Paris prend-il en otage le budget européen ?
La France va devoir jouer à partir de cette semaine sur le double tableau de l’Organisation mondiale du commerce et du budget européen. Alors que Londres devait recevoir hier cinq grands acteurs de l’OMC (Brésil, Etats-Unis, Inde, Japon, UE), le pays membre était susceptible de bloquer les négociations sur le futur budget de l’UE devant reprendre en même temps à Bruxelles entre les vingt-cinq ministres des Affaires étrangères.
« La France ne peut pas bloquer l’OMC, mais elle peut bloquer les discussions sur les perspectives financières, et il y a une certaine coïncidence de calendrier entre la réunion de l’OMC à Hong Kong et le sommet européen de décembre », a déclaré vendredi dernier la commissaire européenne à l’Agriculture, Mariann Fischer Boel, citée par l’agence Ritzau lors d’un passage à Copenhague. Les acteurs de l’OMC et les pays membres de l’UE visent la même échéance de décembre pour la conférence ministérielle à Hong Kong et l’accord de l’Union sur le budget communautaire des années 2007 à 2013.
Mariann Fischer Boel craint que la France, mécontente de la dernière proposition du commissaire européen Peter Mandelson sur l’agriculture, n’exploite le blocage des négociations sur le futur budget européen pour parvenir à ses fins à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Aussi, ce dernier devait motiver hier les Vingt-cinq en mettant l’accent sur l’exigence européenne de concessions sur les produits industriels et les services de la part des partenaires des négociations multilatérales. Pascal Lamy, directeur de l’OMC, devait lui aussi être à Londres pour rappeler l’intérêt qu’ont les partenaires de l’OMC à réussir Hong Kong. L’ancien commissaire européen au Commerce espère que les cinq de Londres « commencent à passer au donnant-donnant et reviennent avec une meilleure idée des limites de chacun».
Dans sa nouvelle offre à l’OMC, Peter Mandelson propose des baisses de 35 % à 60 % des tarifs douaniers européens sur les produits agricoles, soit une réduction moyenne de 46 %. Le ministère français des Affaires étrangères attend que la Commission européenne apporte la démonstration qu’elle n’envoit pas l’Union vers une nouvelle réforme de la PAC. Jusqu’alors, Mariann Fischer Boel s’est contentée de l’affirmer.
Hier à Bruxelles, la présidence britannique de l’UE devait produire un premier document très général « afin d’identifier les questions à résoudre », en vue d’un accord budgétaire. Selon un diplomate de haut rang, ce texte a déjà été « substantiellement critiqué » lors d’une réunion jeudi dernier des ambassadeurs des 25, car il « minimise le degré de consensus atteint en juin par la présidence luxembourgeoise ».