Fromages : les Français, peu attachés au label AOC

> Les fromages AOC ont une forte élasticité-prix, selon l'étude Inra.
Quarante-cinq fromages bénéficient en France de l'appellation d'origine protégée (AOP). Ce signe officiel permet de garantir l'origine et la qualité d'un produit. Pourtant seuls 23 % des Français reconnaissent le logo AOP, selon une enquête Ifop 2013 (Institut français d'opinion publique). Alors, y a t'il un intérêt pour les fabricants de fromages à demander ce label ? Trois chercheuses de l'Inra (Institut national de la recherche agronomique) de Toulouse ont ainsi étudié la perception des consommateurs des appellations d'originie contrôlée (AOC) fromagères et leurs atouts pour les producteurs. Leurs résultats ont été diffusés en décembre dans Inra Sciences sociales. « Globalement, les consommateurs ne sont pas très attachés au label AOC », concluent les auteures de l'article scientifique.
À partir des données d'achats en grandes et moyennes surfaces de Kantar Worldpanel, sur un échantillon représentatif de plus de 8 000 ménages, les scientifiques ont montré que les fromages AOC ont une forte élasticité-prix. C'est-à-dire « qu'en réaction à une hausse de prix, la baisse de la demande est plus forte pour les fromages AOC que pour les autres », détaille Sylvette Monier. Les acheteurs sont par exemple plus sensibles à la variation de prix d'un camembert AOC que d'un camembert non-AOC. Ce type de résultats peut s'expliquer par les innovations dont bénéficient parfois les fromages non-AOC ou par le fait qu'ils se différencient par leur marque. Cette généralité cache toutefois une certaine hétérogénéité entre les fromages AOC.
Ainsi, le roquefort présente une plus forte élasticité-prix que le comté ou le cantal. « Une promotion sur un roquefort va probablement attirer plus de demande que sur un cantal, car les consommateurs sont plus sensibles aux variations de prix du roquefort », note Sylvette Monier. Les données utilisées s'arrêtent toutefois en 2003. « Il peut y avoir quelques différences avec le marché actuel, qui est probablement plus diversifié », précise-t-elle.
Maintien de la filièreL'AOC jouerait cependant un rôle dans le maintien des entreprises fromagères et la pérennité de la filière. Malgré un coût de produc-tion plus important, lié aux exigences techniques du cahier des charges, les entreprises qui fabriquent des fromages AOC restent « économiquement efficaces », selon les chercheuses, « car leurs produits obtiennent une prime de prix sur le marché ».
Le label AOC contribuerait ainsi de manière significative à la survie des petites entreprises, même ” s'il ne montre aucun impact sur les grandes entreprises, qui bénéficient d'économies d'échelle et d'envergure. Les résultats montrent toutefois que le taux de survie d'une entreprise fortement engagée dans l'AOC reste inférieur à celui d'une entreprise de plus grande taille.
“ Une promo sur un roquefort va attirer plus que sur un cantal
Quant à l'impact de ce label sur le nombre d'exploitations laitières, cela dépend des zones de production. Les chercheuses notent néanmoins que « le nombre d'exploitations augmente uniquement dans les zones de montagne ».