Pommes de terre des villes, du terroir et des champs
Mercredi dernier, le comité interprofessionnel de la pomme de terre (CNIPT) fêtait ses 30 ans, l’âge de la remise en question si l’on en croit Roger Couffin, président d’Adrien Stratégie, mis à contribution pour redynamiser l’offre. « On efface près de 20 ans de segmentation culinaire et on recommence », tel est en substance le message transmis par ce conseiller en stratégie, qui a déjà œuvré pour la filière fruits et légumes. « La segmentation sur les usages culinaires était intelligente, mais elle n’a pas réussi à relancer la consommation. Vous avez stabilisé la chute des ventes et multiplié par 1,8 les prix… peut-être un peu trop d’ailleurs. Aujourd’hui vous êtes confrontés à une nouvelle dégradation de la consommation en volume (ndlr : -0,6 % de quantités achetées en 2006-2007) et en valeur. Donc retour à la case départ », a-t-il asséné d’entrée. Contrairement à la pomme de terre, les pâtes et le riz, ses concurrents directs, ont su innover et adapter un prix compétitif, a-t-il poursuivi.
Pour revenir dans la course et retrouver la croissance en France, Adrien Stratégie propose au CNIPT d’oublier la segmentation pour passer à trois logiques de consommation : la pomme de terre des champs, le terroir et la pomme de terre des villes. A chaque logique, sa filière. La première reposerait sur deux ou trois pommes de terre polyvalentes, produites en grand volume par une chaîne épurée pour réduire au maximum le prix. La seconde, supportée par les producteurs et les négociants, se concentrerait sur une offre de qualité, mise en avant par des animations saisonnières. Et la dernière, initiée par les négociants, proposerait une offre adaptée aux populations citadines : peau mince, petit calibre, petits conditionnements, le tout porté par des marques.
Cap sur l’Espagne
« En gros vous proposez aux producteurs de produire moins cher. Mais a-t-on terminé tout le travail sur la qualité et la segmentation ? On pense qu’en termes de qualité, on a encore quelques marges de manœuvre », a réagi Patrick Trillon, président de l’Union des producteurs de pommes de terre (UNPT) à l’exposé de Roger Couffin. Les professionnels de chaque famille se réuniront au sein du CNIPT dans les prochaines semaines pour discuter de cette orientation stratégique qui ne semble pas particulièrement avoir déclenché l’enthousiasme la semaine dernière. En revanche, la venue de Roberto Ruiz, représentant neuf importateurs espagnols de pommes de terre réunis depuis l’an passé dans un club, a reçu un accueil plus chaleureux. Avec 668 000 t en 2006-2007 l’Espagne a absorbé 40 % des exportations françaises l’an passé. Les travaux menés au sein du club (qualité, adaptation des variétés à la segmentation culinaire) laissent supposer que ce marché peut encore progresser.