Pommes de terre biologiques : la France sans enthousiasme
En France, la pomme de terre bio est encore une culture confidentielle pratiquée sur une superficie de 736 hectares pour une surface totale consacrée à la culture de la pomme de terre (toutes catégories confondues, y compris les plants) de 156 000 hectares, soit 0,5 % par rapport à la production conventionnelle Les chiffres figurant dans cet article sont extraits d’une étude sur la pomme de terre bio parue dans notre confrère « La Pomme de terre française ». L’Allemagne, premier producteur de pomme de terre bio, lui consacre 10 fois plus de surface sur une superficie patatière de 276 000 hectares. Mais le record du rapport surfaces bio et conventionnelle est détenu par l’Autriche : 2 400 ha sur 22 200 soit près de 10 %. En fait, la France est, avec la Belgique et les Pays-Bas, parmi les plus faible producteurs relatifs de tubercules bio dans l’UE.
Les contraintes techniques seraient l’une des raisons du peu d’intérêt des exploitants français pour cette culture alors qu’elles ne semblent pas en avoir bloqué le développement chez d’autres partenaires. L’incertitude de la récolte due à la trop large variabilité des rendements allant de 15 à 30 tonnes/hectare, contre une moyenne en culture classique de l’ordre de 43,5 t en culture classique, constitue sans doute aussi un frein, mais c’est surtout sa fragilité sanitaire qui pénalise cette production par définition privée de traitements phytosanitaires modernes. Le traitement à la bouillie bordelaise qui constitue la méthode la plus employée par les agriculteurs bio pour lutter contre le mildiou a douloureusement révélé ses limites avec la récolte 2007 qui a été réduite de quelque 40 %. Qui plus est, les champs bios infestés faute de soins efficaces risquent de contaminer les champs traditionnels voisins.
Des résidus 1 000 fois plus dangereux
On peut aussi s’interroger sur l’apport qualitatif de la méthode bio par rapport aux traitements classiques en matière de résidus. Le CNIPT relate un test réalisé récemment par le magazine « Que Choisir » sur 20 échantillons de pommes de terre dont 6 bio. Ce test visait à déterminer le taux de produits de synthèse et de cuivre dans ces échantillons après les nombreux traitements rendus nécessaires, cette campagne, pour lutter contre l’épidémie de mildiou. 41 produits de synthèse (fongicides, insecticides et anti-germinatifs), ainsi qu’un fongicide naturel, le cuivre, ont été recherchés et le test n’a rien révélé d’anormal. Aucun résidu de produit de synthèse n’a été décelé, alors que le cuivre naturellement présent dans la pomme de terre a été retrouvé en quantité plus importante dans les tubercules bio du fait de l’emploi de la bouillie bordelaise.
Or, selon un expert scientifique de l’université d’Edimbourg, cité par le journal anglais Daily mail, le cuivre serait 1 000 fois plus toxique que les fongicides utilisés sur les pommes de terre non bio. C’est sans doute dans la recherche de variétés biologiques spécifiques avec comme principal critère la résistance au mildiou, que cette production trouvera le meilleur moyen de se protéger tout en respectant les cahiers des charges en matière de traitement. L’Inra y travaille.
