PNNS 2 : les industriels devront payer
Industriels et distributeurs devront-ils bientôt s'acquitter d'une cotisation pour alimenter un fonds national de la promotion et de la nutrition ? La menace est sérieuse. « L'obésité constitue un des défis majeurs de santé au XXIe siècle, et la France, avec 16 % d'enfants en surpoids, n'est pas épargnée» : le ministre de la Santé Xavier Bertrand avait donné le ton mi-janvier lors de ses vœux à la presse. Qu'on se le dise : la lutte contre l'obésité prend de l'ampleur en France et les industriels sont dans la ligne de mire du prochain PNNS (programme national nutrition santé). Si certains grands groupes comme Nestlé, Danone ou Uniq (Marie, St Hubert) ont déjà investi dans le développement de programmes nutritionnels, les PME vont également devoir s'y mettre rapidement. Lundi après-midi, Serge Hercberg, vice-président du comité de pilotage stratégique du programme, a présenté 136 propositions pour 2005-2008 contenues dans un rapport qui doit être remis ces jours-ci à Xavier Bertrand.
Ce dernier a annoncé le 13 janvier que le PNNS 2 serait officiellement lancé en mars, un peu avant la publication du décret sur les messages sanitaires dans les publicités alimentaires. D'ici là, les tractations vont aller bon train du côté des industriels et des associations de consommateurs pour influencer la décision du ministre. Car l'enjeu est de taille. Après la satisfaction sur le projet de décret qui impose un bandeau d'information nutritionnel de 7 % de l'espace publicitaire (au lieu des 20 % envisagés initialement), le rapport du comité de pilotage qui n'a pas été rendu public devrait faire l'effet d'une douche froide pour les industriels. Les associations de consommateurs, à l'inverse, se disent satisfaites. « Les propositions de Serge Hercberg correspondent à ce que nous avions demandé. Elles prévoient l'extension du champ d'action du PNNS et la mise en place de moyens via une cotisation portée sur les fabricants et sur les distributeurs (ndlr : en plus de la taxe sur la publicité). Certains produits pourraient être exemptés si des efforts sont faits pour améliorer leur qualité nutritionnelle », se félicite Olivier Andrault, chargé de mission agriculture et alimentation au sein d'UFC-Que Choisir, membre du comité de pilotage stratégique du PNNS.
L'association consumériste affirme aussi qu'elle soutiendra la proposition contenue dans le pré-rapport qui vise à instaurer un fonds national de la promotion de la nutrition financé par ces cotisations auxquelles s'ajouteraient par exemple celles de fabricants de consols de jeux et un éventuel abondement de l'État. Pour UFC-Que Choisir, ce fonds devrait se substituer à la fondation « Alimentation et équilibre » que l'Ania souhaite mettre en place.
Le projet annoncé depuis juin 2004 s'est récemment accéléré. La recherche de partenaires est lancée auprès des pouvoirs publics et des sociétés civiles qui devraient compter pour deux tiers dans la constitution de la fondation. L'Ania essaie de réunir un budget de 3 millions d’euros. L'objectif étant d'obtenir la reconnaissance d'utilité publique, le dépôt des statuts ne devrait pas intervenir avant septembre. « Nous y sommes opposés, nous voulons que l'ensemble des partenaires mette dans le pot commun», affirme Olivier Andrault. A l'exception des producteurs et transformateurs de fruits et légumes.
Parmi les 136 propositions du rapport, UFC-Que Choisir se félicite de mesures visant à améliorer l'accessibilité des fruits et légumes : baisse des charges sociales sur la main-d’œuvre, meilleure présentation des fruits et légumes chez les distributeurs, augmentation du nombre de distributeurs automatiques de fruits et légumes dans les lieux publics, baisse du prix des fruits et légumes en restauration collective, stimulation de l'innovation dans le prêt à l'emploi. Autre point positif pour les consommateurs : apparaît l'idée d'un logo sur les meilleurs produits au niveau nutritionnel réapparaît. Enfin, pour que le PNNS 2 ait une meilleure cohérence que le PNNS 1, dont l'éparpillement des mesures a considérablement réduit l'effet, Serge Hercberg propose une conduite interministérielle du programme, dirigée par un monsieur ou une madame PNNS.
Enfin, parce que l'idée n'est pas de tenir à la gorge les petites entreprises, le comité de pilotage incite Xavier Bertrand à mettre en place un soutien technologique auprès de la recherche et développement des PME. « Nous soutenons fortement toutes ces propositions », tient à souligner Olivier Andrault d'UFC Que Choisir.