Mieux prévenir la contamination par les huiles minérales
Aucune réglementation spécifique n’a encore été adoptée en France pour limiter les contaminations par les huiles minérales, mais les industriels sont encouragés à considérer certaines exigences. Explications.
La communication de Foodwatch en octobre 2015 avait fait grand bruit, en annonçant que certains aliments comme le riz, le couscous ou les lentilles conditionnés dans des emballages en carton étaient contaminés par des huiles minérales. Un problème bien connu des professionnels de l’emballage, puisqu’il a été mis en avant par les travaux du laboratoire cantonal de Zürich en 2009. Si plusieurs études ont été menées ou sont en cours sur le sujet, aucune réglementation européenne ou française n’a été définie spécifiquement sur les huiles minérales, au-delà du règlement (CE) n° 1935/2004 concernant les matériaux destinés à entrer au contact des denrées alimentaires.
La DGCCRF a donc saisi en mars 2015 l’Anses pour lui demander son expertise concernant la migration des composés d’huiles minérales dans les denrées alimentaires à partir des emballages en papiers et cartons recyclés, avis que l’agence a officiellement publié le 9 mai dernier. Compte tenu du caractère génotoxique et mutagène de certains hydrocarbures aromatiques d’huiles minérales (Moah), l’un des composants des huiles minérales, « il est nécessaire, en priorité, de réduire la contamination des denrées alimentaires par ces composés », conclut l’Anses.
Limite de 0,5 mg/kg
En Allemagne, l’Institut fédéral d’évaluation des risques (BfR) s’est lui aussi penché sur cette problématique. Il travaille depuis 2011 à fixer des teneurs maximales en huiles minérales dans les matériaux en contact avec les aliments. Dans la version la plus récente, l’institut propose de fixer une limite de 6 mg de Moah par kilogramme de papier-carton et une limite de migration dans les aliments de 0,5 mg/kg, soit le seuil de détection de ces composés.
Pour mieux mettre en évidence la contamination des aliments de façon indirecte par les huiles minérales, le Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE) a construit des abaques permettant de prédire pour une concentration initiale en huiles minérales dans l’emballage, leur durée de transfert dans l’aliment à une température donnée. « Avec cet outil, nous pouvons accompagner les industriels dans la conception de leurs emballages pour prédire les contaminations dans les aliments », fait savoir Jean-Mario Julien, ingénieur R&D au LNE.
Des solutions pour protéger les aliments
À la suite de l’alerte de Foodwatch, plusieurs distributeurs (E.Leclerc, Carrefour, Lidl, Intermarché, Système U et Casino) ont rapidement annoncé qu’ils prendraient des mesures pour lutter contre la contamination de leurs produits, sur la base des limites fixées par le projet allemand. « L’utilisation de carton recyclé peut-être à l’origine d’une migration vers l’aliment du fait des encres d’impression de certains journaux contenant des huiles minérales », explique Noël Mangin, coordinateur du Comité français de l’emballage papier carton (Cofepac). « Des solutions sont envisageables pour limiter les éventuelles contaminations : avoir recours à des cartons vierges, utiliser des “ barrières ”, soit directement sur le matériau soit à l’aide d’un sachet, ou encore utiliser des absorbeurs de ces huiles minérales. Mais il faut surtout assurer la maîtrise de la contamination de la boucle emballage », complète-t-il.