La filière lait doit-elle se méfier du boom des MDD ?
Les marques de distributeurs constituent-elles une menace ou une opportunité pour la filière laitière ? le sujet faisait l’objet d’une conférence organisée par l’Institut de l’Élevage, au salon de l’élevage SPACE, à Rennes.
Les marques de distributeurs constituent-elles une menace ou une opportunité pour la filière laitière ? le sujet faisait l’objet d’une conférence organisée par l’Institut de l’Élevage, au salon de l’élevage SPACE, à Rennes.
Si la collecte laitière a rebondi de 0,7 % sur les huit premiers mois de l’année, c’est avant tout en raison des pluies qui ont favorisé la pousse de l’herbe et la productivité laitière. Mais depuis 2021, la production française est structurellement en recul (23,417 milliards de litres en 2023).
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« La part des MDD est passée de 39 à 44 % en ultra-frais »
La consommation de produits laitiers, en légère progression, se situe à 307 équivalents litres de lait par habitant. Mais dans le segment de la grande distribution -la moitié du débouché du lait environ, l’autre moitié tant constitué d’ingrédients calés sur les prix mondiaux-, on observe que les marques nationales reculent au profit des marques de distributeurs (MDD).
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Le poids des MDD augmente au rayon produits laitiers
Selon les données de l’Institut de l’Élevage courant de 2021 au premier semestre 2024, « la part des MDD en beurre est passée de 35 à 38 %, de 39 à 44 % en ultra-frais, de 40 à 47 % en lait liquide, de 43 à 46 % en fromages libre-service, de 50 à 53 % en crèmes », explique Christine Goscianski, chargée d’études en économie à l’Institut de l’Élevage.
« Elles intègrent moins de coûts d’innovation, de force commerciale et d’animation »
Elles se positionnent en-dessous du prix des marques nationales « parce qu’elles intègrent moins de coûts d’innovation, de force commerciale et d’animation de marque que les marques nationales », explique Bertrand Morand en charge chez le distributeur U des partenariats et filières agricoles.
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Pour le moment, pas d'impact sur le prix du lait au producteur
Dans un contexte inflationniste et de baisse de pouvoir d’achat des consommateurs, elles répondent de fait à une demande du consommateur. Elles permettent aussi à l’industriel d’optimiser le taux d’occupation de ses usines. En revanche, le développement des MDD peut interroger sur la valeur du prix du lait payé au producteur. La question ne vaut pas dans le contexte actuel de baisse de la production, de coût de revient sanctuarisé par les lois Egalim et de prix moyen payé au producteur d’un bon niveau. Mais qu’en sera-t-il sur le long terme ?
« Les MDD communiquent aussi sur la qualité »
« Si les magasins ne mettent en avant que leur MDD, çà peut effectivement impacter la valeur payée à la production », explique Yoann Serreau, président de l’UNELL, association de 11 organisations de producteurs (5 200 fermes, 3,1 milliards de litres de lait) livrant leur lait à Lactalis. « Mais ce que l’on voit aujourd’hui, c’est que les MDD communiquent aussi sur la qualité ». Une MDD est de la responsabilité de l’enseigne qui la porte. Aussi l’on voit de plus de contrats tripartites (enseigne, industriel, OP) reposant sur un cahier des charges se mettre en place.
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Si la collecte de lait baisse encore, quelles conséquences ?
Pour le distributeur U, ces relations à trois « dans une logique partenariale permettent de sécuriser l’approvisionnement sur le moyen et le long terme », démystifie Bertrand Morand, pour qui « les MDD donnent de la visibilité à nos partenaires ».
« Sécuriser l’approvisionnement sur le moyen et le long terme »
À l’entendre, les marques de distributeurs ne sont pas donc pas destructrices de valeur. « La diversité des OP permet la pluralité des qualités et des savoir-faire ». Par contre si la production laitière française venait à décrocher un peu plus, des enseignes pourraient être tentées d’augmenter la part de leurs importations plutôt que de privilégier l’origine France.