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Vers une renaissance de l’économie contractuelle en agriculture ?

Équilibrer les relations entre producteurs et acheteurs était l’objectif du législateur dans les années soixante. C’est l’ambition renouvelée du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMAP), examiné par les députés cette semaine. Retrospective.
Le défi imparti à l’agriculture à la sortie des années de guerre de couvrir les besoins alimentaires de l’Europe était accompagné de la volonté de valoriser le travail des agriculteurs, acteurs sociaux majeurs. C’est dans ce contexte que la loi d’orientation agricole du 5 août 1960 jetait les prémisses d’une relation contractuelle stable entre producteur et acheteur, surveillée par les pouvoirs publics, mais optionnelle.
La loi du 6 juillet 1964 implique ainsi les organisations représentatives dans le processus de contractualisation en leur permettant d’établir des accords interprofessionnels à long terme. Selon l’article 2 de cette loi, « l’accord interprofessionnel a pour but, simultanément : de développer les débouchés (…), d’améliorer la qualité des produits, de régulariser les prix, de fixer les conditions générales de l’équilibre du marché et du déroulement des transactions ». De ces accords découlent des contrats-types qui peuvent être rendus obligatoires par le mécanisme de l’homologation et de l’extension par arrêté interministériel. Ce régime est toujours en vigueur et se trouve aujourd’hui codifié aux articles L. 631-1 à L. 631-23 du code rural.
Créées par les lois des 12 juillet 1974 (économie laitière) et 10 juillet 1975 (autres filières), les organisations interprofessionnelles deviennent les actrices majeures de la contractualisation. Elles reçoivent notamment pour mission d’élaborer les contrats-types dont la violation pourra être sanctionnée, à la demande de l’organisation concernée, par la nullité du contrat, outre la réparation du préjudice. Pourtant, seules les interprofessions courtes s’engagent dans cette voie, vite contrariée par les règles de concurrence communautaire qui lui suppriment sa principale raison d’être : la discussion du prix, d’où une désuétude de la politique contractuelle, qu’elle se moule dans le cadre des articles L.621-1 et suivants ou L.632-1 et suivants du code rural.

Ce qui a changé : le volontarisme de l’État

Aujourd’hui, le recours à un contrat écrit entre le producteur ou l’organisation de producteurs et l’acheteur est à nouveau encouragé par le projet de LMAP, qui rend la proposition d’un tel contrat obligatoire lorsqu’un accord interprofessionnel étendu ou, à défaut, un décret en Conseil d’État l’aura prévu, sous peine de s’exposer à la nullité du contrat et à une amende administrative de 75 000 euros. Le contrat, d’une durée minimale de un à cinq ans, devra comporter des engagements sur les volumes, sur les modalités de détermination du prix, de collecte et de livraison ainsi que sur les conditions de son renouvellement. Il devra en outre inclure les clauses-types qui auront été rendues obligatoires dans les mêmes conditions.
Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche rénove les outils existant dans le code rural, sans y apporter d’innovation fondamentale. Ce qui change, c’est le volontarisme affirmé de l’État, qui peut aller jusqu’à une économie administrée. Mais on peut craindre qu’il se heurte aux mêmes difficultés, liées à la complexité de mise en œuvre du dispositif dans des filières diversifiées comportant de nombreux intermédiaires entre le producteur et le consommateur. Surtout, on ne peut manquer de s’interroger sur sa compatibilité avec le droit de la concurrence communautaire, qui a déjà eu raison des précédentes tentatives de régulation des prix et des volumes.
Rédaction Réussir

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