Comment l'élevage pourrait bénéficier des biocarburants

A l'horizon 2008, sortiront de terre des usines ou de nouvelles unités de production de bio-éthanol dans la Marne, l'Aisne, l'Aube, la Seine-Maritime, le Bas-Rhin ainsi que dans les Pyrénées Atlantiques. Il y aura des usines de bio-diester sur la façade ouest, dans le Pas-de-Calais, la Seine-Maritime, la Loire-Atlantique, la Gironde, ainsi que dans l'Hérault, l'Oise, l'Aube... En sortiront des drèches de blé ou de maïs, des tourteaux de colza ou de tournesol ou d'autres coproduits pouvant associer des résidus de betterave sucrière, cela dépendra des process industriels. Le volume disponible en tourteaux de colza pourrait quadrupler. Il sera complété d'un bon quart de drèches de céréales dont la composition nutritionnelle est relativement proche. Ces matières premières riches en protéines sont substituables au tourteau de soja importé ou (partiellement) au blé. Aux Etats-Unis, les drèches de maïs obtenues par voie humide pour la production d'éthanol ou de Bourbon sont largement utilisées pour l'alimentation des bovins ou des volailles.
Le Céréopa (centre d'étude et de recherche sur l'économie et l'organisation des productions animales) pourrait délivrer dès la fin avril une première approche de l'offre qui sera disponible et dévoiler quelques perspectives de débouchés en fonction d'hypothèses de prix. Son président Olivier Lapierre, professeur à l'Ina-pg (institut national agronomique) s'affligerait de voir ces nouvelles ressources échapper à l'élevage (en 1992, on envisageait d'employer la pulpe de betterave comme fertilisant) ou qu'elles soient chargées à destination du Benelux.
De la Floride à la Champagne
« La logistique sera un élément déterminant», prévient l'économiste, se souvenant d'une simulation selon laquelle 25 % de variation du prix rendu d'une drèche de maïs déterminait l'intérêt ou le désintérêt des fabricants d'aliments. Il mentionne que l'amidonnier Amylum avait prévu, en construisant son usine de sirops dans la Somme, d'expédier ses co-produits par le train jusqu'en Bretagne. Il note que plusieurs projets industriels prennent place dans le Nord et le Nord-Est de la France. Les coproduits générés près de Rouen ou de Dunkerque sont susceptibles de prendre la voie de Rotterdam.
Les gisements qui vont apparaître dans l'Est prodigueront une abondance en protéines végétales qui profitait jusqu'à ce jour à la Bretagne. Olivier Lapierre pense à l'élevage laitier qui s'est développé en Floride autour de l'industrie des agrumes. Suivant cette idée, si demain des quotas se libéraient, il verrait bien quelques fermes industrielles s'installer en Champagne... en supposant que les populations locales soient prêtes à les accueillir.
Captées par les producteurs de lait
Les éleveurs profiteront peut-être davantage des nouvelles ressources que les fabricants d'aliments. Quelque 700 000 tonnes de tourteaux de colza (soit presque la production actuelle) sont susceptibles d'être captées par les producteurs de lait qui fabriquent leur aliment à la ferme. Des démonstrations de substitution au tourteau de soja sur la ferme de l'Ina-pg à Grignon en ont convaincu plus d'un.
Un problème se pose : les volumes de tourteaux de colza seront vraiment importants. Leur plein-emploi suppose que les fabricants dépassent les seuils d'incorporation actuels. Il appartient aux firmes services et aux industriels de trouver des solutions.