Les industriels français ont toujours le Liban en tête
Quinze jours après la suspension des hostilités entre Israël et le Hezbollah, le Liban reste isolé par un strict blocus maritime et aérien. Les entreprises françaises, partenaires privilégiées de ce pays « ami », n'ont pourtant jamais cessé leurs relations commerciales avec leurs partenaires locaux.
Depuis le début du conflit, la mission économique française à Beyrouth continue son activité à effectif complet. A la question de savoir si les marchandises françaises parviennent jusqu'au Liban, Jean-Paul Depecker, le chef des services économiques pour le Proche-Orient basé dans la capitale libanaise, répond que le blocus maritime et aérien du port de Beyrouth empêche toute importation directe.
Néanmoins, ajoute-t-il, certains opérateurs ont mis en place depuis le début du conflit des importations via le port de Lattaquié (« Al Ladhiqiyya » en arabe, au nord de la Syrie) et par voie aérienne via la Jordanie. Des marchandises initialement détournées de Beyrouth et de nouvelles commandes en provenance d'industriels français comme Danone, Eurial poitouraine, Bongrain et Boursin sont concernées .
Des stocks de vins importants
L'activité de Lactalis et Bel, présents au Moyen-Orient dans des pays voisins (lire ci-dessous), ne semble pas vraiment affectée par la guerre entre le Liban et Israël. Gérard Boivin, p-dg du groupe Bel qui dispose d'une usine à Damas en Syrie, prône une attitude de prudence et d'attente sur le Moyen-Orient, zone qui reste stratégique pour le groupe. Pour l'heure «l es conséquences de la guerre au Liban sur les activités de Bel au Moyen orient et notamment nos activités d'exportations à partir de l'usine de Damas sont mineures», explique une porte-parole du groupe, aucune baisse de son activité ou de chiffre d'affaires n'ayant été observée.
A propos du poste des exportations françaises de vins et spiritueux, conséquentes vers le Liban (5,9 M Eur en 2003, après quatre années de croissance), le poste économique de Beyrouth précise que pour le moment, les importateurs libanais vivent sur stocks très importants constitués avant la guerre dans la perspective de la saison touristique.
Un bateau en route depuis le Brésil
Pour les fournisseurs agricoles du Liban, la période est pourtant difficile. Le commerce de bovins vivants vers cette destination traditionnellement importatrice, est actuellement interrompu. En début de conflit, le passage par la Syrie a pu constituer une alternative. Mais le bombardement des infrastructures au nord de Beyrouth a coupé de nombreuses liaisons terrestres.
Le négociant en bestiaux Eurofrance est un des gros opérateurs sur le Liban. Il fournit des jeunes bovins de boucherie en provenance du Brésil, le bétail européen n'étant plus compétitif depuis la suppression des restitutions européennes, décidée en fin d'année dernière.
« J'espère une levée rapide de l'embargo, a confié Michel Roche, directeur général d'Eurofrance, aux Marchés. On a chargé un bateau la semaine dernière et trois autres sont prévus cette semaine. » Si les ports libanais ne rouvrent pas d'ici trois semaines (la durée du voyage depuis le Brésil), l'opérateur se reportera sur la Syrie. C'est ce qu'il avait fait pour trois bateaux lors des premières semaines du conflit. Les
5 700 bovins avaient ensuite été acheminés par camion jusqu'au nord du Liban et même jusqu'à Beyrouth.
L'export de céréales est lui aussi bloqué. « Personne ne prendra le risque d'envoyer des marchandises, avant d'avoir des certitudes», estime Christelle Tailhardat, chez Granit. Le négociant en céréales filiale d'Epis-Centre a effectué sa dernière livraison juste avant le début du conflit. Elle comprenait trois bateaux de 5 000 tonnes de blé tendre. Et d'autres contrats sont en cours. « Il y a de quoi faire sur le marché libanais. Le pays possède des minoteries», signale-t-elle. Pour l'heure, seule l'aide alimentaire est possible. Cela concerne quelques petits navires, transitant dans des ports ouverts ponctuellement et de manière partielle.