L’export de céréales est-il menacé en Europe ?
C’est devenue une tarte à la crème que de prétendre que les prix des céréales - qui se maintiennent depuis de nombreuses semaines à des prix élevés- vont rester ainsi tendus pour les prochaines années. Les tensions seront dues en premier lieu à la faiblesse des stocks mondiaux, mis en danger par une augmentation plus rapide de la consommation que de la production, notamment à cause de la demande liée aux biocarburants.
« Il est encore difficile d’évaluer le niveau de la demande en Europe » regrette Gert Jan van Noortwijk, courtier à Rotterdam (Allgrains) « parce que toutes les politiques nationales n’ont pas été encore arrêtées et que la Commission peut encore faire évoluer ses objectifs. Toutefois, si nous en restons sur les bases actuelles, il nous faudra en 2010 environ 21 millions de tonnes de maïs, soit 8 % de la production européenne. La situation sera encore plus tendue pour les carburants issus de blé puisqu’au rythme actuel, il nous faudra mobiliser 21,4 millions de tonnes de blé, soit 17 % environ de la production prévisible. Et ceci sur un schéma de développement moyen des biocarburants…»
Importer des biocarburants ?
Le courtier néerlandais ne trouve en plus que peu de motifs de croire en une remontée de stocks européens de grains stabilisés autour de 35 millions de tonnes en début de campagne. « Avec des importations contingentées à 11 millions de tonnes, une récolte de potentielle de 260 millions de tonnes, nous disposons donc d’une offre de 306 millions de tonnes. » Du côté des consommations, l’alimentation animale continuera, de façon stable, de prélever de 155 millions de tonnes environ sur ce disponible, tandis que dans le schéma median retenu les biocarburants pourraient prélever 104 millions de tonnes…
« Si nous souhaitons alors conserver un stock de début de campagne de 35 millions de tonnes, nous ne pourrons porter sur les marchés d’exports que 12 millions de tonnes de céréales… Alors que pour la campagne 2006-2007 nous étions déjà à 20 millions de tonnes cet automne… » Les calculettes ont beau travailler de tout leur soûl, les territoires ne sont pas extensibles et le contexte mondial guère rassurant non plus, puisque confronté aux mêmes problématiques de faiblesse des stocks de début de campagne. « Si la demande de grains progresse dans le monde, elle était de 1 541 tonnes en 2003-2004, 1 602 millions de tonnes en 2004-2005 et 1 614 millions de tonnes en 2005-2006, c’est clairement à cause du développement des biocarburants. Et l’Europe ne fait que commencer à en produire. »
Gert Jan van Noortwijk constate que l’Union européenne est en train de perdre sa capacité à exporter. La situation n’étant guère plus florissante pour les biodiesels, produits à base de colza, le courtier conclut : « Pour maintenir ses exportations, l’Union européenne sera très certainement contrainte d’importer… des biocarburants.»