Partir sur de bonnes bases pour transmettre son entreprise
Céder son entreprise à l'un de ses enfants, à ses employés, à un autre patron de PME, à un grand groupe voire à une coopérative. Les solutions sont multiples pour les patrons d'indus-trie agroalimentaire. Mais laquelle choisir ? Comment s'y préparer et se faire conseiller ? Com-ment définir la valeur de l'entreprise ? Les Mar-chés ont enquêté.
La discrétion est mauvaise conseillère. Et quoi de plus délicat que la transmission ou la cession de son entreprise. Les salariés et les banquiers ne vont-ils pas s'émouvoir du bouleversement attendu ? Les concurrents ne vont-ils pas profiter de la diffusion d'information sur la santé de l'entreprise ? Parfois le chef d'entreprise est seulement rebuté
“ La famille, c'est le chemin royal
” à l'idée de passer dans le giron d'un groupe ou de voir un étranger se saisir des manettes.
La transmission familiale lève au moins ce blocage psychologique. « La famille, c'est le chemin royal », constate Didier Bissery, délégué du réseau Cédants et repreneurs d'affaires (CRA) en charge des activités nationales.
Non-ditsMais la transmission familiale elle-même n'est pas exempte de non-dits. Une anecdote a fait frémir les participants à l'atelier de l'Aria Île-de-France sur la transmission et la reprise, en mai dernier : tel chef d'entreprise était prêt à signer la vente quand son fils, en activité outre-Atlantique, a manifesté son intention de lui succéder. Ce cas est rare. « Les successeurs potentiels sont généralement de grands adultes établis dans la vie active. S'ils ont manifesté leur intérêt, ils entrent dans l'entreprise et sont naturellement désignés pour repren-dre », observe Didier Bissery. La deuxième option préférée, selon l'association CRA, est la reprise par un membre du personnel. En troisième lieu, on met l'entreprise sur le marché. À partir des bases de données existantes dans tous secteurs (hors commerce de détail, artisanat et sociétés unipersonnelles), l'observatoire CRA évalue une proportion au cours des quinze dernières années de 8 % en transmissions familiales, 22 % au personnel et 45 % de cessions externes.
Valeur et idées faussesDans tous les cas, il s'agit d'estimer la valeur de l'entreprise. En la matière, « l'expert comptable ou autre conseil habituel de l'entreprise n'est pas le meilleur conseiller parce qu'il est souvent trop proche », souligne Didier Bissery. « On peut perdre beaucoup de temps en imaginant une valeur hors marché ou en extrapolant la pérennité de l'entreprise », prévient-il. « Le cédant peut aussi partir d'une idée fausse de la valeur de son entreprise en anticipant sur la valorisation par le travail du repreneur », souligne-t-il. Chez Agro-Sphères (organisation de soutien au tissu agroalimentaire de Picardie), on conseille aux candidats repreneurs de ne pas trop évoquer leur projet de développement avec le cédant avant que l'affaire ne soit conclue. « La reprise donne en général un nouvel essor », se félicite le directeur Philippe Ancelin. Ce dernier évoque le cas d'un repreneur potentiel, embauché comme directeur, qui n'a pu racheter avec la>> prise de valeur qu'il avait lui-même amorcée. Didier Bissery, délégué CRA en région parisienne, note aussi que la valeur patrimoniale peut se révéler bien supérieure à la rentabilité.
Valeur immobilièreIl se réfère aux jardineries des zones urbaines qui peuvent changer de destination et se valoriser sur le marché immobilier. Le secteur public ou associatif (CCI, CRA, CGPME, Agro-Sphères…) aide à réaliser un diagnostic. La plupart des conseillers en transmission
“ La reprise donne en général un nouvel essor
” constatent que les chefs d'entreprise ne s'y prennent pas assez tôt. Selon le CRA, il faut s'y prendre deux ou trois ans à l'avance. Ils admettent que la gestion quotidienne ne permet pas d'envisager la fastidieuse démarche.
Francis Lange, fondateur du groupe Actoria, recommande de passer par sept étapes sur son nouveau blog dédié aux PME « réussir-sa-transmission.com ». Ce sont ses « 7 P » : « pourquoi transmettre » (pour l'entreprise et pour soi), « présenter son entre-prise sous son meilleur jour », en faire la « promotion » (ciblée), constituer un « panel de repreneurs », engager les « pourparlers » pour décrocher des lettres d'intention, établir un « plan financier » puis enfin les « protocoles ». Ces derniers comprennent l'accompagnement du repreneur lors d'une phase de transition.