Agriculture : Que pensent les exportateurs du Mercosur du report de l’accord ?
Les Marchés a recueilli les réactions à chaud des porte-voix des agriculteurs du Brésil et de l’Argentine à l’annonce du report de la signature de l’accord UE-Mercosur. Déçus, ils sont opposés à toute clauses miroir et clause de sauvegarde. Sans aller jusqu’à prévoir une action publique à cet effet au cours du mois de janvier.
Les Marchés a recueilli les réactions à chaud des porte-voix des agriculteurs du Brésil et de l’Argentine à l’annonce du report de la signature de l’accord UE-Mercosur. Déçus, ils sont opposés à toute clauses miroir et clause de sauvegarde. Sans aller jusqu’à prévoir une action publique à cet effet au cours du mois de janvier.
« Les Européens se sont rétractés à la dernière minute sur l'accord UE-Mercosur, toujours sur la défensive vis-à-vis de leur secteur agricole. Les nouvelles exigences de la France font partie de ces techniques de dissuasion et de dilatation dans le temps qu’elle emploie depuis le début de ces négociations, en l’an 2000 », constate et déplore Raúl Roccatagliatta, de la Société rurale argentine (SRA).
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« La supposée menace d’une avalanche de viandes sud-américaines sur le marché français, derechef douteuses sur le plan sanitaire est un gros double mensonge, qui permet à la France de bloquer le jeu. J’espère que l’accord aboutira en septembre, mais sait-on ? », s’interroge-t-il.
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Les entreprises du Mercosur contre les clauses de sauvegarde
Le secteur privé argentin s’est, tout de suite, opposé à l’hypothèse d’une clause de sauvegarde pouvant être rajoutée in extremis au texte du traité. Dans un communiqué du 19 décembre, la Bourse aux céréales de Buenos Aires a fustigé qu’une telle clause « serait contraire et à la lettre du traité de 2024 et aux règles de l’OMC. »
Les clauses miroirs refusées par le Mercosur
« Les clauses dites miroirs, de réciprocité des normes de production, sont aussi un abus », affirme Raúl Roccatagliatta. « Si l’Argentine et le Brésil exportent des millions de tonnes d’aliments vers l’Europe depuis des décennies, conformément aux règles, pourquoi en douter juste maintenant ? Respectez nos systèmes de production, uniques, ainsi que la souveraineté de nos lois », demande-t-il.
« L’Europe a beaucoup perdu en ne signant pas l’accord à Foz de Iguazú »,
« L’Europe a beaucoup perdu en ne signant pas l’accord à Foz de Iguazú », juge Antônio Da Luz, de la fédération agricole du Rio Grande do Sul (Farsul), au Brésil. Il éprouve une « profonde déception ». Mais, remarque-t-il, « pour nous, les Brésiliens, ça ne va pas changer notre vie. Le marché européen représente une petite partie de nos exportations. Nous perdrons moins à une non-signature de l’accord, que les consommateurs européens. En leur apportant des aliments sains en quantité, nous contribuerions à freiner l’inflation des prix alimentaires. L’industrie agro-alimentaire européenne, en tout premier lieu, en a besoin ».
Les céréaliers argentins sont aussi déçus
La présidente de la Fédération agraire argentine (FAA), Andrea Sarnari, se dit elle aussi « déçue » par « cet énième report de signature, qui n’est pas une bonne nouvelle pour les agriculteurs argentins », dit-elle. « Le débat sur la réciprocité de normes, je le comprends, mais parlons aussi de réciprocité des conditions fiscale et commerciale. À cet égard, nous seuls, les céréaliers argentins, avons droit à des taxes à l’export au lieu d’aides publiques », rappelle-t-elle.
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Elle défend la primauté des lois argentines sur les velléités de mise à niveau réglementaire en fonction des critères européens, rejetant en creux le principe de clauses miroirs supplémentaires.
Pas d'action publique contre les clauses... pour le moment
Andrea Sarnari révèle que « l’intersyndicale agricole argentine (la Table d’union, NDLR), dont fait partie la FAA aux côtés de la SRA, n’envisage « aucune action publique en janvier relative à l’accord UE-Mercosur ». Ce que confirme Raúl Roccatagliatta. Ils se contenteraient donc de réaffirmer leur soutien au projet de traité de libre-échange par voie de communiqués de presse et sur les réseaux sociaux.
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María Marta Rebizo, de la chambre argentine des huiliers (CIARA-CEC), opine que : « samedi dernier, les Européens ont fait ce qu’ils avaient fait en 2020 : tout a été remis sur la table avec le Green Deal, et il a fallu attendre cinq ans pour en arriver là. On est reparti pour deux ans de négociations, minimum. »
Plus que jamais, elle doute de leur issue.