Vincent Chatellier
Les Marchés Hebdo : Où et dans quelles proportions s’exprime la croissance de la demande de produits laitiers dans le monde ?
Vincent Chatellier : Après avoir augmenté de 126 milliards de litres entre 2000 et 2010 (+ 21 %), la consommation mondiale de lait devrait progresser de 150 milliards de litres (+ 22 %) sur 2010-2020, selon les estimations de la FAO et de l’OCDE. Cette demande supplémentaire s’opérera surtout en Asie du Sud-Est et, dans une moindre mesure, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud et en Afrique du Nord. En 2010, les pays en développement absorbaient déjà, sur le plan mondial, 85 % de la poudre de lait entier, 66 % des produits laitiers frais, 63 % du beurre, 49 % de la poudre de lait écrémé, mais seulement 23 % des fromages. Ils resteront les principaux moteurs de la croissance de la demande.
LMH : L’Europe pourra-t-elle augmenter sa consommation ?
V. C. : Les travaux prospectifs de la direction générale de l’Agriculture et du Développement rural (DG-Agri) prévoient dans l’UE à 27 une hausse de la consommation (en volume) de fromages (+ 9 %), de poudre de lait entier (+ 9 %) et même de beurre (+ 1 %). Mais cette augmentation est liée à la croissance démographique, pas à la consommation par habitant. Sauf pour les fromages, dont les Européens de l’UE-27 consommeront 17,3 kg par an en 2020 contre 16,2 kg par an en 2010.
LMH : Après la sortie des quotas laitiers, la France aura-t-elle les capacités à se développer ?
V. C. : La France restera un grand pays laitier, comme l’Allemagne. Dans les vingt prochaines années, elle pourrait produire 4 à 5 milliards de litres supplémentaires, moyennant des choix dans l’affectation des sols. Mais le prix de vente des céréales ne doit pas être trop élevé et les entreprises laitières doivent poursuivre leur restructuration et développement pour être plus performantes à l’exportation, en particulier en fromage. Ailleurs en Europe, l’Espagne, l’Italie, le Royaume-Uni sont déjà déficitaires en lait, les Pays-Bas sont proches de la saturation et l’Irlande, très ambitieuse, part d’un volume de 5,5 milliards de litres, à peine plus important que celui collecté en Bretagne.