Projet de loi OGM : le débat démarre enfin au Sénat
Le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés présenté par le ministre de l’écologie et du développement durable Jean-Louis Borloo est examiné à partir de ce matin au Sénat. On sait que ce projet porte sur trois piliers : la réforme de l’expertise (avec la création d’une Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés), la responsabilité (notamment de l’exploitant agricole) et la transparence (localisation des plantations OGM jusqu’à la parcelle). L’article 5, qui promet de vifs débats, prévoit un régime de responsabilité de plein droit pour le préjudice économique qui pourrait résulter de la présence accidentelle d’OGM dans des cultures conventionnelles et biologiques. Tout exploitant mettant en culture des organismes génétiquement modifiés devra en effet souscrire une garantie financière afin de se prémunir contre ce risque. « L’assurance relève du système privé, si aucun assureur ne propose de produit, ce ne sera pas possible de cultiver », avait indiqué en décembre dernier Nathalie Kosciusko-Morizet.
Lors d’une conférence de presse commune, jeudi dernier (lire notre édition d’hier), les producteurs français de cultures végétales s’étaient dits prêts à envisager la création d’un fonds de garantie abondé par le monde agricole, dans l’attente que les assureurs ne prennent en charge le « risque » OGM. « On a déjà suggéré ce fonds il y a deux ans », a rappellé Christophe Terrain la semaine dernière. Depuis la MSA (mutualité sociale agricole, Ndlr), on sait bien mutualiser dans le monde agricole ». Les céréaliers français ont cependant estimé que ce fonds ne pouvait être que provisoire « en attente de références » sur les questions de la dissémination. « La question de la coexistence nous préoccupe, a cependant reconnu le président de l’AGPM (maïsiculteurs). Il ne faut pas que l’on puisse soupçonner le voisin de vouloir bénéficier du fonds ».
MON 810 : le plaidoyer d’Accoyer
Le débat promet en tous cas d’être agité, si l’on en croit l’entretien accordé par Bernard Accoyer, le président de l’Assemblée nationale (où se poursuivra le débat en avril) au Dauphiné Libéré. Dans le quotidien régional, Bernard Accoyer s’est insurgé la semaine dernière contre l’activation de la clause de sauvegarde sur le MON 810. Le quatrième personnage de l’Etat, médecin de profession s’exprime à ce titre. Florilège : « ce dossier laisse se développer de grandes peurs ainsi que cela été le cas pour de grandes découvertes ou de grandes inventions. » Ces craintes ne doivent pas être des motifs pour diaboliser les OGM : « ils sont à l’origine d’avancées considérables dans les domaines prophylactiques ou sanitaires (…) Les OGM sont l’un des moyens incontournables pour répondre aux défis de l’humanité. Je veux dire qu’avec les méthodes passées de l’agriculture, il n’est pas possible de répondre à l’impératif – que j’espère partagé par tous – de nourrir correctement six milliards d’hommes et de femmes en utilisant moins d’énergie, moins d’eau, moins de pesticides. »
Mais Bernard Accoyer voit dans cette décision un autre risque : celui de l’interdiction de l’exploitation commerciale du maïs transgénique et par voie de conséquence, celui de la recherche fondamentale sur les OGM : « c’est l’étape suivante pour tous ceux qui se réjouissent de la décision d’aujourd’hui. » Une décision que par ailleurs Bernard Accoyer réfute : « l’avis qui vient d’être donné est contesté par la plus grande partie des scientifiques de la haute autorité provisoire qui se sont désolidarisés des conclusions rendues par son président. Ils reconnaissent en outre avoir manqué de temps pour se livrer à une analyse complète du MON 810. »
Pour conclure, Bernard Accoyer ajoute : « voilà maintenant sept ans que les gouvernements tergiversent pour amener la question des OGM devant le Parlement. »