Préparer le terrain
Mariann Fischer Boel s’attendait-elle à ce que l’interview accordée au Financial Times le 30 décembre dernier soulève un tel tollé en France ? Après tout, peut-être est-elle sincère quand elle s’étonne des protestations que lui a adressées Dominique Bussereau. Peut-être estime-t-elle vraiment qu’elle ne fait qu’exprimer une opinion largement admise et engageant assez peu sa responsabilité en expliquant que « tout le monde » sait qu’il y aura « moins d’argent disponible» pour la Pac de l’après 2013 et qu’elle « pense» que l’on verra à l’avenir un nombre croissant d’agriculteurs à temps partiel « qui vivront à la campagne mais auront besoin de sources de revenus hors de l’agriculture » ? Mais à bien y réfléchir, cette hypothèse est très improbable. D’abord parce qu’en s’engageant sur le terrain du budget de la politique agricole commune, cette haute fonctionnaire sait très bien qu’elle s’aventure sur un dossier ne relevant pas de sa compétence, mais bien de celles des chefs d’États et de gouvernements. Elle n’ignore pas non plus ce que la formulation « d’agriculteurs à temps partiel » (« part-time farmers » en VO) peut avoir de choquant pour des êtres et des familles qui consacrent toute leur vie, parfois depuis des générations, aux métiers de la terre. Aussi est-il beaucoup plus vraisemblable que le propos de Mme Fischer Boel était réfléchi et délibéré. En langage diplomatique, cela s’appelle « préparer le terrain ». Les millions d’agriculteurs bulgares et roumains qui viennent d’entrer dans l’Europe apprécieront cette marque d’accueil à sa juste valeur.
L’ensemble de la rédaction se joint à moi pour vous souhaiter une très heureuse année 2007.