« Nous travaillons avec le secteur porcin pour restructurer l'offre »

Stéphane Layani, président-directeur général de la Semmaris.
Les Marchés Hebdo : Comment caractériseriezvous l'année 2013 du Min de Rungis ?
Stéphane Layani : L'année 2013 a été celle de la confirmation de la stratégie de soutien du marché physique et du nouveau rôle des marchés de gros dans la distribution française. Cela a été une année très importante, marquée par la gastronomie. Le Min de Rungis a répondu à cette attente, puisque nous avons été désignés Cité de la gastronomie dès janvier 2013. C'est un secteur dans lequel nous avons investi avec le pavillon de la gastronomie. Le pavillon marche bien. Le marché de Rungis est de plus en plus reconnu comme la vraie centrale d'achats des restaurateurs et des petits commerçants. En termes de chiffres, nous avons gagné près de 4 000 nouveaux acheteurs (3 875 soit +0,26 % par rapport à 2012, ndlr) et le taux d'occupation a été très très fort à 93,31 % (1,093 million de m2 , ndlr). Les arrivages ont progressé de 7,8 % à 1,5 million de tonnes. Les chiffres retracent le fait que le président de Rungis est en symbiose avec les opérateurs. Du côté des investissements, nous avons commencé la rénovation des fruits et légumes pour 9 millions d'euros. Les travaux seront finis cet été.
LMH : La progression des arrivages ne reflète-t-elle pas surtout l'arrivée de Del Monte dans le secteur des fruits et légumes ?
S. L. : C'est le jeu du président d'animer un pôle de compétences. Les chiffres ne se suffisent pas à eux-mêmes. Si Rungis progresse en fruits et légumes, cela ne veut pas dire que la consommation progresse. Cela veut dire que nous prenons des parts de marché aux autres. L'augmentation du taux d'occupation du marché est tout aussi importante.
LMH : À l'inverse des fruits et légumes, les arrivages en produits carnés (-2,5 %), en produits traiteur et alimentation générale (-9,6 %) ont reculé. Comment l'expliquez-vous ?
S. L. : Les produits traiteur comprennent les produits surgelés qui ont souffert de l'affaire de la viande de cheval, mais les produits gastronomiques comme le foie gras, les truffes se sont bien portés et la demande a augmenté. Pour les produits carnés, le marché est plutôt stable. Il y a une crise du sous-secteur porc. Il ne va pas bien. Nous travaillons avec le secteur porcin pour restructurer l'offre.
LMH : Le bâtiment du secteur porcin devait d'ailleurs évoluer. Où en êtes-vous ?
S. L. : Nous y réfléchissons. Cela coûte cher. Il faut une offre modernisée et compétitive sur le marché. Nous ne sommes pas loin du but mais c'est compliqué. Il faut savoir que quand on investit à Rungis, on surperforme.
LMH : Les moyens financiers sont-ils un problème ?
S. L. : Mon souhait est d'aller vite dès que la concertation sera terminée. Je souhaite soumettre au conseil d'administration des investissements sur le secteur porcin et après nous pourrons débuter. La concertation sera vraisemblablement terminée à la fin de l'année et la décision d'investir sera prise début 2015.
LMH : Vous avez inauguré le nouveau bâtiment F5C dédié à la gastronomie fin 2013. Comment se sont passés les premiers mois ?
S. L. : L'activité du pavillon est plutôt concentrée sur le dernier semestre. Nous sommes sur une tendance très positive à deux chiffres. En janvier 2014, l'indice des arrivages en volume est passé à 110, par rapport à janvier 2013 à un indice 100. Il y a eu une augmentation de 10 % des volumes en un an. Sur février 2014, nous sommes à +12 % et en mars à +10 % (les activités du Delas et du E5 comprises, ndlr).
LMH : Où en est l'état d'avancement de la construction du bâtiment dédié aux produits biologiques ?
S. L. : L'idée a été validée en avril-mai 2013. Nous allons lancer la construction pour qu'il soit prêt fin 2015. Il y a déjà 3 ou 4 réservations, avec Pro Natura notamment. Le bâtiment aura une capacité de 6 ou 7 places. Les travaux n'ont pas encore commencé, car il faut passer par plein d'étapes avec le permis de construire, la maîtrise d'œuvre. J'espère qu'ils seront lancés début novembre 2014.
LMH : Dans votre feuille de route, vous évoquiez l'idée de développer davantage les produits transformés. Quels sont vos projets dans ce domaine ?
S. L. : Ma feuille de route comporte trois orientations: soutenir le marché physique, densifier les zones logistiques et trouver des relais de croissance. Concernant le marché physique, nous avons construit le bâtiment dédié à la gastronomie, nous rénovons les fruits et légumes, nous allons construire le bâtiment bio et bientôt le porc. Pour densifier les zones logistiques, l'idée était de recruter de nouveaux acteurs, comme Del Monte dans les fruits et légumes. Mais cela peut se faire sur tous les secteurs pour que les stocks conséquents de Rungis puissent être utilisés par des acteurs plus importants. Je soutiens aussi des actions sur le carreau des producteurs pour essayer d'annualiser beaucoup plus leurs activités. Le carreau est moins occupé l'hiver. Il serait alors possible d'y vendre des produits plus élaborés, comme du miel en provenance d'Île-de-France. Le carreau pourrait être capable d'assouvir ce besoin de produits locaux. Une étude est en train d'être réalisée avec le conseil régional et le Cervia entre autres pour connaître la faisabilité d'un tel projet. Si l'étude est positive, si l'activité peut porter sa propre activité commerciale, nous lancerons la démarche.
En 2013, la Semmaris (société gestionnaire du Min de Rungis) a réalisé un chiffre d'affaires (CA) de 97,1 millions d'euros (M€), en augmentation de 3,5 % par rapport à 2012. Son excedent brut d'exploitation s'est élevé à 39 M€, représentant 40 % du CA, et le résultat net s'est établi à 13,2 M€. Le marché de Rungis a, quant à lui, connu une année 2013 estimée « solide », soutenue par une fréquentation stable à 6,6 millions d'entrées, par un nombre d'acheteurs en hausse avec plus de 3 800 nouveaux acheteurs et des activités logistiques qui représentent désormais près de 47 % du CA global. Les ventes de 2012 ont atteint 8,4 Md€. Enfin, les arrivages sur le marché physique se sont situés à 1,478 Mt, en hausse de 7,8 %, soutenus par ceux de fruits et légumes qui ont augmenté de 13,6 %. Et sont estimés à plus de 1,1Mt les arrivages des activités logistiques.
LMH : Et votre développement à l'international ?
S. L. : Nous continuons. La fonction internationale a été auditée et le conseil d'administration nous a autorisés à continuer. Nous allons le faire dans deux directions : d'abord géographique, puis technique. Nous souhaitons coopérer avec les pays qui ont besoin d'un marché de gros, en envisageant une licence de la marque Rungis, sans pour autant exploiter un marché à l'étranger. Cela évitera les erreurs du passé. Nous pourrons faire cela sous forme de franchise ou de licence. Nous démarchons et rencontrons régulièrement des délégations des quatre coins du monde.