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«Les Brésiliens entendent bien contrôler l'expansion des OGM»

Patricia Le Cadre anime aujourd'hui et demain la vingtième édition des journées matières de l'Aftaa (association française des techniciens de l'alimentation et des productions animales) à Paris, dans les Salons de l'Aveyron.

Les Marchés : On assiste au retour à l’abondance de matières premières. Les fabricants d’aliments français en profitent-ils pleinement ?

Patricia Le Cadre : Oui et non. La baisse des prix engendrée par l’abondance de presque toutes les matières premières permet en effet aux fabricants de s’approvisionner à des prix beaucoup plus bas que l’an passé. La forte disponibilité des produits métropolitains rend aussi les industriels moins dépendants des importations. Le manioc ne rentrera pas en France, le tourteau de soja est en perte de vitesse, et les sous-produits d’importations ont du mal à se frayer un chemin. Les céréales et leurs coproduits, mais aussi les tourteaux de colza règnent en maître dans les formules françaises. Pour autant, les marges des fabricants ne sont pas sur la voie de l’amélioration. Car dans un tel contexte, la logique des prix bas est de retour et la concurrence fait rage sur le terrain. C’est l’éleveur le vrai gagnant de cette situation.

LM : De nombreuses négociations concernant le sucre, les biocarburants, la mise en place de la Pac, sont en cours. Peut-on avoir une idée précise de leur impact en alimentation animale ?

P. L.C. : Le dénominateur commun est la difficulté à pronostiquer les volumes de matières premières qui seront disponibles pour le fabricant d’aliments. Il reste, en effet, des zones d’ombre importantes. Ainsi, à quelles productions végétales donnera-t-on la priorité demain en termes de biocarburants ? La France, très compétitive en betteraves sucrières, s’en sortira-t-elle mieux que certains États membres de la concurrence qui va les opposer au Brésil ? Comment évoluera la Pac dans un proche avenir ? Pour beaucoup d’observateurs, les textes actuels ne pourront pas en rester là. Les limites budgétaires et les « miettes » accordées aux pays entrants devraient entraîner très rapidement une nouvelle réforme de notre politique agricole plus vraiment commune… Malgré ces incertitudes, certains acteurs se risqueront à nous livrer des chiffres lors de notre colloque. En pulpes de betterave, la filière table sur une baisse des disponibilités. La réforme sucre pourrait donc ajuster l’offre aux besoins nationaux. En tourteaux de colza, si les objectifs diester se réalisent, nous passerons d’une situation déficitaire à équilibrer, voire excédentaire. Quant aux céréales, dans l’attente de nouvelles modifications des règles, on ne pourra que constater la volatilité croissante des cours.

LM : Les OGM progressent au Brésil. Cela annonce-t-il l’arrêt de l’approvisionnement français en tourteaux inférieurs à 0.9 % d’OGM ?

P. L.C. : L’Aftaa est allée chercher à la source les informations sur ce marché des sojas brésiliens. C’est en effet un analyste du Rio Grande do Sul, un Etat largement envahi par les OGM de contrebande, qui viendra témoigner de l’avancée des sojas transgéniques dans son pays. Si officiellement, le gouvernement annonce un pourcentage de 20 % pour la prochaine récolte, la réalité serait plus proche des 33 %, soit 21 millions de tonnes. Cependant, les Brésiliens entendent bien contrôler l’expansion des OGM dans les années à venir, notamment au travers de la loi sur la biosécurité en cours de discussion au Congrès. Celle-ci permettra d’encadrer la culture et la commercialisation des OGM développés au Brésil, non seulement par les multinationales, mais aussi par les organismes de recherche nationaux. Car, contrairement aux Argentins, les Brésiliens ne veulent pas perdre la main dans cette immense partie de poker. Il existe sans doute une maîtrise possible des choses et donc de l’offre disponible en « non OGM ». Et même si la traçabilité renforce les coûts de production de la filière standard, c’est-à-dire OGM, les filières tracées inférieures à 0.9 % coûtent toujours plus. Parce que la tentation est de plus en plus grande pour l’agriculteur de cultiver des sojas transgéniques. Pour l’instant, ces variétés sont plus rentables que les conventionnelles, même en payant les royalties sur la semence.

Alors, un approvisionnement en soja à moins de 0.9 % d’OGM, cela reste possible, tout étant question de rémunération. Il faut donc que les Européens se donnent les moyens de leur ambition ; c’est ce que disent en substance des Brésiliens soucieux de leur débouchés vers l’UE.

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