évènementiel.

 

Franck Sander, battant de l’année

À peine arrivé à la présidence de la Confédération des planteurs de betteraves (CGB), Franck Sander est entré dans la tourmente. Saint Louis annonça la fermeture de deux sucreries. Quelques mois plus tard, c’était au tour de Cristal Union.« Le secteur est sorti des quotas, il est en crise. La solution la plus simple serait d’accepter. Nous nous battons au quotidien pour maintenir des sucreries », déclare le jeune président au nom des « équipes de la CGB », comme il dit, elles aussi assez rajeunies.« Nous avons porté un message : il existe un marché français, un marché européen, et un potentiel à l’export, qu’il faut aller chercher quand il est rentable », exprime-t-il. Franck Sander est absolument convaincu de la force d’une filière qui maîtriserait ses outils et stabiliserait les revenus des planteurs, grâce à un nouveau plan de compétitivité interprofessionnel venant d’être remis au ministre de l’Agriculture. Il mise sur le nouveau statut d’organisation professionnelle obtenu par ses services et un positionnement constructif des deux groupes coopératifs qui se partagent l’essentiel de la production.

 

Jean-François Fortin, le rebond

Une usine flambant neuve mais vide, des procès avec Synutra, le client chinois qui les lâche rapidement au début de l’aventure et des milliers de litres de lait sur les bras, l’année 2019 a bien mal commencé pour les Maîtres laitiers du Cotentin. Pour autant, la coopérative normande et son directeur général, Jean-François Fortin, n’ont pas baissé les bras et ont présenté à l’automne un bilan étonnement positif. Les comptes de la coopérative pour la campagne 2018-2019 sont repassés dans le vert, le groupe a réduit son endettement et les objectifs de prix du lait aux éleveurs ont été tenus. Quant aux volumes de lait supplémentaires, s’ils n’ont pas trouvé le chemin de la Chine, ils ont été dirigés vers France Frais, la filiale de distribution du groupe et vers une filière lait de pâturage sans OGM qui connaît un certain succès en Europe du Nord. La coopérative a aussi lancé sa marque propre Campagne de France, dans la grande distribution ainsi que la gamme Elo, des produits pour enfants. « Maintenant, fini la défense, c’est l’heure de l’attaque », se réjouissait cet automne Jean-François Fortin en promettant : « la campagne entamée est déjà meilleure, et l’exercice entamé en avril sera très supérieur au précédent ! »

 

Sophie Primas surveille la loi Egalim

La commission des Affaires économiques du Sénat a été chargée de réaliser le suivi pendant deux ans de la loi Egalim. Une mission sur mesure pour sa présidente, Sophie Primas, ingénieure agronome et ancienne acheteuse de la grande distribution, sénatrice depuis 2011. Celle qui juge que les états généraux de l’alimentation étaient « une bonne chose », permettant de mettre au cœur du débat public les problèmes de l’agriculture et les attentes sociétales, se montre assez critique avec la loi qui en a découlé, sans la condamner dans l’ensemble. Afin de limiter « ses effets indésirables qui mettent en difficulté entreprises et agriculteurs », elle prône un assouplissement de l’encadrement des promotions, notamment pour soutenir les PME vendant des produits saisonniers. Dubitative sur le ruissellement attendu de la hausse du seuil de revente à perte, elle expliquait en 2019 dans nos colonnes : « Nous allons continuer à surveiller cela et voir s’il y a des effets économiques pervers à cette situation ». 2020 devrait commencer en trombe pour Sophie Primas, puisqu’elle devrait porter dès ce mois-ci une proposition de loi avec trois mesures d’urgence pour corriger ces fameux « effets pervers ».

 

Jean-Philippe Lefrançois, entré dans l’histoire d’Alpina Savoie

Le fait le plus marquant de la vie d’Alpina Savoie en 2019 ? Selon son directeur général Jean-Philippe Lefrançois, c’est le développement d’une gamme de pâtes biologiques de France sans résidu. « C’est l’aboutissement d’une réflexion et de tout un travail menés depuis de nombreuses années », fait valoir cet entrepreneur engagé de la Feef, depuis six ans aux commandes de cette « pépite » savoyarde. Alpina Savoie vient de renouveler les contrats trisannuels de ses fournisseurs de blé dur bio, alors que cette céréale est en concurrence avec le blé tendre sur les fermes biologiques. L’entreprise s’est aussi lancée dans la régénération de la biodiversité en Camargue en soutenant l’institut technique La Tour du Valat et des fermes volontaires. Jean-Philippe Lefrançois a pris une part du capital d’Alpina Savoie début 2019, à l’occasion de la prise de contrôle conjointe par le groupe Galapagos, ex-actionnaire majoritaire, et le groupe bancaire CM-CIC. Ce patron très communicant veut ainsi mieux participer à l’histoire de cette entreprise de 170 ans qui « a trouvé ses marques », dit-il, tant sur le plan commercial que dans ses relations pérennes avec l’agriculture du sud de la France.

 

Louis Le Duff, l’infatigable géant breton

Bridor a annoncé l’investissement de 250 millions d’euros dans une nouvelle boulangerie industrielle en Bretagne et 200 millions d’euros dans l’expansion de sites au Canada et aux États-Unis. Louis Le Duff, président-directeur général du groupe de Bridor, Brioche dorée, Del Arte en France, investit aussi massivement pour tenir le rythme de doubler tous les cinq ans. Cet entrepreneur hors pair est célébré en Bretagne. Il a fait honneur à sa Région en organisant à Rennes la convention mondiale du groupe Le Duff. Son groupe s’est aussi distingué cette année aux États-Unis quand Brioche dorée, la chaîne de restauration rapide dirigée par son fils Vincent, a reçu un award de la chambre de commerce franco-américaine de Dallas. Il s’est aussi illustré en France par la nomination de Brioche dorée comme la meilleure chaîne de sandwicherie aux trophées Meilleure Chaîne de magasins, ainsi qu’en Allemagne, où la chaîne de café-boulangerie Kamps a reçu le prix de la meilleure enseigne. L’industriel de la boulangerie-viennoiserie a créé l’évènement en lançant un concept de baguette amie du microbiote, nommée L’Amibiote, le fruit d’un travail avec Joël Doré, expert du microbiote intestinal à l’Inra.

 

Atom, un trio très créatif

Après avoir cédé la pépite Paso à Fleury Michon en avril 2018, les deux entrepreneurs et amis Olivier Vallée et Tugdual Rabreau se sont lancés en octobre 2018 avec leur ancien avocat, Alain Garrec, dans une nouvelle aventure sous l’entité Atom Food. En 2019, ils ont ainsi racheté Gofrino, société belge fabriquant des gaufres de Liège, puis Goulibeur, spécialiste du broyé du Poitou. « On réalisera une troisième acquisition en 2020 dans le sucré », avance Tugdual Rabreau, toujours sur la cible des produits régionaux. En parallèle, Atom Food se déploie dans la restauration rapide via le master franchise de l’enseigne O’Tacos (Vendée) avec l’objectif d’ouvrir douze restaurants d’ici à 2021, dont deux prévus en janvier 2020. Le trio travaille aussi sur la création de concepts, comme la crêperie Kreisker qui a vu le jour il y a près de deux mois aux Sables-d’Olonne. Au cours de l’« année charnière 2019 », Olivier Vallée et Tugdual Rabreau ont également continué d’accompagner Paso au sein de Fleury Michon. Mission confiée dans un premier temps jusqu’au 3 avril 2020, et pour laquelle, ils ont reconstitué une force de vente spécifique en juillet 2019.

 

Jocelyne Porcher, la cause de l’élevage

Jocelyne Porcher a connu un parcours atypique. Secrétaire en ville, elle part en milieu rural où elle devient éleveuse de chèvres et brebis, puis elle reprend des études agricoles et est amenée à travailler dans une porcherie industrielle. Lors de ces expériences contrastées, elle réfléchit à la différence entre les productions animales et l’élevage. Directrice de recherche à l’Inra depuis 2014, elle est spécialisée sur l’étude des relations entre l’homme et l’animal. En 2019, elle a publié un ouvrage passionnant Cause animale, cause du capitaloù elle s'oppose de front au véganisme. Selon elle, si les attaques contre l’élevage sont si nombreuses actuellement, c’est que la technologie est au point pour la production de viande artificielle et que les intérêts financiers en jeu sont énormes. Intervenant régulièrement dans les médias et dans des tribunes, elle n’a de cesse d’expliquer que l’élevage paysan et familial implique du respect envers l’animal, tandis que le véganisme n’est qu’éloignement à la nature.

 

Jean-François Loiseau, le conquérant

L’opération n’est pas passée inaperçue : en reprenant l’activité malt de Cargill (16 sites industriels, une capacité totale de production de 1,7 million de tonnes), la coopérative française Axéréal a réalisé en novembre une des plus grosses acquisitions du secteur de l’année 2019. Un achat ayant permis à sa filiale Boortmalt de se hisser à la place de leader. La coopérative, présidée par Jean-François Loiseau, affiche de surcroît pour l’exercice 2018-2019 des résultats plus qu’honorables avec un chiffre d’affaires en augmentation de 6,3 % à 2,7 milliards d’euros et un excédent brut d’exploitation en hausse de 12 % à 108 millions d’euros. Au-delà de sa performance, son président souhaite faire d’Axéréal « la meilleure coopérative durable », « en phase avec les évolutions sociétales ». Nommé« fédérateur de la famille prioritaire à l’export pour l’agroalimentaire » en janvier 2019 par Jean-Yves Le Drian et Jean-Baptiste Lemoyne, le céréalier, président d’Intercéréales, s’est aussi illustré en prenant au printemps la présidence de l’Association nationale de la meunerie française (ANMF) après une période chahutée pour l’organisation professionnelle.

 

Créateur du numéro 1 européen des biscuits sucrés sous MDD

Grosse année pour Biscuit International, spécialiste européen des biscuits sucrés sous MDD, présidé par Giampaolo Schiratti depuis mars 2017. Après les acquisitions de A&W en Allemagne, NFF au Royaume-Uni, Stroopwafel & Co aux Pays-Bas et d’Arluy en Espagne, le groupe a repris le néerlandais Aviateur en juin 2019. Il devient ainsi le leader de son secteur avec un chiffre d’affaires supérieur à 500 millions d’euros (sur dix-neuf catégories de produits), sur un marché de 7 milliards d’euros. « Mission accomplie, mais ce n’est qu’une étape. Nous comptons vingt sites industriels dont cinq en France pour 2 000 salariés », explique Giampaolo Schiratti. Et l’arrivée d’un nouveau « sponsor », Platinum Equity d’ici à la fin du premier trimestre 2020, devrait l’aider à consolider l’ensemble et à continuer de croître dans des pays où il est peu présent (Italie, Portugal, Scandinavie) ou sur certains produits (gaufres liégeoises, jaffa cake, pâtes molles jaunes et biscuits salés). En attendant, un travail est mené pour intégrer les différentes sociétés, des investissements sont réalisés sur les sites, et une méthode a été mise en place pour faire bénéficier à l’ensemble des sites les points de force de chaque usine.

 

Antoine Hubert donne des ailes à la filière insectes

Antoine Hubert, président-directeur général de la start-up Ynsect depuis 2011, spécialiste de l’élevage d’insectes et de leur transformation en ingrédients haut de gamme destinés aux marchés de l’alimentation animale, a permis à sa société d’effectuer la levée de fonds « la plus importante dans le domaine de l’Agtech hors États-Unis », affichant 110 millions d’euros. Le tour de table, mené par Astanor Ventures en février 2019, a été appuyé par plusieurs fonds d’investissement (Bpifrance, Talis Capital, Idinvest Partners, Finasucre et Compagnie du bois sauvage). Cette levée a permis notamment à Ynsect de financer son nouveau site de production Ynfarm, qui permettra la transformation de vers de farine (larves de coléoptère) à grande échelle. Lorsqu’il aura atteint son plein rendement, Ynfarm produira environ 20 000 tonnes de protéines par an. La start-up a également été soutenue par la Commission européenne à hauteur de 20 millions d’euros pour son projet. C’est la première entreprise française à recevoir un soutien de l’UE de cette ampleur. Ce site ouvrira ses portes en 2021. La start-up compte aujourd’hui 105 collaborateurs en France, 25 brevets et 15 partenariats de recherche. Ynsect prévoit également l’ouverture d’une nouvelle usine en Amérique du Nord.

 

 

 

 

 

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