Les meilleurs moyens de gérer la question OGM
Co-Extra touche à sa fin. Ce programme de recherche européen sur les moyens scientifiques, technologiques, économiques et juridiques de faire coexister les filières avec et sans OGM a débuté en avril 2005 et prendra fin en septembre prochain. Ses résultats ont été présentés à Paris la semaine passée en deux journées de conférences scientifiques de haut vol. Il met à la disposition des laboratoires, des entreprises et des centres de décision un arsenal d’outils : méthodes analytiques, d’évaluation diverses, d’aide à la décision, méthodes de ségrégation, de « bioconfinement » (isolement génétique au champ par la plante elle-même), toutes évaluées technologiquement et économiquement. Cet arsenal a été ordonné de façon à en faciliter l’usage, sous forme d’un « système d’aide à la décision ».
Plantons le décor. « D’une manière générale, les compagnies européennes n’ont pas encore été confrontées à la coexistence OGM/non OGM,lit-on dans le résumé des conférences, car la production européenne d’OGM est actuellement limitée et la plupart du temps, sinon complètement, utilisée en alimentation animale. Les produits dérivés pour animaux n’étant pas étiquetés, la coexistence n’est donc naturellement pas un problème. »
Les entreprises peu préparées
Avec la montée de la pression des productions génétiquement modifiées, la multiplication de transformations interdites en Europe, comment les entreprises vont-elles s’y prendre, combien cela leur coûtera-t-il ? Le seuil d’étiquetage communautaire de 0,9 % est intermédiaire entre ceux d’une gestion courante de la qualité et les traces admissibles de substances toxiques ou allergéniques. Pour éviter tout litige, le commerce des matières premières se base sur un seuil pratique compris entre un tiers et un dixième du seuil d’étiquetage. La traçabilité documentaire permet quasiment aux importateurs de se dispenser d’analyses en laboratoire. Ce seuil est aujourd’hui « relativement tenable sans surcoût », selon les rapporteurs du programme. Mais les entreprises, en particulier les PME, leur semblent peu préparées à la montée de la pression OGM. Les structures agraires d’Europe conditionnent fortement les possibilités de ségrégation des cultures ; la tendance à l’empilement des transformations génétiques dans les semences complique encore les choses.
Modèles informatiques
Des modèles informatiques ont été développés par Co-Extra pour évaluer la présence fortuite d’OGM et la probabilité de conformité avec un seuil donné, à chaque étape des filières, du champ à l’assiette. Ces modèles fonctionnent avec le seuil d’étiquetage à 0,9 % aussi bien qu’avec des seuils pratiques aux environs de 0,1 %. La simulation de gestion des filières (basé sur l’exemple de l’amidon de maïs) permet de comparer les diverses stratégies : déclassement automatique, élimination d’un lot suivant un lot OGM si l’analyse PCR PCR : réaction en chaîne de polymérase. indique une non-conformité. En employant des modèles de flux de gène en culture, il est possible d’estimer une présence fortuite en sortie de ferme, ce qui permet de déclasser automatiquement et d’économiser en analyses PCR. En matière d’échantillonnage, un logiciel statistique d’optimisation, Opacsa, intègre une fonction de coût pour trouver l’échantillonnage le moins cher et le plus fiable (grâce au « sous-échantillonnage »). Et un travail expérimental est en cours pour évaluer des plans de contrôle communs aux mycotoxines et aux OGM.
Malgré toutes ces avancées, les observateurs de Co-Extra considèrent que la coexistence n’est viable, en cas de forte pression en OGM, qu’à la condition d’une différenciation de prix. Or, « les produits dérivés d’animaux nourris aux OGM ne sont pas actuellement affichés comme tels et donc non valorisables », commente le résumé en français.
Enfin, à l’attention des laboratoires et des organismes d’accréditation, est proposé un logiciel d’évaluation des performances analytiques et un système d’aide à la décision, ainsi qu’une « puce à ADN » qui détecte simultanément différents OGM grâce à un « criblage multiplex ». À ce titre, Co-Extra regrette que les méthodes de criblage (par opposition aux méthodes spécifiques par transformation génétique) ne soient pas couvertes par la réglementation européenne, ce qui limite la productivité des analyses de routine.