Qui est responsable dans l'affaire Leclerc ?
Les professionnels des GMS étaient tout ouïe, à la réunion jeudi du Club Jean Caby. Une étude du cas Leclerc/Soviba était au programme. Cette affaire d'intoxication au steak haché Chantegril, qui a fait grand bruit à l'automne dernier, pose la question des responsabilités entre distributeur et fabricant liés par une MDD. L'avocat parisien Antoine de Brosses est venu expliquer les réalités juridiques du dossier. Sur le plan pénal, le problème apparaît complexe. Deux séries d'infractions sont théoriquement concevables. En matière de fraudes et falsifications, la seule existence d'une contamination ne suffit pas à caractériser l'infraction. « Une entreprise peut échapper à sa responsabilité en démontrant qu'elle n'a pas été de mauvaise foi et qu'elle a mis en place un autocontrôle suffisant», a-t-il affirmé.
Que dit le cahier des charges ?
Mais, le juge d'instruction devrait plutôt s'orienter vers les délits involontaires. Le tout est alors d'établir que la personne poursuivie n'a pas accompli de diligences normales, compte tenu de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont elle disposait.
Cela concerne tout autant le responsable qualité, le chef d'entreprise, le responsable de production.
Le cahier des charges imposé par Leclerc à son fournisseur Soviba constitue la pièce centrale du dossier. Prévoit-il suffisamment d'autocontrôles par rapport aux diligences normales ? Les révélations du magazine Linéairesde décembre permettent d'en douter. Selon nos confrères, l'analyse systématique chez Mc Key a permis de bloquer un lot contaminé provenant de chez Soviba. Une fois l'absence de diligences normales établie, à qui l'imputer ? Antoine de Brosses a réfuté deux idées fausses. « L'indication des coordonnées de l'entreprise responsable sur l'étiquetage du produit n'a aucune incidence sur la responsabilité pénale, a-t-il soutenu. Le distributeur ne peut être assimilé au producteur, comme en matière de responsabilité civile».
Le producteur est le premier responsable. C'est lui qui assure la première mise sur le marché. Le distributeur peut présenter une responsabilité supplémentaire, ou alternative, en cas de faute personnelle, par exemple de rupture de la chaîne du froid en GMS. « Un distributeur doit s'assurer de l'autocontrôle permanent de l'industriel, a-t-il ajouté. Les audits périodiques sont insuffisants. Cela peut, à mon avis, lui être reproché». Le juge pénal aura le dernier mot. Sachant qu'il n'obéit qu'à son intime conviction.