Max Havelaar ou les ambiguïtés du commerce équitable
Pour les détracteurs de Max Havelaar, l’approche des géants de la distribution constituerait une véritable menace. Ils en veulent pour preuve les déclarations du représentant des hypermarchés Leclerc, au moment même ou plusieurs syndicats dénonçaient la « féroce politique antisyndicale » inspirée par l’enseigne à ses magasins affiliés : « Le commerce équitable ne constitue qu’un marché émergent. Avec les volumes, les fournisseurs vont pouvoir écraser leurs coûts de production et nous pourrons ainsi augmenter nos marges ». Avec l’humain (salaires et protection sociale) pour variable d’ajustement ?
« Les différents types de distribution ne sont pas nécessairement incompatibles, car ils ne conviennent pas aux mêmes types de producteur, à petit producteur, petit magasin, à gros producteur, gros magasin », avoue un commerçant de l’équitable dont le chiffre d’affaires a été multiplié par vingt et un en cinq ans. Sous l’impulsion des businessmans du charity coffee », le commerce équitable a désormais muté en commerce de l’équitable, ce que regrette le père Van der Off (le fondateur de la marque Max Havelaar, Ndlr) : « Dès 1990, nous étions préoccupés par la tournure que prenait le mouvement dans d’autres pays La marque Max Havelaar est présente dans une vingtaine de pays dits « du Nord ». Sa dimension politique a été peu à peu édulcorée, puis évincée. »
Lidl bénéficie à son tour de l’image rassurante de Max Havelaar, alors qu’une campagne sans précédent est menée dans toute l’Europe autour du très révélateur Schwarz-Buch Lidl (livre noir) qui dénonce « les conditions de travail, un climat de peur parmi les salariés et des mesures répressives insupportables » dans ses magasins. Mais, pour Max Havelaar Allemagne -qui a vu son chiffre d’affaires progresser de 50 % pour atteindre 110 millions d’euros depuis l’arrivée de ses produits sur les rayons du distributeur à bas prix-, les critiques émises à propos du commerce équitable ne seraient pas recevables »