L'un, et l'autre
On le peint sous les traits les plus aimables : séducteur fascinant, enjôleur ondoyant, machiavel troublant, visionnaire inspiré, manipulateur d'âmes, menteur élégant ; trahissant ses promesses avec virtuosité, ne reniant jamais ses amis, pensant blanc le matin, disant noir le soir ; ambitieux ô combien, comblant de bonnes grâces ceux qui le servaient, mais impitoyable à qui se mettait en travers ; insolent de facilité, beau parleur, habile à la diatribe, mordant d'ironie, sarcastique pour le plaisir de tuer ; épouvanté par la mort, revenant au seuil de la tombe à une foi angoissée, après en avoir foulé au pied la morale toute sa vie. Bref, le personnage peut éblouir, la mort et le temps tamisant de surcroît les lumières les plus crues de ses portraits surexposés. Oui, Mozart était un être un peu compliqué. Génial, et insupportable. Or voici que certains, dans une sorte d'extase tétanisée, veulent parer l'un de nos récents contemporains de tous ces charmants défauts, suggérant par là qu'il possédait le même génie incandescent. Fichtre : tous ses dits et textes ne valent pas trois mesures de la Flûte, l'un a écrit 600 chefs d'œuvre, l'autre 110 propositions.