FAF : stratégie gagnante en Pays de la Loire
Les Marchés : Une question relative au coût élevé des matières premières était posée à la table ronde, « avantage ou inconvénient pour la fabrication d'aliments à la ferme ». Avez-vous la réponse ?
Jean-Bertrand Viot : Les participants ont donné leurs réponses qui convergeaient sur un point : que les matières premières soient chères ou pas chères, les « fafeurs » n'arrêteront pas de « fafer » pour vendre leurs céréales et acheter des aliments composés à la place. En Pays de la Loire, 90 % sont couverts dès la récolte, avec au moins 70 % du volume utilisé sur l'exploitation. Ils n'achètent vraiment que pour faire la soudure. Dans notre région, on n'achète pas un camion de blé chaque semaine. Nos prix de revient des céréales n'ont rien à voir avec les prix des céréales, surtout si elles sont chères. Il faut huit ans pour amortir le matériel de fabrication. Notre parc est globalement amorti. Il a de l'âge, mais il est bien entretenu. Pour ceux qui ont du neuf, l'investissement a été calculé en fonction du volume. Malgré une charge d'amortissement élevée, ils font de la marge. Les industriels ne peuvent pas se couvrir complètement à la récolte. Ils sont forcés de répercuter la hausse dans le prix de l'aliment. On en a vu à 230 euros/t et même plus. En face, la céréale s'achetait à 160 euros à la récolte et certains ont pu acheter le soja à 200 euros, avec l'aide de nos observateurs bien placés chez les opérateurs.
LM : Les industriels ont constaté une hausse des aliments achetés par les fafeurs dernièrement, ceux-ci ayant profité du fait que les prix des aliments ont augmenté avec un temps de retard.
J.-B. V. : Dans les Pays de la Loire, il n'y a pas eu de gros volumes achetés dans ce contexte. Certains ont dû acheter parce qu'ils n'avaient pas osé se couvrir en totalité à la récolte, vu les prix. Mais ils ne sont pas nombreux. Cela a eu une petite incidence entre le 1er septembre et le 15 novembre. Mais aujourd'hui, la récolte de maïs est très bonne. Nous avons l'avantage de récolter le grain humide. Il est récolté plus tôt, ce qui libère la parcelle pour semer autre chose et dispense du séchage - c'est écologique ça ! En plus, le maïs humide est un très bon aliment qui constitue jusqu'à 75 % de la ration du porc charcutier.
LM : L'un des domaines d'action de l'Airfaf est « une meilleure reconnaissance de la faf ». Auprès de qui ?
Jean-Bertrand Viot : Auprès des pouvoirs publics, la DGAL, les DSV… La faf est un phénomène considérable. D'après l'IFIP, elle concerne 45 % des porcs élevés en France. Sur le plan sanitaire, nous travaillons sur l'agrément des fafeurs qui fabriquent leurs mélanges médicamenteux. Cependant, nombreux sont ceux qui n'ont pas besoin d'intégrer des antibiotiques - j'en fais partie. Il faut s'en vanter. Les fafeurs ont globalement un très bon état sanitaire. Ils ont du matériel de récolte pointu permettant de récolter à point, des bons équipements de stockage. De plus, ils obtiennent une régularité de l'aliment qui profite aux porcs, à la différence de l'aliment composé dont la composition peut varier ; il faut avoir fafé plusieurs années pour s'en apercevoir. Les performances sont bonnes. Les contrôles ne nous posent pas de problème. Il va juste falloir prendre l'habitude d'enregistrer les données et stocker des échantillons, ce qui n'est pas sorcier. Nous défendons aussi l'intérêt économique et environnemental de la fabrication à la ferme. Dans la région, on va produire de plus en plus de céréales. Celles que nous produisons ne parcourent pas 100 km dans un sens et 100 km dans l'autre sous forme d'aliment. C'est du circuit court. Le maïs est une des cultures qui valorisent le mieux l'épandage d'élevage porcin.