Loi Hamon : un recours différencié à la négociation collective
La loi no 2014-344 du 17 mars 2014, relative à la consommation, dite loi Hamon, ne traite pas que des droits des consommateurs. Elle modifie certaines dispositions du Code de commerce, spécialement en matière de pratiques commerciales ou prohibées, dont on sait que l'objectif premier, quoique souvent caché, n'est pas la protection des entreprises mais la réduction des prix. Sa relation aux accords professionnels ou interprofessionnels est à géométrie variable : elle y a recours ou au contraire les écarte selon une logique favorable aux objectifs de l'administration plus qu'à ceux des professionnels.
Les rabais permis en cas d'accord interprofessionnelL'article L.441-2-2 du Code de commerce interdit à tout acheteur, distributeur ou prestataire de services de bénéficier de remises, rabais et ristournes pour l'achat de fruits et légumes frais. Or, cette disposition a rapidement posé problème lorsqu'une demande de réduction du prix était formulée en raison d'une non-conformité de la livraison, qu'il s'agisse d'un manquement en volume ou en qualité. La DGCCRF a cru bon de considérer que toute demande de réfaction, y compris pour non-conformité, devait être assimilée à une demande de rabais, contraignant les opérateurs, dans un tel cas, à simuler un refus pur et simple de la marchandise non conforme et une annulation de la facture correspondante, immédiatement suivis d'une nouvelle commande correspondant à la marchandise réellement livrée en quantité et qualité.
Sans revenir sur l'analyse de l'administration, l'article 122 paragraphe 1 de la loi Hamon assouplit la prohibition en indiquant qu'un rabais pour non-conformité sera dorénavant possible si un accord interprofessionnel le prévoit et en précise les conditions. Il aurait été vraisemblablement préférable de simplement supprimer le mot « rabais » de la loi. Le renvoi à un accord interprofessionnel risque en effet de plonger l'interprofession des fruits et légumes frais dans un débat plus politique que technique, et de retarder considérablement la solution du problème. Rappelons que toute infraction à cette disposition est passible d'une amende administrative de 15 000 € pour une personne physique et de 75 000 € pour une personne morale, avec possibilité de doublement en cas de récidive dans les deux ans.
Délais de paiement : leur réduction facilitéeLa lutte contre les délais de paiement abusifs, ou simplement considérés comme trop longs, reste la règle, et leur raccourcissement doit être favorisé. C'est même l'un des objectifs forts du gouvernement. Le dixième alinéa de l'article L.441-6 du Code de commerce prévoit que les opérateurs peuvent conjointement décider de délais de paiement inférieurs aux délais légaux (60 jours fin de mois ou 45 jours date de facture) ou proposer un point de départ de ces délais différent du seuil légal, mais il soumettait jusqu'à présent une telle dérogation à la conclusion préalable d'accords professionnels étendus par décret. Afin de favoriser un raccourcissement contractuel, cette condition, sans doute trop lourde, est supprimée : la dérogation peut désormais être négociée directement entre les parties, les accords professionnels étendus par décret n'étant plus qu'éventuels, dans l'hypothèse où les professions concernées souhaiteraient imposer à tous les professionnels des délais dérogatoires.
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Mais attention : il ne s'agit là que de convenir de délais plus courts ! Un allongement des délais de paiement ne reste possible que dans le cadre de l'article L.443-1 4° du Code de commerce, c'est-à-dire en matière vitivinicole, pour l'achat de raisins ou de moûts destinés à l'élaboration de vins ainsi que de boissons alcooliques passibles de droits de circulations, et à condition qu'un accord interprofessionnel le prévoit. Encore la DGCCRF se montre-t-elle aujourd'hui particulièrement rétive à l'extension de tels accords.