« Le poivre et l'or noir »
A l’encontre du « triomphe de l’économie du virtuel », en ces temps de « dématérialisation de nos modes de vie », la flambée des matières premières rappelle à l’ordre les théoriciens : nous devons manger et fournir de l’énergie dans un environnement marqué par la rareté et les conséquences climatiques, jubile Philippe Chalmin en introduction de son nouveau livre, « Le poivre et l’or noir ». Professeur d’histoire économique, le chroniqueur des marchés mondiaux, directeur du rapport Cyclope, démontre au fil des pages à quel point les matières premières restent « essentielles, « premières » au sens le plus propre du mot ». Les textes réunis dans cet ouvrage ont pour la plupart été publiés dans « Le Monde » et son supplément « Économie ». Ce sont des morceaux choisis, « les plus représentatifs de ce monde passionnant », avertit l’auteur, fluides à la lecture et étoffés de marques d’érudition. Du poivre aux déchets en passant par le fret maritime et l’éthanol, les matières premières sont avant tout instables, ce qui a conduit à développer des instruments financiers et à les rebaptiser « commodities ». Par les enjeux qu’elles ont toujours représentés, elles sont des grilles de lecture de la complexité du monde. Elles sont objets de conquêtes et de déconvenues, comme celle des Espagnols qui trouvèrent dans le trésor de Montezuma, à Mexico des fèves de cacao en place de l’or convoité .
Aventure, inconscience, paris, manipulation, tout cela réuni dans une seule histoire, celle d’Amaranth, ce « hedge fund » énergétique fondé en septembre 2000 avec des anciens d’Enron. En résumé, un jeune Canadien, Brian Hunter, spécialisé dans le gaz naturel, fait gagner à la société plus d’un milliard de dollars en 2005 en jouant l’écart entre les positions rapprochées et éloignées. Il lui fit perdre quelque 6 milliards à la fin 2006 en usant de la même stratégie. « On dit que Brian Hunter avait rêvé de pousser le gaz naturel américain à 25 dollars ! » Philippe Chalmin en tire une leçon de sagesse sous la forme de ce vieil adage : « Le physique a toujours raison ».
« Le poivre et l'or noir, l'extraordinaire épopée des matières premières » de Philippe Chalmin. 144 pages Format 140x216cm. 14 euros.