« Pour être fort à l'étranger, il faut l'être chez soi. La France ne doit pas considérer qu'elle peut lever le pied »
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Louis Orenga, directeur de l'Interprofession fruits et légumes frais.
Les Marchés Hebdo : La forte présence des productions végétales à l'Expo Milan annonce-t-elle un tournant ?
Louis Orenga : Il y a certainement une prise de conscience du fait qu'il y a un souhait d'équilibre en termes d'alimentation humaine. Une position universelle sur la nécessité de rééquilibrer la production à destination de la consommation humaine. La conférence Egea a rappelé la place des fruits et légumes frais dans l'alimentation, les territoires et dans les métiers de l'alimentaire. Les fruits et légumes se présentent comme un dénominateur commun de la santé, de l'environnement et de l'économie. Les fruits et légumes frais, en particulier sont des marqueurs à plusieurs titres. Ils sont des marqueurs d'une bonne alimentation. Ils marquent aussi le savoir-faire des consommateurs. Perdez la culture des produits frais et vous ne savez plus les assembler. Les fruits et légumes frais sont aussi des marqueurs d'une saine organisation sociale. Leur culture, plutôt que leur importation sous forme transformée, participe à l'aménagement des territoires et à l'emploi.
LMH : Cette édition de la conférence Egea permet-elle d'espérer davantage de consommation de fruits et légumes ?
L. O. : Le but de l'Egea est de poser un diagnostic. Elle met en évi-dence les difficultés à promouvoir les fruits et légumes dans un contexte où les ressources internes à la production ne permettent pas de mettre en œuvre des budgets suffisants. Je pense que les actes de plus de vingt pays réunis vont agir comme un aiguillon sur l'Europe et les pays membres, pour aller vers une stratégie globale de production et de consommation.
LMH : L'enjeu d'Expo Milan, pour le secteur des fruits et légumes est-il de séduire des pays acheteurs ou de valoriser l'image de la gastronomie française ?
L. O. : La plupart des plats de la gastronomie française contiennent des légumes. Ils sont ses repères. Mais la France est aussi un des principaux exportateurs de pommes et autres fruits. La France a un atout exceptionnel qui est son image de qualité gastronomique, de savoir-faire ; c'est l'équivalent de l'industrie mécanique en Allemagne. On oublie toujours qu'une image est un capital qui s'entretient. Pour être fort à l'étranger, il faut l'être chez soi. L'Italie, les États-Unis, la Chine ont une vraie politique de soutien. La France ne doit pas considérer qu'elle peut lever le pied. Il faut renforcer la contribution financière du secteur public à la promotion des fruits et légumes. Les conditions économiques des professionnels ne leur permettent pas de gagner seuls cette bataille.