Bœuf : le Brésil fait son marché en Argentine
L'abatteur brésilien Friboi a acquis début septembre le contrôle du plus important exportateur argentin de viande bovine, Swift Armour, se hissant ainsi au premier rang des exportateurs mondiaux de viande bovine. « Le nouveau monde part à la conquête de l'ancien monde», commente René Laporte, un consultant bien connu dans le secteur de la viande, surpris de la rapidité avec laquelle le Brésil, pays émergent il y a seulement 5 ans sur le marché international du boeuf, a éclipsé l'ancestrale Argentine. Après un long déclin, l'industrie argentine de la viande se développe à nouveau, mais elle reste loin de la place qu'elle occupait il y a vingt ans, constate l'observateur.
Un importateur français de viandes pense que Friboi a fait le plein au Brésil, tandis que le secteur argentin de la viande reste en phase de restructuration. Ainsi, l'Américain Cargill a acquis en 2004 le leader argentin de la viande congelée, Finexcor, tandis que qu'un investisseur britannique lié au distributeur Tesco s'est emparé de AB&P, un fleuron national sur le plan qualitatif. D'autre part, les industriels brésiliens de la viande ont de l'argent à investir.
Par cette acquisition, Friboi renforce considérablement son pouvoir de négociation et déclare viser le marché japonais. Ce n'est pas tout. Le Brésilien va pouvoir puiser dans un cheptel d'origine européenne, grâce au climat tempéré de l'Argentine, alors que le zébu indien domine largement au Brésil. L'extension de son périmètre est pour lui une assurance sur les risques sanitaires. Enfin, l'Argentine offre à ses exportateurs un contingent «Hilton Beef» de viandes bovines fraîches pour l'Union européenne de 28 000 tonnes ; un gâteau plus conséquent à se partager que les 5 000 tonnes du contingent brésilien.
Pour autant, cette acquisition est un défi pour Friboi qui va devoir faire tourner une entreprise dans une économie cahotante. Les conflits sociaux intervenus chez Finexcor (Cargill) cette année donnent un exemple peu encourageant.
Friboi représente près d'un dixième de la capacité d'abattage du Brésil, avec plus de 10 000 têtes par jour, et près du quart de la valeur exportée. Il détiendrait 85,3 % de Swift de source financière.