La viande bovine revient sur la table de négociation UE-Mercosur
Relier les négociations bilatérales avec le Mercosur et multilatérales de l’OMC, constituer une « poche unique » par production commercialisée ; tel sera le fil directeur de la Commission européenne dans ses prochaines discussions techniques avec les représentants du Brésil, de l’Argentine, de l’Uruguay et du Paraguay. Deux rendez-vous ont été pris lors de la conférence ministérielle du 2 septembre dernier à Bruxelles : le premier en novembre, le second en février prochain.
Priorité est donnée à l’OMC des deux côtés de l’Atlantique. A cet égard, la prochaine conférence ministérielle UE-Mercosur devra se tenir au printemps 2007, soit bien après Hongkong. Il n’y a pas de date butoir ; seul un « souhait » de s’entendre d’ici à juillet 2006. C’est une différence avec les précédents pourparlers de constitution d’une zone de libre-échange entre les deux blocs, qui ont échoué en octobre dernier.
Outre ces rendez-vous officiels, des « forums » devraient réunir les protagonistes, a-t-on appris au bureau bruxellois de l’UECBV (union européenne du commerce de bétail et viande). Ce qui donnera des chances à la filière viandes de s’exprimer.
La « poche unique » signifie pour la filière viande qu’elle ne paiera pas une deuxième fois à l’OMC ce qu’elle aura déjà cédé au guichet du Mercosur. Concrètement, un contingent consenti aux partenaires d’Amérique du Sud sera comptabilisé dans le calcul d’accès commercial évalué à l’échelon mondial. Et inversement, les accords préférentiels conclus à l’OMC viendront en déduction des contingents bilatéraux.
En posant de nouvelles bases de discussion, la Commission pourrait écraser sa proposition initiale sur les viandes, rédigée voilà un an et barbouillée ensuite d’« améliorations verbales » et d’une révision à la baisse. « Elle est probablement dépassée», considère Jean-Luc Mériaux, secrétaire général de l’UECBV.
L’accroissement des importations européennes à droit plein, c’est-à-dire hors de tout accès préférentiel, représente sans doute un nouveau paramètre. Ces importations au prix du marché, mesurées sur la période allant de juillet 2004 à juin 2005, ont progressé de 39 % par rapport aux douze mois précédents. Elles représentent 131 000 tonnes de morceaux désossés de quartiers arrières. Le Brésil en est la source, à 80 %.
Cet afflux supplémentaire de 36 000 tonnes représente presque autant que les réalisations contingentaires d’Amérique du Sud sous Hilton Beef. Il a été aspiré par les besoins communautaires qui ont fait grimper le prix intérieur, rendant le marché européen d’autant plus attractif que l’euro faisait bonne mine face au réal brésilien et au peso argentin. Les éleveurs d’Outre-Manche s’en sont rendus compte et manifestent leur mécontentement.
L’étude prospective à 2012 que la Commission a rendue publique cet été montre bien que le déficit des 25 va se creuser, attirant d’autant plus d’importations. Le rapport de cause à effet sera prouvé l’an prochain si le retour au marché des bovins britanniques fait faire une pose aux importations des pays tiers.
L’UECBV refuse de considérer l’augmentation des importations comme un fait accompli. Le commerce européen de la viande voit cet afflux comme une soudure palliant le déficit européen dans l’attente d’une relance des productions domestiques. Car à long terme, l’expansion de la demande mondiale devrait assagir le courant entre le Mercosur et l’UE. Au gré de la croissance de la consommation qu’anticipent l’OCDE et la FAO, d’autres pays seront susceptibles d’importer des quartiers arrières, peuvent espérer les éleveurs européens.