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Retail data : Ça bouge dans le traitement des données

Distributeurs et industriels travaillent de plus en plus main dans la main pour améliorer le traitement des données des magasins, avec l’aide de start-up à la pointe de la technologie. Explication avec Karyon Food et In The Memory.

Que diriez-vous de passer d’un fichier Excel illisible à un tableau de bord performant et adapté à vos besoins ? Quelques start-up se sont lancées sur ce sujet de l’exploitation des données distributeurs pour mieux piloter leur performance commerciale. Deux d’entre elles nous ont expliqué leur fonctionnement. La première, In The Memory, créée en 2018, travaille avec les distributeurs Intermarché – c’est d’ailleurs avec ce distributeur que l’outil a été conçu –, Carrefour et Auchan. Et à partir de 2023, d’autres distributeurs viendront s’ajouter à la liste, nous a confié Maxime Brunet, cofondateur et dirigeant de l’entreprise qui compte 80 salariés.

De nombreux cas d’usage

La start-up a conçu une plateforme disponible sur Saas pour que distributeurs et industriels puissent piloter, prendre des décisions très rapidement sur un ensemble de cas d’usage, telles que le category management, la promotion, le prix, l’assortiment, la détention, la performance commerciale, etc. « Pour le responsable d’une force de vente, le premier enjeu est de s’assurer que ses produits sont en magasin. Et pour cela, il a besoin de s’appuyer sur la donnée. À travers notre outil, il peut piloter la détention. En trois clics, la PME va identifier sur notre "dashboard détention" dans quels magasins ces produits se trouvent », explique Maxime Brunet.

« Les distributeurs comprennent désormais l’intérêt de partager leurs propres outils décisionnels », Maxime Brunet, cofondateur de In The Memory

C’est un exemple parmi d’autres. In The Memory permet aussi de partager les outils des distributeurs avec les industriels. « Les distributeurs comprennent désormais l’intérêt de partager leurs propres outils décisionnels. Nous sommes là sur l’exploitation de la donnée accessible », précise Maxime Brunet. Autre exemple d’utilisation : le « merchandising ». « Carrefour a délégué à Memory son outil de "merchandising". On peut mesurer tout un tas de choses. Dacco a pu, par exemple, mieux expliquer pourquoi il était utile d’avoir telle référence plutôt qu’une MDD, etc. », confie le dirigeant. En période de négociations commerciales, ces éléments peuvent être clés dans votre argumentaire.

Tout dépend des volumes vendus

Pour autant, ces outils sont perfectibles et ne sont pas utiles à tous. L’entreprise travaille avec des marques telles que Coca-Cola, Blédina, le groupe Mondelez ou encore Marie et Sodebo, dont la présence en magasin est très forte. Pour des PME plus régionales, l’outil semble moins efficace. « Nous avons travaillé avec Memory pour Intermarché au moment du lancement d’un produit. Cela coïncidait bien et nous a permis de bien avancer. Mais après, nous n’avions pas une vision claire et nous avons arrêté, car on se débrouillait finalement sans. Il me semble que cela est plus intéressant quand les volumes vendus sont plus élevés. Je pense que l’outil est très bien fait pour des entreprises qui ont une force de vente fournie, avec des distributions numériques aussi importantes », nous confie un utilisateur anonyme.

Pour le responsable commercial GMS, Jean-Christophe Legru, de la Fromagerie P. Jacquin & Fils, l’outil mis en place depuis juillet 2022 avec Carrefour uniquement a un double intérêt : « Cela donne une photographie de la santé du magasin, de l’évolution du chiffre d’affaires, et d’étudier l’évolution du panier moyen, donc d’apporter un argument lors des relations commerciales. » Pour autant, en cette période d’inflation et de négociations difficiles sur la matière première industrielle, la société pourrait revoir ses priorités et se passer de cet outil commercial et marketing.

Une vision claire des référencements

L’autre start-up, Karyon Food, créée en 2020, cible justement des TPE et PME locales et régionales pour les aider à piloter leurs performances commerciales avec des tableaux de bord simples, sur une base technologique blockchain. La plateforme permet aux entreprises d’ajuster leurs volumes et d’optimiser leur production, en connaissant à l’unité près leurs volumes de vente auprès des distributeurs de la grande distribution ou spécialisés comme Biocoop, Naturalia ou Bio c’Bon. « Le logiciel propose aux agriculteurs, transformateurs ou fournisseurs locaux des GMS de suivre finement la diffusion de leurs marchandises, région par région, magasin par magasin, jour par jour. Grâce à un tableau de bord en ligne, ils peuvent voir quel produit a été vendu, à quel endroit et, à l’inverse, là, cela n’a pas fonctionné », explique Claire Guillet, fondatrice de l’entreprise.

Gérer ses performances précisément

Accessible en matière de prix, la start-up vise les entreprises de petites tailles. L’Atelier Sarrasin fait partie de ses utilisateurs. La jeune entreprise vend sa marque l’Atelier Sarrasin en réseaux de magasins spécialisés bio, très centralisés dans leurs achats et référencements. « Nous avions du mal à savoir où nos produits étaient référencés. Avec Biocoop, nous recevons un tableau Excel avec l’ensemble des produits des rotations, pour chaque magasin. Mais ce n’est absolument pas ergonomique. Il est très facile d’avoir le total du chiffre d’affaires ou des volumes vendus, mais, si on veut aller plus en finesse, ce fichier est inutilisable pour connaître les clients qui ont acheté notre produit, ceux qui ne l’ont pas fait. À Bio c' Bon, Biodis ou encore Naturalia, il est impossible d’avoir ces informations. J’ai une "data globale" sur le chiffre d’affaires ou les volumes. Il m’est impossible de savoir quels types d’action je peux mettre en place, sur quelle zone, sur quel magasin, etc. », témoigne Clément Terneyre, responsable innovation de l’Atelier Sarrasin.

Avec la plateforme Karyon Food, l’entreprise a pu avoir des données extrêmement précises et facilement utilisables par les commerciaux. Désormais, elle peut voir les zones où elle est le moins performante, et celles qui ont du potentiel. Un recrutement d’un nouveau commercial est en cours. Prochaine étape pour améliorer sa performance commerciale : se doter d’un CRM (outil de gestion de la relation client) plus poussé sur le reporting, qui passera peut-être par Karyon ou par un autre ERP.

3 questions à

« Mieux se servir des données pour mieux piloter »

Comment évoluent les distributeurs dans l’accès à la data ?

Alexis Vaillant - La data est de plus en plus intelligible de la part des distributeurs. C’est un travail que l’on mène avec eux. En général, il y a quand même un mouvement vers de la data gratuite, c’est le sens en tout cas des accords que la Feef a signés récemment avec certaines enseignes. Avant, elles incorporaient la data dans les accords que nous avions. Elles se rendent compte que tout le monde y gagne en la rendant accessible, notamment dans un objectif de performance commune. Pour piloter son activité, la data est de plus en plus importante, et les GMS ont bien compris leur intérêt à la rendre gratuite pour les PME afin de développer le business. Le but est d’avoir accès à la data. Une PME a rarement les moyens de se payer la data, de la traiter et de la piloter.

Quel travail faut-il mener pour les rendre encore plus intelligibles ?

A. V. - Les enseignes les rendent plus intelligibles. Il y a parfois des problèmes d’homogénéisation des données, selon les catégories. On travaille là-dessus. Il y a quand même de bonnes avancées pour permettre aux TPE/PME d’obtenir des données intelligibles. Avec E.Leclerc, par exemple, on travaille beaucoup à l’uniformisation, l’homogénéisation des données que l’on reçoit, afin qu’elles soient suffisamment précises et détaillées à la fois sur les ventes, mais aussi sur les détentions par région, par magasin, par code-barres EAN, etc.

Les PME sont-elles suffisamment sensibilisées à ce sujet ?

A. V. - Les PME doivent être sensibilisées à la nécessiter d’avoir ces données, de mieux s’en servir pour mieux piloter. Il est clair que les PME doivent l’intégrer pour les comptes clés, les managers régionaux. Ce n’est pas tout de piloter ses chiffres, ses magasins ou une enseigne au global. Il faut comprendre là où on est le plus performant, là où on peut s’améliorer, etc. Mais c’est de mieux en mieux intégrer au sein des directions commerciales, même si, parfois, il y a une problématique de bande passante. On ne peut pas tout faire, on va parfois plus ou moins bien les traiter. Il y a encore des PME à sensibiliser. La notion de la data, de la digitalisation au sens large, nécessite encore un peu de formations. Bien piloter ces datas permet aussi de mieux piloter ces négociations commerciales. Là où, avant, on pouvait arriver en négociation sans connaître la vraie performance de son produit, de sa distribution numérique, maintenant, on arrive avec des informations plus précises et des notions d’optimisation. Le traitement des données nous aide aussi à piloter notre force de vente grâce à la détention, c’est un élément clé.

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