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L’agriculture biologique doit réaffirmer son identité et ses spécificités

Lors des assises nationales de l’agriculture biologique, les professionnels de la filière ont échangé sur les freins et les opportunités de développement. Ils ont aussi exprimé leurs inquiétudes quant à l’incertitude réglementaire actuelle au niveau européen.

« L’agriculture biologique est à un tournant. Il y a actuellement un débat qui se joue à l’échelle européenne sur ce que sera la bio de demain », alertait Stéphane Le Foll lors des 9es assises nationales de l’agriculture biologique, le 14 novembre dernier, appelant la filière à « anticiper ces questions » et à faire des « choix stratégiques ». Alors que l’agriculture biologique est en pleine croissance, affichant une hausse de 20 % en France de ses ventes en grande distribution au premier semestre 2016 par rapport à la même période l’an passé, Bruxelles réfléchit à assouplir certaines de ses exigences réglementaires concernant le label bio européen. « Le bio ne doit pas se contenter d’affirmer ses positions sur la question des pesticides », avertissait le ministre de l’Agriculture. Parmi les sujets sur lesquels le bio doit statuer figurent par exemple le contrôle annuel, la mixité des exploitations ou encore les élevages et les cultures hors-sol. « La position française que je défends au niveau européen est celle du lien au sol et aux prairies », a-t-il rappelé. (lire aussi p. 15).

Un nouveau plan Ambition bio

Alors que le coût élevé des produits biologiques est souvent mis en avant comme étant un frein à sa démocratisation, le ministre de l’Agriculture a précisément soulevé cette question du prix. « Est-ce que le bio doit être sur le marché à un prix le plus bas possible pour augmenter la consommation ? Est-ce qu’on doit donc banaliser le produit issu d’une agriculture biologique ? Ce sont des questions stratégiques qui doivent être posées en France », a-t-il exprimé. À quelques mois des élections présidentielles, le ministre a annoncé la création d’un successeur au plan Ambition bio 2017. Ce nouveau plan pour l’agriculture biologique, qui devrait fixer des objectifs pour 2021, prendra en considération les questions de prix ainsi que les valeurs portées par le bio. Il devrait être présenté lors du prochain Salon international de l’agriculture, du 25 février au 5 mars 2017.

À l’occasion de ces assises, les filières lait, viandes, céréales, volailles, vin et fruits et légumes bio ont présenté lors d’une table ronde leurs opportunités de développement ainsi que les défis auxquels elles sont confrontées. Dans l’ensemble, les représentants ont mis en avant la nécessité d’inciter les agriculteurs et éleveurs à la conversion et de les accompagner dans cette phase critique. Ils ont également souligné l’importance de la structuration des filières, notamment en bio. « L’un de nos challenges est d’avoir une bonne adéquation entre l’offre et la demande, alors que nous avons beaucoup de conversions d’éleveurs laitiers, en partie à cause de la crise », soulignait Caroline Le Poultier, directrice générale du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (Cniel).

Une position partagée par Philippe Cabarat, président de la commission bio d’Interbev, l’interprofession bétail & viande. « Il faut anticiper la production pour mieux gérer la transformation », a-t-il déclaré. « Aujourd’hui, tout le monde cherche du porc bio. Mais c’est au niveau de l’amont que se pose le problème, avec des demandes d’investissements importants. D’une part, il faut développer des élevages de porcs naisseurs pour avoir des ateliers d’engraissement, d’autre part, le modèle technique est différent du porc traditionnel. Il requiert un changement de système de production, en passant d’un système plus ou moins intégré à un système autonome en alimentation », poursuit-il.

Des investissements incertains

Concernant le déficit de production des volailles et œufs bio, Bernard Devoucoux, président de la commission bio du Syndicat national des labels avicoles de France (Synalaf) a avancé le problème de l’incertitude réglementaire. Pour les poules pondeuses, « le Parlement européen a voté une proposition pour limiter les tailles des bâtiments l’année dernière, mais depuis nous sommes enlisés dans un trilogue entre la Commission européenne, le Conseil des ministres et le Parlement, et nous n’arrivons pas à faire avancer cette réglementation. C’est un vrai frein, car quand vous voulez investir, vous ne savez pas à quelle taille de bâtiment vous limiter, si vous êtes obligés de faire de la poule au sol ou en volière, etc. », affirme-t-il. Le représentant du Synalaf espère aussi que Bruxelles autorisera l’utilisation de farines d’insectes dans l’alimentation des volailles, une source de protéines bio qui pourrait être nourrie à partir des coproduits de meunerie.

Quant aux opportunités dans la restauration collective, Bernard Devoucoux « tire la sonnette d’alarme », constatant beaucoup d’intentions autour du local, mais moins sur les signes de qualité et le bio. Un débouché toutefois primordial pour la filière poulets, qui vend trois fois plus de blancs que de cuisses en grande distribution. Le député du Gers Philippe Martin a, quant à lui, fait savoir qu’un tiers des collèges de son département proposent aujourd’hui des repas 100 % bio. « Les autres sont à 30 à 50 % bio et passeront d’ici à 2021 à 100 % bio », assure-t-il.

Une TVA réduite sur le bio ?

Invité à témoigner lors des 9es assises nationales de l’agriculture biologique, Claude Gruffat, président de Biocoop, a rappelé l’importance de la proximité pour les consommateurs. « La densité de maillage du territoire en producteurs est très différente en France. Nous avons besoin d’installer des producteurs pour fournir les magasins en produits de proximité, partout où c’est possible », a-t-il déclaré. Le président de Biocoop est aussi revenu sur la question du prix, appelant à fiscaliser avec une TVA réduite les produits bios « puisqu’ils sont à faibles externalités négatives, de manière à ramener une égalité de prix aux consommateurs ». « Cela peut être un vrai levier de consommation de la bio pour l’avenir », a-t-il conclu.

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