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Comment le belge Van Bogaert trace les pièces de porc

L’entreprise Van Bogaert mise sur la traçabilité des pièces de porc au sein de son usine afin de se démarquer de la concurrence. Ce système séduit les Belges déjà très adeptes de viandes labellisées. En revanche, le marché international reste un secteur à conquérir.

« Notre système de traçabilité est unique », s’est vanté Olivier Van Bogaert, dirigeant de l’entreprise familiale belge du même nom, à l’occasion d’une visite fin août. Le jeune dirigeant a rejoint l’entreprise de découpe et de désossage de jambon de porc en 2012. Issu de la troisième génération, il a misé sur un modèle de développement de l’entreprise située dans la province de Flandre-Orientale, au nord de Bruxelles.

Ce développement repose sur trois critères : l’innovation, la numérisation et l’autonomisation de la structure. Pour y parvenir, Olivier Van Bogaert s’est doté du traceur F-Trace. Ainsi, chaque pièce de porc est tracée dès son entrée, jusqu’à la fin du processus de transformation, qui marque la sortie d’usine.

Un système de traçabilité interne

L’entreprise Van Bogaert compte une centaine de salariés. Plusieurs d’entre eux sont formés à l’utilisation des différents logiciels et progiciels de traçabilité, notamment F-Trace. Sur les standards du système GS1, F-Trace, principalement destiné à l’industrie agroalimentaire, permet d’échanger des données de traçabilité sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement de manière standardisée et structurée. Elles sont regroupées en trois catégories : les données de base, qui concernent les informations statistiques ; les données de flux, relatives aux événements tels que l’horaire de la découpe ; les données complémentaires qui renseignent sur les capteurs, à savoir les données transactions.

Elles sont enregistrées tout au long du processus de découpe et de désossage à l’aide d’une tablette. Ainsi, à leur arrivée dans l’usine, chaque pièce de porc dispose d’une fiche sur laquelle sont précisés son lieu et mode de production, l’abattoir ainsi que les conditions d’abattage. Après avoir examiné les carcasses de porc dès leur livraison à l’usine, les employés procèdent au découpage des carcasses mais également au salage et à l’ajout d’épices et assaisonnements que l’entreprise Van Bogaert souhaite garder confidentiels.

Les pièces conservées (50 % de la carcasse) sont ensuite individuellement placées dans des boîtes. Il en est de même pour les autres parties des pièces revendues à des entreprises produisant d’autres charcuteries comme le salami ou différents plats préparés à base de viande de porc. Chaque boîte est étiquetée d’un numéro d’identification. Pour ne pas perdre la trace du produit, les pièces ne sortent que rarement de leur boîte étiquetée durant le processus de transformation qui prend entre un et trois jours.

Ce numéro d’identification permet aux destinataires immédiats d’accéder aux différentes informations concernant l’amont, mais également à de nouvelles données (pièce, origine, taille, poids, destinataire) ajoutées au système de traçage. Au total, chaque semaine, les informations collectées permettent d’obtenir des renseignements sur près de 1 000 tonnes de porcs découpés et désossés.

Une traçabilité du cochon à l’assiette

« En l’espace de six ans, les volumes ont progressé de 400 %, a indiqué Olivier Van Bogaert. Les clients se tournent davantage vers l’entreprise plus transparente que ses concurrents. » Ce système est utilisé par l’entreprise pour obtenir un produit fiable et être plus compétitif, dans un contexte de concurrence accrue.

Le recours au système F-Trace rassure les clients belges. En témoignent les ventes. Entre 60 et 70 % de la production est destinée au marché national. Cette évolution constitue l’une des réponses aux attentes sociétales des consommateurs de viandes belges sur les questions de sécurité alimentaire, notamment durant la pandémie de Covid-19, le bien-être animal ou encore l’environnement.

Afin de continuer à accroître la compétitivité, essentiellement axée sur la transparence des données, la structure familiale a emménagé dans un nouveau site de production ultramoderne. Par ailleurs, elle a rejoint le Belgian Pork Group en novembre en 2021. Cette entreprise familiale compte huit sites de production en Belgique. Tous sont spécialisés dans l’abattage, le découpage, le portionnage, l’emballage ou la surgélation de viande porcine de qualité. « La spécificité de ce groupe est de prêter une attention à tous les aspects de production du porc », a expliqué Olivier Van Bogaert. En franchissant cette nouvelle étape, l’entreprise assure à ses clients « un approvisionnement de haute qualité, un réseau plus large ainsi qu’une structure commerciale plus solide », a-t-il conclu.

La traçabilité suscite l’engouement en Belgique

Les Belges étaient des gros consommateurs de viande en 2021, 95 % d’entre eux consommaient de la viande, selon le baromètre mis en place par le Vlam. La viande de porc et la charcuterie figuraient parmi les produits carnés les plus plébiscités. Un peu moins d’un ménage belge sur quatre (20 %) consommait des produits carnés labellisés Meesterlyck (label attribué au jambon cuit et au jambon sec de qualité respectant des conditions strictes lors du processus de production). La majorité de la viande consommée concernait des produits saumurés (22 %) et du jambon cuit (21 %). Les salamis représentaient 14 % de la consommation. Environ 8 000 tonnes de jambons cuits et 85 tonnes de jambons secs ont été produites sous le label de qualité Meesterlyck en 2021. Ce label garanti des porcs élevés, abattus, découpés et désossés en Belgique.

L’intégralité des porcs possède le label BePork (qui atteste d’un porc qualitatif produit à l’échelle locale). Il était bien connu par la moitié de la population belge (43 %) au début de l’année 2022, selon le Vlam. En revanche, ces produits labellisés ne sont pas ou peu connus à l’étranger. « La demande de viande de porc est importante sur plusieurs marchés, dont le marché asiatique. Toutefois, nous ne sommes pas assez compétitifs sur le marché international, contrairement à l’Espagne », regrette Michael Gore, directeur général de la Fédération belge de la viande.

3 questions à

« La transparence, c’est une bonne chose, mais pas à n’importe quel prix »

Quels sont les obstacles que connaît la commercialisation de la viande en Belgique et comment tentez-vous d’y remédier ?

Michael Gore – La Belgique connaît de nombreuses oppositions à la commercialisation de la viande. Les ONG, défendant notamment le bien-être animal, ébranlent le secteur de la viande. Par ailleurs, le nombre d’abattoirs a baissé de plus de 30 % entre 2010 et 2022. Une consolidation et de nombreuses mesures de modernisation ont été essentielles pour sauvegarder la filière. Nous avons considérablement durci les normes en matière de bien-être ces cinq dernières années. Nous accordons d’ores et déjà notre attention à la demande sociale croissante des citoyens d’intégrer le bien-être des animaux dans le traitement de ces derniers. Cependant, le commentaire que nous souhaitons faire ici est qu’il est impératif d’arriver à un juste équilibre en la matière. Le souci d’un plus grand bien-être est légitime, mais il doit être proportionné. Nous constatons que des décisions visant uniquement à empêcher nos entreprises de faire leur travail correctement sont évoquées sur plusieurs forums et prises par certains partis politiques. Nous ne pouvons tolérer de telles attitudes. Enfin, le secteur est confronté à une pénurie d’inspecteurs vétérinaires. Ces dernières années, le recrutement de personnes qualifiées à des postes opérationnels, mais également de profils plus techniques comme des spécialistes de l’assurance qualité, s’est avéré de plus en plus ardu.

Que pensez-vous de la transparence ?

M.G - Depuis 2018 (année d’éradication de la peste porcine africaine en Belgique, NDLR), la transparence est la clé d’or censée ouvrir toutes les portes. Le gros problème est que l’interprétation de la transparence est dans l’œil de celui qui regarde, et peut donc prendre un sens complètement différent selon votre interlocuteur. Dans certains cas, une confrontation avec la réalité est nécessaire pour ramener les parties dans le droit chemin et progresser. La transparence, c’est une bonne chose, mais pas à n’importe quel prix.

Quels sont les obstacles aux exportations vers les pays tiers ?

M.G - Essentiellement le manque de stratégies de l’Union européenne. Les pays membres ne font pas de l’industrie de la viande une priorité alors que la Belgique dispose d’opportunités dans plusieurs pays comme ceux d’Asie. Ces dernières années, les exportations sont en recul. La peste porcine africaine présente en Belgique, la pandémie de Covid-19 ont également beaucoup affecté le commerce.

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