Les fournisseurs ont déjà un œil sur l’après-loi Chatel
Avec 13 articles seulement, donc 5 relatifs à la modernisation des relations commerciales, le projet de loi dit Chatel est plutôt succinct. Mais il est néanmoins synonyme d'un petit bouleversement dans la fixation des prix en instaurant un nouveau mode de calcul du seuil de revente à perte, dorénavant fixé au triple net, soit un potentiel de baisse des prix de 15 à 16%. Les discussions sur le texte ont débuté la semaine dernière dans le cadre de la Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement devant examiner le texte à partir du 21 novembre.
Outre l'intégration de la totalité des marges arrières dans le calcul du SRP, il prévoit quelques nouveautés, à l'image de l'article 3 qui évoque, dans les rapports contractuels entre les membres des interprofessions, « l'insertion dans les contrats types de clauses types relatives […] aux modalités de révision des conditions de vente en cas de fortes variations des cours de matières premières ». De source proche du secrétaire d'Etat à la consommation et au tourisme, on indique que cet article doit agir comme un instrument d'incitation à la discussion en cas de hausses inattendues des prix. Cette clause pourrait rendre effective une nouvelle phase de négociation en cas de contexte difficile.
L’horizon va s’éclairer au printemps
Pour autant, ce dispositif ne sera pas accompagné de sanction. C'est tout juste s'il doit donner plus d'importance aux interprofessions. La promulgation du texte est attendue au 1 er janvier mais pour tous les acteurs de la filière, c'est au printemps que l'horizon deviendra plus clair (ou plus sombre). La négociabilité des conditions générales de vente, demande répétée de la part des distributeurs, va être étudiée d'ici là par Marie-Dominique Hagelsteen, l'ancienne présidente du Conseil de la concurrence s'étant vue confier une mission en ce sens.
Les conclusions à venir pourraient déboucher sur l'inscription de nouvelles dispositions dans la loi de modernisation de l'économie. Car la concurrence et la hausse des prix sont au coeur des interrogations. Sur ce dernier point, la campagne des centres Leclerc a marqué les esprits. Certains industriels et l'Ania ont indiqué de manière non-officielle que cette dernière était attaquable sur le plan juridique, mais personne n'a formellement entamé de démarche dans ce sens. « La grande distribution ne veut pas faire de concurrence qui ne serait pas payée par le fournisseur. Il faut arriver à simplifier le système pour le grand public, et être aussi démagogue et poujadiste que Leclerc pour faire passer le message »a déclaré Jean-René Buisson la semaine dernière.
Le président de l'Ania a indiqué que si la négociabilité des CGV existait déjà dans le monde, elle n'était pas concevable dans le cas du marché français, très concentré. « Si le tarif de base est 100, avec un prix de vente de 70, cela permet un étalement de la trésorerie. Mais les distributeurs veulent 70 tout de suite. C'est insupportable ! ». Voilà en tout cas de quoi alimenter les débats ces prochains mois, avec deux textes de loi qui pourraient modifier une nouvelle fois les rapports entre les industriels et la grande distribution.