Lait biologique : Interview de Marc Belhomme, Triballat nNyal« L'essentiel des conversions reste à venir »
Les acteurs du bio doivent se montrer responsables, en n'incitant les producteurs laitiers à la conversion que pour couvrir des besoins réels.
des relations agricoles de
Triballat Noyal
En 2015, la collecte de lait de vache bio a de nouveau augmenté, tandis que le niveau de prix du lait payé au producteur restait inférieur à celui de 2014. Les deux phénomènes sont-ils liés ?
Marc Belhomme - Non. Aujourd'hui, en France, chacun des acteurs du bio a un système de paiement spécifique du lait. Prenons notre cas. En 2014, le prix du lait conventionnel était à la hausse du fait du manque de matière première au niveau international. Nous l'avons payé à nos producteurs 370 euros pour 1 000 litres contre 345 euros en 2013. Afin de maintenir un écart de prix incitatif pour le lait bio, nous l'avons augmenté de 25 euros. En 2014, nous avons donc payé notre lait bio 455 euros pour 1 000 litres contre 430 euros l'année précédente. En 2015, le prix du lait conventionnel a baissé. Nous sommes revenus à 440 euros pour 1 000 litres pour le lait bio, soit 134 euros pour 1 000 litres de plus que le lait conventionnel. Dans une situation comme celle de 2014, un différentiel de 85 à 90 euros pour 1 000 litres nous semble souhaitable.
Que penser de l'accélération du rythme des conversions en bio ?
M. B. - On raisonne au niveau international pour le lait conventionnel, mais il faut penser européen pour le lait bio. Or, l'Allemagne a baissé son prix du lait bio en 2015 par rapport à 2014. Ses besoins actuels et futurs semblent donc s'accorder avec la collecte et les conversions engagées. Toutefois, la prudence s'impose quant à l'augmentation de la production européenne, mais aussi française. Entre 2000 et 2006, la France est devenue excédentaire en lait bio suite à des conversions nombreuses liées à une prime à la conversion incitative. Aujourd'hui, l'incitation vient de l'écart de prix entre le lait bio et le lait conventionnel. Pour l'heure, nous connaissons au mieux les conversions de 2015. L'essentiel reste à venir. Il faut espérer que le marché pourra absorber les volumes produits.
Quel rôle jouent les transformateurs dans la progression de la collecte ?
M. B. - Il est de la responsabilité de chacun des acteurs de ne collecter que le lait dont il a besoin. Cela nécessite d'avoir une vision sur le marché que tous n'ont pas forcément. Il ne faut engager des producteurs en conversion que sur des besoins réels. Chez Triballat Noyal, nous ne donnons plus de primes à la conversion en lait de vache bio depuis 2009. Mais d'autres entreprises ont recommencé à en donner. Pour notre part, nous avons d'importants projets de conversion de producteurs de lait de vache en lait de chèvre bio.
Comment Triballat Noyal s'est-il diversifié dans la transformation de lait de brebis et de chèvre bio ?
M. B. - Nous avons démarré le lait de brebis en 1999 en Ille-et-Vilaine avant de racheter une entreprise en Lozère quelques mois plus tard. L'essentiel du développement de la production est venu de la Lozère et de l'Aveyron. Nous sommes passés de 500 000 litres à 6 millions de litres de lait. Nous allons collecter 48 producteurs en 2016. Pour le lait de chèvre, nous avons commencé récemment, lors de la crise de la filière, en demandant à nos producteurs s'ils voulaient se convertir en bio. En 2016, nous en collecterons quatre en lait de chèvre, dans le Centre et en Bretagne, mais aussi des producteurs d'autres entreprises qui n'ont pas le savoir-faire pour valoriser le lait bio.