Activités fromagères : l’international sourit à Savencia
Malgré la chute de certaines devises étrangères, les ventes du groupe fromager hors d’Europe ont connu une croissance organique dynamique. Le géant mise sur le snacking pour conquérir ces marchés. Explications.
« L’année 2016 a été marquée par un environnement particulièrement instable, avec la dévaluation de certaines monnaies et la prolongation de la crise laitière mondiale », mais « la force de nos marques a permis de générer de la croissance », a exprimé Jean-Paul Torris, directeur général de Savencia Fromage & Dairy, en préambule de la présentation des résultats annuels du groupe, le 16 mars. À 4,418 milliards d’euros, le chiffre d’affaires du groupe fromager a légèrement reculé sur un an de 0,5 %, marqué par une croissance organique de 2,2 % et un effet devises négatif de 2,7 %.
Son résultat opérationnel courant s’est établi à 187 millions d’euros, en hausse de 23 % et son résultat net part du groupe à 104 millions d’euros, en hausse de 83 %. « L’augmentation de la marge vient plus de la progression sur le marché international que de la baisse du prix du lait », clarifie Olivier de Sigalony, directeur financier de Savencia Fromage & Dairy.
Valorisation du portefeuille fromager
Par activités, les produits fromagers affichent une croissance organique de 1,5 % sur l’année, poussée par la valorisation du portefeuille, en particulier en Asie, Amérique du Nord et dans certains pays d’Europe centrale. L’activité des autres produits laitiers est, elle, en progression organique de 4,1 %, tirée par un effet volume de +4,8 %, mais pénalisée par un effet prix de -0,7 %. À cause d’un effet de change négatif, la part des autres produits laitiers dans le chiffre d’affaires total du groupe diminue pour atteindre 43,9 % des ventes contre 44,2 % en 2015. « Hors effets de change, cette activité progresse pour atteindre 45 % », précise Olivier de Sigalony.
Par zone géographique, la France souffre toujours. Le pays représentait fin 2016 29,7 % des ventes du groupe, contre 30,5 % en 2015 et 32,7 % en 2014. Avec un prix d’achat du lait à composition réelle de l’ordre de 299 euros les 1 000 litres l’an dernier (279 euros pour un lait 38/32) et dans un contexte de guerre des prix en grande distribution, « la France est notre pays le moins rentable », déplore Jean-Paul Torris. « Sa rentabilité est inférieure de moitié à celle du groupe », insiste Robert Brzusczak, directeur général délégué de Savencia Fromage & Dairy.
Le poids des autres pays hors Europe ne cesse de croître, pour atteindre 30,6 % en 2016 et passer pour la première fois devant la France. « Ceci s’explique par une baisse des prix en France et une forte croissance organique du marché international », souligne Olivier de Sigalony. Le marché européen (hors France) reste le premier contributeur au chiffre d’affaires du groupe, à hauteur de 39,7 %, même si son poids baisse de 0,4 point sur un an. Les effectifs sont quant à eux en croissance de 2,1 %, avec 19 307 salariés dans le monde, dont 7 929 en France.
Des produits à forte valeur ajoutée
« Ce bilan satisfaisant conforte notre stratégie », se félicite Jean-Paul Torris. Sur son activité fromagère, le groupe mise « sur des produits de spécialité, incopiables, avec des marques fortes. Des produits haut de gamme, à forte valeur ajoutée ». À grand renfort d’innovations, il se positionne sur la tendance du snacking, sur le marché français notamment, mais en particulier dans les autres pays du monde. Savencia a ainsi lancé l’an dernier son Mini Caprice & Go, un paquet de deux portions individuelles de Caprice des dieux. St Moret apéritif, la gamme de billes de fromage avec un cœur parfumé, vient également d’accueillir une quatrième saveur, piment doux. En Allemagne, elle espère séduire les enfants avec Tolle Rolle, un ruban de fromage à dérouler, et en Chine, avec une spécialité fromagère sur un bâtonnet. « En Égypte, le berlingot de fromage à tartiner Cheese to squeeze a fait un bon démarrage », s’enthousiasme le directeur général.
Le groupe revendique une stratégie « glocale », c’est-à-dire déployer des marques locales, propres à chaque pays, à partir d’un savoir-faire global. L’exemple le plus probant est celui d’Apérivrais, décliné en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie, en Suisse, au Royaume-Uni et au Japon avec des marques comme Bresso, Paturain ou AperiFresco. Même si le bio ne représente encore qu’une toute petite part des activités de Savencia, celui-ci complète de plus en plus son offre en produits issus de l’agriculture biologique, avec par exemple la création de la marque française de produits laitiers frais Byo essentiel. Les fromages traditionnels restent un élément clé du portefeuille du groupe, avec le lancement du Bresse bleu suprême en France, et le bon développement de la marque Ile de France à l’étranger.
De futures acquisitions à l’étude
« L’année 2017 s’annonce complexe et pleine de challenges pour nos équipes », conclut Jean-Paul Torris, citant un contexte géopolitique incertain, la forte volatilité des matières premières et la guerre des prix. « Nos priorités sont au développement de nos marques, à la recherche de valeur ajoutée et au renforcement de notre présence à l’étranger », précise-t-il. Le directeur général s’est aussi dit ouvert à d’éventuelles acquisitions. « Nous avons étudié des dossiers en 2016, mais n’en avons conclu aucun. Nous continuerons d’en étudier en 2017 », a-t-il répondu.
Un contexte mondial différent selon les ingrédients laitiers
« Les deux principaux composants du lait, la protéine et la matière grasse, ont connu des évolutions de prix différentes sur l’année 2016. La protéine a souffert d’une demande faible tandis que la matière grasse a bénéficié d’une forte demande, principalement au second semestre », analyse Robert Brzusczak, directeur général délégué de Savencia Fromage & Dairy. La poudre de lait écrémé s’est vendue 1 816 euros la tonne en moyenne sur l’année, un niveau de prix proche de 2015, quand elle était de 3 047 euros en 2013. Le beurre a pour sa part atteint 3 272 euros la tonne, avec une forte valorisation au second semestre, contre 3 015 euros en 2015. Même si la Russie reste le premier importateur mondial de beurre et de butter oil, la Chine a fortement augmenté ses importations, de l’ordre de 15 %.