Avec Inalca, le Brésil met un pied en Europe
Le leader italien de la viande, Inalca, filiale de Cremonini, va changer de dimension l'an prochain à la faveur d'une alliance entre le groupe italien et le Brésilien JBS, numéro un mondial de la viande, également connu sous le nom Friboi. Schématiquement, JBS fait doubler le capital d'un ensemble constitué par les deux branches production de Cremonini : Inalca et Montana. La première abat 3 500 bovins par jour et produit annuellement 260 000 tonnes de viande sous toutes formes, dont 90 000 tonnes de hamburgers. La seconde se concentre sur les produits finis à base de viande. Objectif des deux groupes : faire grossir Inalca, tant en Europe que dans le reste du monde, par la voie des acquisitions.
Hormis ses 6 usines en Italie, Inalca est implanté dans le reste de l'Europe, en Russie et en Afrique à travers 9 plateformes. Cela intéresse JBS-Friboi qui, hormis ses 23 usines au Brésil, en possède 6 en Argentine, 8 aux Etats-Unis et 4 en Australie. JBS est l'incontestable leader mondial de la viande bovine, avec 51 800 têtes abattues par jour, et le n°3 de la viande porcine avec 47 900 porcs par jour. Après avoir acquis l'Américain Swift Foods, il s'attaque à l'Europe. Il accède, à travers Inalca, à tous les grands circuits de distribution de viande, de plus en plus concentrés, et par Montana à une forte capacité de valeur ajoutée.
Et en France ?
Cremonini se félicite d'acquérir un accès privilégié aux principales sources mondiales de viande bovine et un contrôle renforcé de sa chaîne d'approvisionnements. Le groupe estime aussi gagner une meilleure reconnaissance des marchés financiers. Cette alliance italiano-brésilienne montre que les opérateurs européens de la viande bovine n'échappent pas à l'accélération mondiale de la concentration.
Elle confirme le pronostic concernant l'Europe d'Alain Loustanau, vice-président du Sniv, à la dernière assemblée générale du syndicat : « le mouvement de concentration va s'accélérer », et rappelle aux Français qu'ils manquent de leaders européens. Elle donne encore plus de crédit à l'invite du président Jean-Paul Bigard aux industriels de la viande : « Je vous propose de travailler ensemble à une vraie politique industrielle pour la filière bovine. Une politique qui ne soit pas seulement agricole, mais aussi agroalimentaire. » De son côté, le directeur général d'Unigrains, Philippe Ducroquet, avait prévenu à la même AG qu'il fallait rationaliser le secteur bovin, consolider l'industrie et « s'approprier la culture du profit ». Au risque que les Brésiliens ne rationalisent à leur place.