« Méditerra : les futurs agricoles et alimentaires en Méditerranée »

L’agriculture du sud de la Méditerranée a raté une occasion, celle de l’émergence d’une couche sociale moyenne solvable, regrette le sociologue Bertrand Hervieu, secrétaire général du Centre international de hautes études agronomiques méditerranéennes (CIHEAM). « Les centrales d’achat des supermarchés n’avaient pas de temps à perdre, elles se sont branchées sur le marché global ; les agriculteurs de l’intérieur ont été renvoyés à des marchés locaux insolvables », a-t-il commenté lors d’une présentation devant l’Association de la presse agricole (Afja) à l’occasion de la sortie du rapport annuel du CIHEAM, « Méditerra » dont il dirige la rédaction.

12 auteurs ont planché sur « les futurs agricoles et alimentaires en Méditerranée », plus de 60 experts ont été consultés. Il en ressort une vingtaine de propositions politiques et techniques, dont la recherche de convergences euro-méditerranéennes au sein des instances internationales comme l’OMC et la FAO, l’interdépendance de la PAC européenne du Bassin méditerranée afin de construire à moyen terme une politique agro-alimentaire et environnementale euro-méditerranéenne, le soutien de la mise en place d’agences nationales de sécurité des aliments, l’instauration d’un label méditerranéen, l’orientation des consommateurs vers les produits concernés et la « diète méditerranéenne ».

La présentation de ce rapport opposait Bertrand Hervieu à l’économiste Philippe Chalmin, directeur d’un autre rapport annuel, le Cyclope des matières premières.

L’un et l’autre n’ont pas été tendres avec les « bureaucraties onusiennes » (Chalmin) qui ont « dogmatisé le message de libre-échange » (Hervieu). « Il a fallu attendre 2008 pour ré-entendre la Banque mondiale préconiser la restauration de la priorité à l’agriculture », a protesté Bertrand Hervieu.

Philippe Chalmin a exprimé sa crainte de la perte de motivation des responsables européens. L’économiste a complété son point de vue dans son domaine, remarquant qu’il faut « être deux pour un mariage (or) l’Egypte est la première à snober nos céréales européennes en faveur des céréales d’Ukraine et des Etats-Unis. »