L'inconnu de Bordeaux
Roland Feredj, l’ancien directeur du conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB), s’est trouvé une belle reconversion. Fort de son expérience du milieu viticole bordelais et d’une indépendance retrouvée, il distille désormais sa vision des forces et des faiblesses de l’organisation viticole française en général et bordelaise en particulier. Il en est déjà à son deuxième (court) essai sur ce thème. Après « OPA sur la viticulture », dans lequel il dénonçait l’emprise du contrôle de l’État sur le vignoble français, il livre ses réflexions sur le singularisme bordelais dans l’Inconnu de Bordeaux, chez le même éditeur, Féret. La brièveté du propos ne méritait peut-être pas la publication d’un livre, mais on ne se plaindra pas que des professionnels ou d’anciens professionnels enrichissent le débat agricole et agroalimentaire hors des structures traditionnelles de réflexion largement liées soit à des syndicats soit à des partis politiques. On appréciera donc la liberté de ton de Roland Feredj sur l’actuelle réorganisation de l’implication de l’État dans les affaires agricoles. « Elle repose sur trois idées qui se discutent : créer une gouvernance centralisée de l’ensemble des productions agricoles, l’agriculture étant appréhendée globalement ; confier la gestion de ce bloc à un équipage associé au sein d’un grand office et composé essentiellement de l’État et du syndicalisme agricole à vocation générale ; financer l’ensemble en mutualisant les ressources de toutes les filières pour deux excellentes raisons : l’État n’a plus d’argent et l’Europe ne veut plus payer. Pour ceux qui rêvaient de voir les grands vignobles français s’émanciper de la tutelle étatique, il semble qu’il faille encore attendre un peu. » L’essai vaut aussi pour quelques réflexions sur Bordeaux, « inépuisable sujet de conversation plutôt que de connaissance ». Le particularisme local, chacun a pu le constater avec la reconduction triomphale à la tête de la mairie d’Alain Juppé, personnage si controversé dans le milieu parisien. C’est cela aussi la complexité bordelaise.
L'inconnu de Bordeaux, Roland Feredj Editions Féret 58 pages, 12 euros