FCO, fièvre du Nil : les maladies émergentes sous surveillance
Les Marchés : La fièvre catarrhale ovine a conquis l’Europe du nord… Quels sont les risques d’émergence de la fièvre de la vallée du Rift ou de la fièvre West Nile ?
Renaud Lancelot : L’introduction de la fièvre de la vallée du Rift (FVR) dans un nouveau territoire est liée à la présence du virus chez l’homme ou le ruminant infecté, et sa propagation dépend de l’abondance des hôtes et des moustiques susceptibles de transmettre la maladie. L’épidémie en cours de FCO, ou la récente épidémie de Chikungunya à Varenne, en Italie, rappelle que des maladies d’origine tropicale peuvent s’adapter aux conditions européennes. La FVR fait l’objet de beaucoup d’attention parce que de nombreux pays du sud de la Méditerranée importent des animaux sur pieds, essentiellement des ovins et des dromadaires, provenant de zones d’endémie ou d’épidémie de FVR.
Le risque concernant la fièvre West Nile (FWN) semble stable. Sa circulation est faible, sans crise épidémique. Cependant, des travaux récents effectués au Sénégal auraient révélé l’existence d’une souche virale jusqu’alors inconnue, dont le comportement vis-à-vis des vecteurs reste à élucider. Il est donc indispensable de maintenir et renforcer la surveillance sur le long terme dans les pays subsahariens et sur le pourtour de la Méditerranée pour la FVR et la FWN, ainsi que dans les grandes zones d’accueil d’oiseaux migrateurs pour la FWN pour donner des alertes aussi précoces que possible.
LM : Où en est-on des connaissances sur la FCO ?
R.L. :On connaît encore peu les vecteurs. Par contre, la modélisation dynamique de l’infection correspond assez bien à la diffusion du virus.
LM : A travers quelles recherches se distingue la République tchèque ?
R.L. :Les équipes d’Europe centrale, République tchèque entre autres, sont très actives sur les maladies transmises par les tiques. C’est le cas de l’encéphalite ou de la maladie de Lyme qui ont des réservoirs parmi les cervidés. Elles travaillent également beaucoup sur la fièvre West Nile et d’autres virus transmis par les moustiques.
Ces équipes ont besoin d’être soutenues et intégrées à la communauté scientifique internationale parce qu’elles mènent des travaux de très bonne qualité, complémentaires de ceux menés ailleurs en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. La santé - humaine et animale - est un bien public mondial !
LM : Y a-t-il des résultats particulièrement remarquable dans le dernier rapport d’Eden ?
R.L. : Après trois ans d’activités, nous voyons les premiers résultats de l’intégration de différentes disciplines scientifiques pour traiter des questions aussi complexes que les relations entre santé et environnement. Par exemple, nous comprenons mieux les raisons de la recrudescence ou de la diminution - selon les régions d’Europe - des encéphalites transmises par les tiques. Dans le cas des Pays Baltes, les facteurs sociaux et économiques sont de toute évidence plus importants que le réchauffement climatique, pourtant sensible dans cette région. Les situations sont en fait très contrastées selon les maladies, mais nous avons maintenant des éléments concrets pour penser que plusieurs des grandes questions posées au début du projet trouveront des réponses satisfaisantes. En caractérisant les écosystèmes à risques, en mettant en place des outils d’alerte précoce et de surveillance, on cerne la maladie pour mieux la combattre.